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Affaire Khashoggi : Aucune sanction de Biden à l’encontre du prince héritier d’Arabie saoudite

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Source : CNN, Kaitlan Collins, Kevin Liptak, Vivian Salama et Kylie Atwood

Traduit par les lecteurs du site Les Crises

Bien qu’il ait promis de punir les hauts dirigeants saoudiens pendant la campagne électorale, le président Joe Biden a refusé d’appliquer des sanctions à celui que la communauté du renseignement américain a déterminé comme étant responsable de la mort du journaliste Jamal Khashoggi : le prince héritier Mohammed ben Salman.

Le choix de ne pas punir directement le prince Mohammed met en évidence le type de prise de décision qui devient plus compliquée pour un président par rapport à un candidat, et démontre la difficulté de rompre avec un allié gênant dans une région instable.

Vendredi dernier, l’administration Biden a publié un rapport non classifié sur la mort de M. Khashoggi, une action que son prédécesseur a refusé de faire car il tenait le renseignement américain à l’écart. Le rapport de la directrice du Renseignement national indique que le prince héritier, connu sous l’acronyme MBS, a directement approuvé le meurtre de Khashoggi. Mais si le secrétaire d’État Antony Blinken a annoncé des restrictions de visa qui ont touché 76 Saoudiens impliqués dans le harcèlement d’activistes et de journalistes, il n’a pas annoncé de mesures touchant le prince. Et alors qu’une liste de sanctions du département du Trésor nommait un ancien chef adjoint des services de renseignement et la force d’intervention rapide de la Garde royale saoudienne, le prince héritier n’y a pas été mentionné.

Deux responsables de l’administration ont déclaré que sanctionner MBS n’avait jamais vraiment été une option, estimant que cela aurait été « trop compliqué » et aurait pu mettre en péril les intérêts militaires américains en Arabie saoudite. En conséquence, l’administration n’a même pas demandé au département d’Etat de trouver des options pour cibler MBS avec des sanctions, a déclaré un fonctionnaire du département d’Etat.

En quittant la Maison Blanche samedi, Biden a déclaré qu’il y aurait une annonce lundi « sur ce que nous allons faire avec l’Arabie Saoudite en général. »

La Maison Blanche a ensuite tenté de clarifier les commentaires du président, en disant que le département d’Etat se contenterait de fournir plus de détails sur les actions qu’ils avaient précédemment annoncées.

« Le recalibrage des relations avec l’Arabie saoudite a commencé le 20 janvier et il est toujours en cours. L’administration a pris un large éventail de nouvelles mesures vendredi, a déclaré un fonctionnaire de la Maison Blanche. Le président fait référence au fait que lundi, le département d’Etat fournira plus de détails et développera ces annonces, et ne fera pas de nouvelles annonces. »

Interrogé vendredi par Univision sur sa volonté de pousser le prince héritier à respecter les Droits de l’Homme, Biden a déclaré qu’il traitait désormais avec le roi saoudien et non plus avec ben Salman. Il a déclaré que « les règles changent » et que des changements importants pourraient intervenir lundi.

« Nous allons les tenir responsables des violations des Droits de l’Homme et nous allons nous assurer qu’en fait, vous savez, s’ils veulent traiter avec nous, ils doivent le faire de manière à ce que les violations des Droits de l’Homme soient traitées » a déclaré Biden, sans être plus précis sur les plans visant à punir le prince héritier.

On est loin d’un commentaire de novembre 2019, dans lequel Biden promettait de punir les hauts dirigeants saoudiens d’une manière que l’ancien président Donald Trump ne ferait pas.

« Oui, a-t-il déclaré lorsqu’on lui a demandé directement s’il le ferait. Et je l’ai dit à l’époque. Khashoggi a, en fait, été assassiné et démembré, et je crois sur ordre du prince héritier. Et je ferais savoir très clairement que nous ne leur vendrions pas davantage d’armes, qu’en fait, nous leur ferions payer le prix et ferions d’eux les parias qu’ils sont. »

« Il y a très peu de valeur sociale rédemptrice au sein du gouvernement actuel en Arabie saoudite, a-t-il dit. Ils doivent être tenus responsables. »

La définition de l’administration Biden de la responsabilité est maintenant plus claire. Le président a mis fin au soutien américain à la guerre menée par les Saoudiens au Yémen et a ordonné la fin de certaines ventes d’armes au royaume, tandis que ses principaux collaborateurs disent vouloir « recalibrer » la relation.

La directrice de la communication de la Maison Blanche, Kate Bedingfield, a déclaré à Erin Burnett de CNN sur « OutFront » que Biden avait dit au roi Salman bin Abdulaziz Al-Saud, lors de leur conversation téléphonique de jeudi, que les Etats-Unis ne toléreraient pas le comportement du prince héritier, malgré l’absence d’action.

Biden « leur a fait comprendre, et notre administration a fait savoir clairement, que cela cela ne sera plus toléré » a déclaré Bedingfield.

« Cela ne sera pas toléré. Et nous avons pris des mesures aujourd’hui. Le Trésor et l’État ont pris des mesures aujourd’hui pour sanctionner les individus, les réseaux qui ont été impliqués dans ce meurtre horrible » a-t-elle ajouté.

Les responsables de l’administration reconnaissent que le recalibrage de la relation sera délicat. Dans une interview exclusive avec NPR diffusée vendredi après-midi, la directrice du Renseignement national, Avril Haines, a reconnu que le rapport pourrait compliquer les relations américano-saoudiennes à l’avenir.

« Je suis sûre que cela ne va pas faciliter les choses, a-t-elle déclaré. Mais je pense qu’il est également juste de dire que ce n’est pas inattendu. »

Un haut fonctionnaire de l’administration, en expliquant la décision de renoncer à punir le prince héritier à la lumière du rapport, a déclaré que les informations publiées vendredi n’étaient pas nouvelles et étaient connues du gouvernement américain depuis plus d’un an.

En réponse à ce rapport, le ministère saoudien des Affaires étrangères a déclaré qu’il « rejette complètement l’évaluation négative, fausse et inacceptable du rapport concernant le dirigeant du Royaume. »

La relation avec Riyad elle-même semble trop précieuse pour que l’administration Biden l’abandonne complètement en punissant l’homme qui est largement considéré comme dirigeant le royaume. Les fonctionnaires du département d’Etat ont déclaré que l’administration Biden s’est fait un devoir de ne pas interrompre les discussions de travail entre les deux pays, car la relation de sécurité est particulièrement importante.

À bien des égards, ce calcul est le même que celui que l’administration Trump a fait en décidant de ne pas punir le MBS.

Les responsables des administrations Trump et Biden ont reconnu en privé que l’Arabie saoudite est un partenaire essentiel dans les actions de lutte contre le terrorisme et en tant que contrepoids régional à l’Iran, rendant toute tentative d’éloignement presque impossible.

« Il est difficile d’imaginer un problème dans la région où le partenariat et le soutien saoudiens ne jouent pas un rôle significatif » a déclaré Dennis Ross, un ancien coordinateur spécial pour le Moyen-Orient, à CNN.

Gerald Feierstein, ancien sous-secrétaire d’État principal adjoint pour les affaires du Proche-Orient, qui travaille maintenant à l’Institut du Moyen-Orient, a déclaré que l’administration avait pesé sa réponse avec ses autres priorités, comme la fin du conflit au Yémen, la réduction des tensions dans la région du Golfe et les efforts de lutte contre le terrorisme sont également des facteurs, et tous nécessitent une relation bilatérale stable entre les États-Unis et l’Arabie saoudite.

Plus important encore, « les négociations entre les États-Unis et l’Iran devant reprendre plus tard cette année, Biden aura besoin de l’accord des Saoudiens, voire de leur enthousiasme, pour conclure un éventuel accord dans la région » a déclaré Ayham Kamel, chef du groupe Eurasie pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord.

Autre facteur souligné par les analystes : le prince héritier sert effectivement certains objectifs des États-Unis, notamment sa tentative de modernisation et de refonte de l’économie saoudienne.

« Bien que le prince héritier vienne avec un sérieux bagage, ses réformes sont des approches productives de modernisation du royaume, limitant l’influence de l’establishment clérical wahhabite, promouvant un plus grand degré de tolérance religieuse et responsabilisant la jeunesse » a déclaré Kamel.

« Nous avons un intérêt à le voir réussir son effort de modernisation, nous avons un intérêt à ce qu’ils mènent une transition pour sortir des combustibles fossiles » a déclaré M. Ross.

Kamel a déclaré que « l’équipe de Biden ne cherche pas à approfondir l’influence politique directe des États-Unis en Arabie saoudite ni à influencer le débat sur la succession au sein de la maison d’al Saud » , ce que les Saoudiens sont prêts à écouter – dans une certaine mesure.

« Les dirigeants saoudiens ont fermement décidé d’adopter une position constructive à court terme pour limiter les tensions avec les États-Unis » a déclaré Kamel, en soulignant que la libération des militants des Droits de l’Homme était « un rameau d’olivier. »

Et bien que les responsables saoudiens comprennent que Biden est sous pression à Washington pour agir, « ils ne sont pas convaincus que Riyad manque de moyens de pression » a déclaré Kamel, faisant référence à leurs relations en matière de sécurité qu’ils ont développées avec des pays tels que la France et la Russie et à leur capacité à tirer parti des liens avec la Chine pour contrer les États-Unis.

Arlette Saenz, Nicole Gaouette et Donald Judd de CNN ont contribué à cet article.

Source : CNN, Kaitlan Collins, Kevin Liptak, Vivian Salama et Kylie Atwood, 28-02-2021

Traduit par les lecteurs du site Les Crises

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Commentaire recommandé

Le Belge // 22.03.2021 à 07h28

A part ça, le tueur c’est Vladimir Poutine et, là, on sanctionne à tous de bras. Bizarre ce deux poids deux mesures.

14 réactions et commentaires

  • Le Belge // 22.03.2021 à 07h28

    A part ça, le tueur c’est Vladimir Poutine et, là, on sanctionne à tous de bras. Bizarre ce deux poids deux mesures.

      +33

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    • LibEgaFra // 22.03.2021 à 11h17

      Mais bien sûr, Biden a entièrement raison, Poutine est un tueur! Constatez par vous-même:

      – il a tué l’ambition yankee d’installer une base US à Sébastopol;

      – il a tué la volonté des multinationales yankees de s’emparer des incroyables ressources de la Fédération de Russie;

      – il tué la création d’un Grand Israël au Moyen-Orient sur le dos de la Syrie;

      – il a tué en s’alliant avec la Chine la supériorité économique yankee en permettant à cette dernière de poursuivre tranquillement son développement et devenir ainsi la première puissance économique mondiale;

      – il tué la supériorité militaire yankee en développant des armes imparables qui permettent l’anéantissement des USA en cas d’agression contre la Fédération de Russie;

      – ce faisant, il a tué toute possibilité d’une 3me guerre mondiale sous peine de suicide collectif.

      A ce titre, il mérite le prix nobel de la paix! A moins que ce « prix » ne soit décerné qu’à des présidents assassins (par drones et bombardements interposés).

      .Oui, quel « tueur » ce Poutine!

        +15

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  • Christian Gedeon // 22.03.2021 à 08h12

    Ben non, pas de sanction. Ne criez pas, orfraies. C’est une affaire intérieure saoudienne en fait. Non? Et puis et surtout, au lendemain des déclarations d’Aramco mettant en exergue son objectif de fournir en pétrole… la Chine, il n y a là rien d’étonnant, n’est ce pas?

      +2

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  • RGT // 22.03.2021 à 09h17

    Par contre on hésitera pas à embastiller un père de famille qui a commis le CRIME INACCEPTABLE de voler du pain pour éviter que ses enfants ne meurent de faim.

    Que vous soyez puissant ou misérable…

    Comme d’habitude la vérité et la justice passent toujours après le « business » dans les « grandes démocraties ».

      +6

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  • Ali Salmi // 22.03.2021 à 10h09

    L’Insoutenable choix de Biden, qui ne veut pas s’aliéner cette monarchie despotique.
    Les intérêts priment sur les droits humains. Les États-Unis sont l’Empire du mal, ils n’ont rien d’une grande démocratie.

      +7

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    • Mickey Sournois // 22.03.2021 à 10h59

      Les Etats Unis font ce qu’ils ont toujours fait, et d’autres avec eux: de la real polititic.

        +0

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  • Pie vert // 22.03.2021 à 11h06

    Lol, Trump a fait une énorme erreur en ne retirant pas plus vite les soldats US du moyen Orient et dès le début de son mandat.
    Mais, il a cru naïvement qu’il pourrait restaurer la souveraineté du peuple Américain tout en préservant l’empire : grave erreur.
    Quand à Biden attendre d’un impérialiste indécrottable qu’il remette en cause les règles… Lol

      +2

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    • Paul // 22.03.2021 à 12h08

      deja, s’il comprend encore quelque chose.
      la france représentée par hollande avait atteint un fond
      L’image de Biden , pour moi, l’amérique passe pour pitoyable.
      Alors sa petite remarque « jalouse » du Russe, je l’aurais prise plus pour un compliment.

        +2

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  • Darras // 22.03.2021 à 12h10

    Comme disait FDRoosevelt à propos de Somoza:
     » Yes,, he’s a damned son of a bitch. But he’s OUR son of a bitch. »

      +3

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  • bogdan // 22.03.2021 à 16h36

    Je vois que vous connaissez bien ce monde là.
    Au passage, je crois que les USA doivent donner un feu vert à chaque tir (de missile) de F15.

      +1

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    • Darras // 22.03.2021 à 21h31

      Et oui, il est tellement fantastique ce F35 que le secrétaire à la défense lui même, ancien général, vient de déclarer que, comme une Ferrari, il ne fallait le sortir que le dimanche et…. upgrader les F16 pour faire le boulot de tous les jours.
      Et la Navy quant à elle préfère largement ses Super Hornet dont elle vient de recommander une paire de centaine.

      Je n’invente rien

        +2

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  • Hippocampe // 22.03.2021 à 16h58

    Kashoggi, ce vrai bon « journaliste » victime… Cousin de Dodi al Fayed, diplômé de Indiana State University, neveu de Adnan Kashoggi, marchand d’armes payé en centaines de millions de dollars par Lockeed pendant des années, abonné des visites à Langley; actionnaire de la BCCI (Bank of Credit and Commerce International, c’est à dire banque de la CIA pour le Moyen-Orient), acteur du rapprochement avec Israel etc.
    Jamal Kashoggi, un « libéral progressiste » qui pouvait interroger tranquillement Ben Laden dans les grottes de Tora Bora, ben voyons…Et c’est CNN qui va nous éclairer sur le bonhomme!…

      +6

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  • Bouddha Vert // 22.03.2021 à 19h05

    Pas d’amitié entre les pays juste des intérêts partagés.
    Que l’Arabie des Saouds soit le plus gros réservoir de pétrole facile doit jouer un petit peu.
    Que ses princes sans les Etats Unis seraient depuis longtemps dans l’autre monde, leur pays et ressources aux mains d’un autre potentat local, moins allant avec Israël, plus enclin à servir une politique pan arabique… pour ses uniques raisons il serait vraiment stupide de bousculer une situation aussi avantageuse et simple à entretenir.

      +0

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    • Darras // 23.03.2021 à 07h32

      Vous mélangez carrément tout. Et vous prenez vraiment vos aises pour assaisonner votre tambouille. Pas trésor sérieux pour un prétendu expert. 🙂
      A quel moment là Syrie se mêle de la guerre Iran-Irak? Jamais
      Hussein et Assad père ne pouvaient pas se blairer car ils voulaient tous deux le sceptre du califat baassiste.
      Assad n’a JAMAIS appuyé l’Iran durant la guerre contre l’Irak.
      Au démantèlement de l’Irak, la Syrie a même complaisamment sous-traité centre de détention et de torture pour les USA.
      Longtemps, au Liban, les forces pro-syriennes ont été en compétition avec le Hezbollah.
      Le rapprochement ne vient que depuis l’agression contre la Syrie en 2011 et l’évidence que les dissensions récurrentes étaient bien moins importantes que l’Alliance contre des ennemis communs.
      Maintenant, grâce aux petits génies qui ont cru malin d’instrumentaliser Isis et les egorgeurs modérés, les jeunes et cadres du Hezbollah ont eu dix ans pour se former, sur le terrain, à la guerre moderne( et pas contre des civils désarmés sous occupation), et il y a un boulevard pour les alimenter en armes dernier cri. Et ce ne sont pas les timides bombardements israéliens effectués loin, loin du territoire syrien qui vont y changer grand chose. Bonne chance à Israël s’il veulent envahir le Liban aujourd’hui.

        +2

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