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3.septembre.20203.9.2020 // Les Crises

L’Alliance Atlantique et la Sécurité Européenne dans les années 1990

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Photo de groupe du sommet de l’OTAN 1990

Discours du Secrétaire générale, Manfred Wörner prononcé devant le Bremer Tabaks Collegium

L’Histoire n’est pas un long fleuve tranquille. Elle passe par des phases de ralentissement et d’accélération, des phases au cours desquelles les événements se pressent et vont même, parfois, jusqu’à s’emballer. Nous vivons actuellement l’une de ces phases où l’Histoire se fait plus dense. Le visage de l’Europe se transforme radicalement. L’Europe est à la recherche d’une forme nouvelle. Nous n’en connaissons encore aucun élément définitif, mais ses premiers contours se dessinent pourtant déjà.

Comme toujours dans de telles périodes de transition, on voit s’ouvrir des chances et des perspectives nouvelles et audacieuses, mais des risques et des dangers nouveaux nous guettent au bord de la route.

Les chances

Concrétiser notre vision d’une Europe libre et unie, dotée d’une plus grande sécurité et durablement plus pacifique. En fait, il importe peu de trouver une appellation : ordre de paix européen, maison commune européenne, confédération européenne. Ce qui importe c’est le contenu proprement dit, à savoir : droits de l’homme et droit à des élections libres pour tous les citoyens, égalité devant la loi, ouverture des frontières, autodétermination, démocratie et protection des minorités. C’est sur ces points que nous devons insister. Les discussions actuelles sur un nouvel ordre de sécurité se polarisent trop sur des questions de procédure et de structure. En réalité, il serait plus important de mettre l’accent sur le fond même d’un tel ordre. Sa substance est déjà présente dans les trois Corbeilles de la CSCE qu’il faut encore enrichir et rendre juridiquement contraignantes.

Il s’agit des valeurs universelles sur lesquelles s’est construite notre communauté de valeurs atlantique dès son origine. Ces valeurs viennent d’entamer – et vont, espérons le, poursuivre longtemps – leur marche triomphale à travers le monde. L’élan vers la liberté, la démocratie et un ordre économique libéral et ouvert aux forces du marché est le moteur du processus historique que nous traversons. La mission historique qui incombe à notre génération est d’encourager cette dynamique, d’adapter le cours de l’Histoire à notre vision et de lui donner la stabilité nécessaire. Elle définit le rôle fondamental de notre Alliance atlantique, communauté de destin et d’action devenue une référence dans le monde libre.

Les risques

Mais les risques de bouleversement des Etats en Europe sont incalculables. L’instabilité de l’évolution tant intérieure qu’extérieure peut aller jusqu’au danger d’effondrement. L’instauration de la démocratie et l’introduction des réformes économiques en Europe du Centre et de l’Est posent d’énormes problèmes. D’anciennes rivalités nationales et ethniques que l’on croyait dépassées depuis longtemps se réveillent, et des problèmes de frontières et de minorités éclatent à nouveau. Nul ne sait ce qui se passera demain en Union soviétique, avec en toile de fond un potentiel militaire toujours impressionnant. A cela s’ajoutent, dans le tiers monde, les dangers résultant de la diffusion de la technologie des missiles, des armes chimiques et nucléaires. Un monde éternellement en paix reste une illusion séduisante. Pourtant, la politique de puissance continue à déterminer le cours des choses. L’autre partie de notre mission actuelle est d’agir sur ces dangers et d’atténuer les risques, voire de les supprimer.

Les deux grandes organisations de concertation mises en place dans le monde occidental – l’Alliance atlantique et la Communauté européenne – sont absolument indispensables à l’accomplissement des deux parties de notre mission historique. Dans cette phase de notre histoire, nous avons besoin plus que jamais d’union, de stabilité et de coopération avec les Etats-Unis. Sans l’Alliance atlantique, il n’y a ni cohésion ni unité du monde libre, il n’y a pas non plus d’association transatlantique, ni de sécurité et de stabilité. Sans la Communauté européenne, il n’y a pas de croissance harmonieuse de l’Europe, pas de prospérité économique, pas de dynamique.

L’OTAN et la Communauté européenne

II n’y a aucune rivalité entre l’Alliance atlantique et la Communauté européenne. Elles se complètent l’une l’autre et agissent ensemble. Les points sur lesquels leurs domaines de compétences se recoupent appellent une coor-dination, mais pas d’institutions nouvelles. Cette coordination se fait par les Etats membres des deux Organisations et par des contacts informels entre la Commission de la Communauté et le Secrétariat international de l’OTAN.

L’Alliance atlantique a intérêt à voir une Europe plus forte et plus unie – allant jusqu’à l’uni on politique et englobant même la sécurité – se développer dans un cadre de sécurité atlantique. Et cela d’autant plus que nous devons faire face à d’énormes tâches qui exigent le regroupement et non l’éparpillement des forces du monde libre occidental comprenant l’Amérique du Nord.

Les tâches à accomplir

Les tâches les plus importante sont les suivantes :

  1. Apporter notre concours aux pays d’Europe du Centre et de l’Est pour la mise en place de la démocratie et de l’économie. Sans nous, ils n’y parviendront pas.
  2. Aider Gorbatchev et les forces réformistes à poursuivre les réformes dans la voie de la démocratie, la liberté, le pluralisme et l’économie de marché.
  3. Construire un ordre de sécurité paneuropéen.
  4. Ancrer solidement une Allemagne unie dans cet ordre de sécurité, ainsi que dans les structures de l’Ouest – Communauté européenne et OTAN.
  5. Elargir le processus du désarmement et l’accélérer.
  6. Continuer d’exclure l’éventualité de la guerre et rendre inutile toute menace de recours à la force.

Comment pourrions-nous faire face à ces tâches, si nous abandonnons l’Alliance atlantique et si nous la laissons se dissoudre ? Ce serait une erreur historique fatale.

En effet, l’Alliance atlantique :

  • a sorti les Etats-Unis de l’isolationnisme pour les amener à prendre un engagement durable envers la paix et la stabilité en Europe, conduite qu’elle maintiendra à l’avenir;
  • a réussi à tenir en échec la supériorité militaire de l’Union soviétique en Europe;
  • a transformé les armes nucléaires en instruments de dissuasion. On peut certes réduire les armes nucléaires par le désarmement, mais il est impossible de nier leur existence; c’est pourquoi les Européens seraient bien avisés de conserver la structure de contrôle que représente l’Alliance.

Modèle de gestion de la sécurité : du maintien de la paix à l’organisation de la paix

L’Alliance atlantique est devenue un modèle exceptionnel de gestion collective de la sécurité réalisé entre pays libres. Elle a établi une association à la fois politique et militaire entre des Etats souverains. C’est là une des raisons essentielles de son succès dans l’instauration de la paix. Il s’agit maintenant de passer du maintien de la paix à l’organisation de la paix.

Le cadre stabilisateur de l’Alliance a également joué un rôle à l’extérieur en protégeant les Etats européens neutres; les nouveaux Etats démocratiques d’Europe du Centre et de l’Est reconnaissent d’ailleurs que, sans l’OTAN, ils n’auraient pu regagner leur indépendance et leur liberté et qu’ils ne pourraient pas non plus les conserver.

Sans la stabilité qu’offre notre Alliance, l’Europe pourrait à nouveau se montrer sensible aux renversements des alliances et à la politique de puissance du passé. La sécurité se trouverait « renationalisée ». Mais les enseignements de l’histoire européenne sont sans équivoque, s’agissant de la recherche d’une sécurité isolée par des Etats individuels.

Le défi que nous avons à relever est d’élargir le champ de la sécurité sans la diminuer. Ni la Communauté européenne ni la CSCE ne peuvent, isolément ou ensemble, se substituer à l’Alliance atlantique pour garantir la stabilité et la liberté de l’Europe tout entière. Seule l’Alliance atlantique peut lier les Etats-Unis et le Canada à l’Europe, elle seule peut assurer que le changement s’instaurera sans crainte de revers ou de volte-face. Elle seule peut coordonner la stratégie globale de l’Occident pour la paix et la garantie des valeurs démocratiques dans une Europe nouvelle. Elle seule peut ancrer à l’Ouest une Allemagne unie dans des conditions de sécurité maximales pour ce pays et pour ses voisins.

Ordre de sécurité européen

La tâche primordiale de la prochaine décennie est la mise en place d’un ordre de sécurité européen qui englobe l’Union soviétique et les Etats du pacte de Varsovie. L’Union soviétique aura un rôle important à jouer dans la con-struction de cet ordre de sécurité. Si l’on considère la situation de l’Union soviétique, qui se retrouve pratiquement sans alliés véritables, il est compréhensible et justifié qu’elle ne souhaite pas être écartée de l’Europe.

Dans ce cadre européen, l’une des tâches à accomplir est d’organiser une association de sécurité des Etats européens qui aille au-delà de l’affrontement de la guerre froide pour passer de la confrontation à la coopération. Deux solutions sont en présence : une structure de sécurité collective qui absorbera les alliances existantes, et une organisation de sécurité en coopération qui se fondera sur les structures existantes – l’Alliance atlantique et la Communauté européenne pour se surimposer à elles, les relier et les compléter.

Pour nous, cette dernière solution est la seule valable, l’Histoire nous ayant enseigné qu’un système de sécurité collective ne fonctionne que lorsqu’il y a concordance d’intérêts entre les Etats en présence. Si chacun est le garant de la sécurité de tous, en cas de conflit il n’y a plus de garantie pour personne. Un système de sécurité collective repose sur l’hypothèse d’une bonne volonté durable de toutes les parties. Il ne fonctionne, en fait, que jusqu’au moment où
il est véritablement mis à l’épreuve, et il s’effondre alors dans l’affrontement des alliances et des pactes. La Société des nations nous en a fourni un excellent exemple. Il s’agit donc de construire le futur ordre de sécurité européen sur les structures existantes et de perfectionner les formes de coopération dont nous disposons.

Divers éléments permettront la mise en place d’un tel ordre :

  • La CSCE

La CSCE nous offre les grandes lignes d’une future architecture de sécurité. Sous son égide, les 35 Etats participants peuvent façonner leurs relations dans un esprit de communauté et de collaboration concrète. Il faut donc l’étoffer, l’enrichir de nouveaux éléments – tels ceux du droit à des élections libres – et institutionnaliser le processus. La CSCE pourrait alors servir de cadre à des consultations régulières sur la politique de sécurité, les mesures de confiance, la prévention des crises et le règlement pacifique des conflits.

Aussi faut-il élargir le processus de désarmement et le poursuivre de telle sorte qu’aucun Etat ou groupe d’Etats en Europe ne se trouvent plus jamais en mesure d’exercer une menace militaire, ou n’aient même de chances de lancer une attaque avec succès.

  • La Communauté européenne

C’est le modèle le plus porteur d’avenir et le plus prestigieux d’une intégration d’Etats ayant pour objectif l’union politique et pour perspective l’association d’autres Etats européens, voire la réalisation d’une confédération européenne.

  • L’Alliance atlantique

Nous avons là le modèle exemplaire d’une alliance de seize Etats libres et souverains, engagés dans la défense collective de leur sécurité. Cette alliance, solidaire et unie, pourra, même dans l’avenir, accomplir sa mission. Ce n’est pas le cas de la CSCE, qui n’a pas les moyens de décréter et de faire exécuter des sanctions. Chacun des 35 Etats dispose d’un droit de veto. L’éventail des intérêts, la structure des sociétés et les systèmes de valeur de ces pays sont trop différents pour qu’ils puissent, en cas de crise, garantir conjointement la sécurité et l’imposer, surtout si un ou plusieurs d’entre eux sont parties à ce conflit. L’importance de la CSCE, comme cadre propre à créer la confiance n’en est en rien diminuée. Mais la CSCE ne peut se substituer à l’Alliance atlantique, qui restera un pilier essentiel de la future structure européenne de sécurité.

Appartenance de l’Allemagne

L’autre tâche primordiale consiste à ancrer solidement une Allemagne unie dans les structures d’alliance de l’Occident, c’est-à-dire la Communauté européenne et l’OTAN.

La politique de notre Alliance repose sur trois principes :

  1. Nous n’accepterons pas qu’une Allemagne unie soit neutre ou indépendante des blocs. Cette formule entraînerait la déstabilisation de l’Europe, qu’elle rejetterait à l’ère de la politique des équilibres entre les Etats-nations et du système d’alliances et de contre-alliances.
  2. L’Allemagne unie ne devra pas faire l’objet de discriminations qui pourraient ultérieurement conduire au désastre. Là aussi, le spectre de l’histoire se profile.
  3. II s’agit de trouver des solutions qui respectent les intérêts de sécurité légitimes de tous les participants, y compris des Soviétiques. J’insiste : tous les participants – c’est-à-dire pas seulement l’URSS. L’Union soviétique est en mesure et en droit d’attendre que le processus d’unification et l’appartenance de toute l’Allemagne à l’Alliance atlantique ne portent pas atteinte à sa sécurité. Mais il est tout aussi vrai qu’elle ne peut pas attendre que nous mettions l’OTAN en sommeil, lui accordant ainsi ce qu’elle n’a jamais pu obtenir, même à l’apogée de sa puissance. L’Occident ne peut pas, pour compenser l’érosion du Pacte de Varsovie, amputer l’Alliance atlantique ou la dissoudre, mais seulement adopter des mesures de sécurité qui dépassent l’Alliance, c’est-à-dire intégrer l’Union soviétique dans une Europe de la coopération.

Nous procédons actuellement à un examen de notre stratégie, de notre potentiel nucléaire et conventionnel et des missions de l’Alliance, en vue de les adapter aux nouvelles circonstances. Nul ne peut cependant escompter que nous dépouillerons l’OTAN de la pièce maîtresse de sa sécurité et de sa capacité de prévenir la guerre. Notre stratégie, comme notre alliance, sont exclusivement défensives. Elles ne menacent ni ne menaceront personne. Nous n’utiliserons jamais nos armes en premier. Nous sommes favorables à un désarmement d’envergure, allant jusqu’au minimum inaliénable pour notre propre sécurité. Cela vaut aussi pour une Allemagne unie, membre de l’OTAN. Cette affirmation et l’assurance que les troupes de l’OTAN ne dépasseront pas le territoire de la République fédérale d’Allemagne, offrent à l’Union soviétique de solides garanties de sécurité. On peut en outre imaginer que, pendant une période de transition, des troupes soviétiques, en nombre réduit, resteront stationnées sur le territoire de l’actuelle RDA. Cette formule répondra au souhait de l’Union soviétique de ne pas voir modifié le rapport des forces. Il est faux de prétendre, comme le font les hommes politiques soviétiques, que l’appartenance de l’Allemagne à l’OTAN serait facteur d’instabilité. C’est l’inverse qui est vrai. L’Europe – et donc aussi l’Union soviétique – y gagne en stabilité. Qui plus est, cette dernière trouve également à l’Ouest de véritables partenaires prêts à coopérer. Nous ne pensons plus en termes d’ami-ennemi et de confrontation. Nous n’avons pas besoin d’ennemi, nous n’avons pas besoin de cette image. Nous ne voyons pas dans l’Union soviétique l’ennemi – nous souhaitons qu’elle devienne pour nous un partenaire dans les questions de sécurité. A l’inverse, nous attendons qu’elle ne considère pas notre Alliance comme un bloc militaire dirigé contre elle ou même menaçant sa sécurité mais comme un instrument de stabilité sans exclusive et ouvert à la coopération, dans un futur ordre de sécurité supérieur. Nous n’exigeons rien de l’Union soviétique qui puisse lui causer un préjudice. Ce que nous lui proposons est dans son intérêt. Je suis certain que cette conception fera son chemin à Moscou, d’autant que les autres pays du pacte de Varsovie partagent notre vision de la situation.

Rôle politique

Tout ceci montre bien l’importance du rôle politique de l’OTAN dans l’avenir. Ce rôle ne doit pas être inventé de toutes pièces. Depuis sa création, l’Alliance atlantique est plus qu’une simple alliance militaire, même si le militaire a pris le pas sur le politique au temps de la guerre froide. Elle était déjà une communauté de valeurs et une communauté de destin d’Etats libres. Elle l’est aujourd’hui plus que jamais. De ce fait, de nouvelles tâches politiques surgissent, face aux bouleversements actuels.

  • Communauté de destin, l’Alliance doit coordonner la politique des Etats membres :
  • Façonner les relations Est-Ouest.
  • Contribuer à l’instauration d’une nouvelle Europe, démocratique et consacrant l’état de droit.
  • Orienter la maîtrise des armements et en vérifier l’application.
  • Communauté de valeurs, elle doit :
  • Façonner les relations entre les pays occidentaux, c’est-à-dire préserver le lien transatlantique.
  • Harmoniser les divers intérêts des Etats membres et leur trouver un dénominateur commun.
  • Aborder les nouveaux problèmes qui se posent dans le domaine de la sécurité et mettre au point des solutions communes.
  • En bref : organiser la paix.

Si important que soit l’élément politique dans le caractère et les tâches de l’Alliance atlantique, on ne peut et on ne doit pas se cacher que le maintien de la paix reste la pierre angulaire des efforts à déployer pour organiser la paix.

Défense

Ni la politique de détente, ni la maîtrise des armements, ni la diplomatie ne peuvent à elles seules prévenir la guerre. L’effort militaire, que traduit une défense cohérente et crédible, est indispensable. C’est pourquoi l’Alliance atlantique demeure aussi une alliance défensive. Même si la menace d’une attaque directe de l’Union soviétique ne se profile pas actuellement, il subsiste des risques non négligeables, dont nous devons nous protéger. La situation en Union soviétique est extrêmement instable. Nous ne pouvons pas fonder notre sécurité uniquement sur les bonnes intentions d’un dirigeant soviétique. Les personnes et les intentions peuvent changer. L’Union soviétique conserve un potentiel militaire énorme, et quoi qu’il puisse arriver, elle restera la puissance militaire dominante du continent eurasiatique. Si nous baissions notre garde ou si nous laissions notre Alliance se dissoudre, la tentation serait forte, en cas de crise, d’employer la force contre nous ou du moins de nous en menacer. Qui prendrait une telle responsabilité ?

Parce qu’il est le garant de la paix et un élément nécessaire de la gestion de crise, notre dispositif de défense reste inaliénable. La guerre, à la fin du 20ème siècle, serait un tel cataclysme que nous ne pouvons pas nous employer moins sérieusement à la prévenir sous prétexte qu’elle est moins vraisemblable. D’ailleurs, la modification de la menace et le désarmement nous permettent d’adapter aux nouvelles circonstances notre dispositif, nos plans et notre stratégie de défense. Nous avons déjà commencé. Nos réunions ministérielles – qui culmineront, cet été, avec l’organisation d’un Sommet au début du mois de juillet – montreront la voie à suivre.

Nous allons réexaminer notre stratégie et l’adapter à l’évolution des circonstances. Nous allons réduire sensiblement le type et le nombre de nos armes nucléaires et nous allons prendre l’initiative également dans le domaine du désarmement nucléaire. Nous pourrons désormais prévenir la guerre et assurer notre défense en réduisant le nombre des soldats et les armes, le niveau de préparation, notre présence mais en faisant une plus large part à la mobilisation. Nous modifierons les modalités de mise en oeuvre de notre principe stratégique de défense en avant. Les moyens électroniques de reconnaissance et de commandement seront plus déterminants. Les groupements multinationaux prendront plus d’importance. Nous nous efforcerons, dans la poursuite des négociations sur le désarmement avec les Soviétiques, de parvenir à un accord sur un concept de dissuasion minimale. Cependant, un minimum d’armes nucléaires sera toujours indispensable à l’avenir pour prévenir la guerre. La dénucléarisation de l’Allemagne ou même de toute l’Europe nous exposerait au chantage nucléaire et rendrait une guerre conventionnelle de nouveau possible. L’élimination totale des armes nucléaires ne reviendrait pas à accroître la sécurité, mais à la diminuer.

Il est en effet particulièrement important que nous maintenions – et ce, avec l’Allemagne – une défense et une planification de la défense cohérentes et intégrées. Il ne serait pas bon que chacun réduise à sa guise, sans concertation avec l’Alliance et les Alliés.

En conclusion, l’OTAN n’est nullement dépassée. Elle est, au contraire, irremplaçable dans son triple rôle :

  1. Dans son rôle d’alliance politique et de communauté de valeurs du monde libre, comme instrument du changement et de l’organisation de la paix
  2. Dans son rôle d’alliance transatlantique,
    comme lien et fondement de la communauté de destin des pays d’Amérique du Nord et d’Europe
  3. Dans son rôle d’alliance sécuritaire, comme instrument du maintien de la paix et comme cadre de stabilité pour le changement.

Transformation de l’Alliance

II est vrai que notre Alliance est en mutation. Elle évolue dans le temps et avec le temps. Depuis deux ans déjà, elle s’adapte à la nouvelle donne de la définition des tâches, des questions de fond et de la politique. Ce processus se poursuit. Le centre de gravité de notre Alliance se déplace, passant :

  • de la confrontation à la coopération,
  • du militaire au politique,
  • de la dissuasion à la protection contre le risque et à la garantie de la stabilité,
  • du maintien de la paix à l’organisation de la paix,
  • du leadership des Etats-Unis à un authentique partenariat, dans lequel les Européens assument des responsabilités égales.

Le prochain sommet de l’OTAN entérinera notre nouvelle conception des rôles et lancera une stratégie élargie pour l’Europe nouvelle des années 90.

Quelle alternative pour l’Europe ?

L’Europe se trouve de vant une alternative fondamentale : ou elle retombe dans l’ancien système politique de puissance et d’équilibre des siècles passés, ou elle avance sur la voie d’un nouvel ordre de paix et de liberté résultant d’une coopération internationale ou supranationale. Notre choix est clair : nous allons de l’avant. Notre Alliance est, avec la Communauté européenne, le modèle le plus accompli de ce partenariat entre Etats. Elle est et demeure notre meilleure garante d’un avenir sûr et libre.

Source : Archives en ligne de l’OTAN, le 17 mai 1990.

Sources : ici et

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4 réactions et commentaires

  • Le Belge // 03.09.2020 à 10h24

    Quand dissout-on l’OTAN et, plus important, quand rénove-t-on l’Union de l’Europe Occidentale ? Parce que la question n’est pas de savoir « si », mais de savoir « quand » ? Réponse : quand les dirigeants européens montreront qu’ils sont des hommes, des vrais ! Si vous saviez ce que c’est que de vivre à une encablure du SHAPE (Cambron-Casteau) et du siège politique de l’OTAN (Evere, dans les faubourgs de Bruxelles). C’est une angoisse permanente de se faire vitrifier.

      +6

    Alerter
    • calal // 03.09.2020 à 13h01

      « C’est une angoisse permanente de se faire vitrifier. »
      lol
      jai des angoisses,je suis un pauvre petit flocon de neige :le siege de l’otan doit donc demenager ou se dissoudre pour calmer mes terreurs nocturnes…
      Pardon de ne pas prendre en compte vos emotions…je suis un monstre un vrai homme ecouterait ses emotions et compatirait a votre martyr…

        +2

      Alerter
  • LibEgaFra // 03.09.2020 à 13h11

    Ca, c’est trop drôle:

    « Ce processus se poursuit. Le centre de gravité de notre Alliance se déplace, passant :
    de la confrontation à la coopération,
    du militaire au politique,
    de la dissuasion à la protection contre le risque et à la garantie de la stabilité,
    du maintien de la paix à l’organisation de la paix,
    du leadership des Etats-Unis à un authentique partenariat, dans lequel les Européens assument des responsabilités égales. »

    Lire:
    – de la coopération à la confrontation après diabolisation;
    – du politique au militaire (Yougoslavie, Ukraine, Ossétie, etc.)
    – de la garantie de la stabilité à la dissuasion;
    – du maintien de la paix à la préparation de la prochaine agression (Biélorussie,…);
    – d’un partenariat à l’hégémonie yankee et à la vassalité de l’ue.

    Bref un total succès!

      +7

    Alerter
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