Bernie Sanders a pris la tête d’un rassemblement de l’United Auto Workers [UAW ou Union des travailleurs de l’automobile, NdT] à Detroit le premier jour de la grève, déclarant que « tous les travailleurs, qu’ils soient cols blancs ou cols bleus, doivent se tenir aux côtés de l’UAW dans leur lutte pour la justice. » Nous reproduisons l’intégralité de ses propos.
Source : Jacobin, Bernie Sanders
Traduit par les lecteurs du site Les-Crises
Je vous remercie de m’avoir invité et c’est un honneur pour moi d’être ici avec vous aujourd’hui. Permettez-moi de remercier l’UAW (United Auto Workers) d’avoir défendu non seulement ses propres membres, mais aussi la classe ouvrière de ce pays. Le combat que vous menez ici ne concerne pas seulement les salaires décents, les conditions de travail et les pensions dans l’industrie automobile. Il s’agit d’une lutte contre la cupidité des entreprises et de dire aux dirigeants que ce pays nous appartient à tous, et pas seulement à quelques-uns.
Ce n’est pas pour rien qu’un récent sondage Gallup a révélé que 75 % des Américains soutenaient l’UAW. Ils en ont assez d’une économie dans laquelle les riches s’enrichissent tandis que les familles de travailleurs luttent et que les plus désespérés dorment dans les rues. L’enjeu de cette lutte, ici dans le Midwest, est d’exiger que nous ayons enfin une économie qui fonctionne pour nous tous, et pas seulement pour quelques-uns.
Je voudrais dire quelques mots sur un sujet dont on ne parle pas beaucoup à la télévision ou dans les couloirs du Congrès. Ce qui se passe aujourd’hui dans l’économie américaine, c’est qu’à une époque où l’inégalité des revenus et des richesses est sans précédent, les salaires hebdomadaires du travailleur américain moyen sont plus bas aujourd’hui qu’ils ne l’étaient il y a cinquante ans. En d’autres termes, malgré une augmentation massive de la productivité des travailleurs dans l’industrie automobile et dans tous les secteurs de notre économie, malgré le fait que les PDG gagnent aujourd’hui quatre cents fois plus que le travailleur moyen, malgré les bénéfices records des entreprises, malgré les centaines de milliards dépensés par les entreprises américaines en dividendes et en rachats d’actions, le travailleur américain moyen est aujourd’hui moins bien loti qu’il ne l’était il y a cinquante ans.
Ce n’est pas pour rien qu’un récent sondage Gallup a révélé que 75 % des Américains soutenaient l’UAW.
Frères et sœurs, c’est exactement l’objet de cette grève. Et c’est pourquoi tous les travailleurs américains, qu’ils soient cols blancs ou cols bleus, ou qu’ils se situent entre les deux, doivent se tenir aux côtés de l’UAW dans leur lutte pour la justice.
Dans l’Amérique d’aujourd’hui, alors que les inégalités de revenus et de richesses n’ont jamais été aussi importantes, trois personnes au sommet possèdent plus de richesses que la moitié inférieure de la société américaine. Malgré toute cette richesse, frères et sœurs, 60 % de nos concitoyens vivent d’un salaire à l’autre.
Cela signifie qu’ils subissent chaque jour un stress incroyable. Ils s’inquiètent de ne pas pouvoir payer leur loyer, de ne pas pouvoir mettre de la nourriture sur la table. Ils s’inquiètent de ne pas avoir les moyens d’aller chez le médecin lorsque leur enfant tombe malade. Ils s’inquiètent du coût élevé des services de garde d’enfants. Ils se demandent s’ils pourront un jour envoyer leurs enfants à l’université. J’ai grandi dans une famille qui vivait au jour le jour, et j’en sais quelque chose.
Nous vivons dans le pays le plus riche de l’histoire du monde, et les familles américaines, les familles de l’industrie automobile, ne devraient pas avoir à vivre avec ce genre de stress.
Et laissez-moi vous dire – et Shawn [Fain] l’a souligné à maintes reprises – qu’au cours des cinquante dernières années, il y a eu une redistribution massive des richesses. Le problème, c’est qu’elle s’est faite dans la mauvaise direction. Au lieu d’aller du haut vers le bas, elle est allée du bas vers le haut. L’enjeu de cette grève, et la raison pour laquelle les travailleurs se lèvent dans tout le pays, c’est que nous allons inverser cette tendance. Si la classe dirigeante de ce pays veut une redistribution des richesses, nous allons la lui donner.
Au cours des cinquante dernières années, on a assisté à une redistribution massive des richesses. Le problème, c’est qu’elle s’est faite dans la mauvaise direction.
L’une des raisons pour lesquelles je suis si fier d’être à Détroit aujourd’hui avec l’UAW, c’est qu’en 1937, vos grands-parents se sont levés et ont contribué à transformer ce pays avec un courage incroyable .Ils se sont attaqués à la cupidité des entreprises de leur époque, au pouvoir des grandes sociétés, et ils ont contribué à ouvrir la voie à une classe moyenne en Amérique.
Et nous voici aujourd’hui, en 2023, quatre-vingt-six ans plus tard. Et une fois de plus, l’UAW contribue à mener l’effort de reconstruction et de croissance de la classe moyenne américaine. Je vous remercie de votre attention.
Je voudrais dire un mot aux PDG de General Motors, Ford et Stellantis : comprenez les énormes sacrifices financiers que vos travailleurs ont consentis au fil des ans. Il est temps pour vous de mettre fin à votre cupidité. Il est temps pour vous de traiter vos employés avec le respect et la dignité qu’ils méritent. Il est temps de vous asseoir et de négocier un contrat équitable.
Je dis à Mary Barra, PDG de General Motors : l’année dernière, vous avez gagné plus de 29 millions de dollars. Depuis que vous êtes devenue PDG il y a huit ans, vous avez gagné plus de 200 millions de dollars en rémunération totale. Avez-vous la moindre idée de ce que cela représente pour l’un de vos employés d’essayer de survivre avec 17 dollars de l’heure, ce qui est le salaire de départ moyen d’un ouvrier de l’automobile ? Savez-vous, Madame Barra, ce que c’est que d’essayer d’élever une famille, de mettre de la nourriture sur la table et de payer le loyer quand on gagne vingt dollars de l’heure ?
En 1937, vos grands-parents se sont levés et ont contribué à transformer ce pays avec un courage incroyable.
Je dis à Carlos Tavares, le PDG de Stellantis : l’année dernière, vous avez reçu une augmentation de salaire de 22 %, et aujourd’hui vous gagnez plus de 25 millions de dollars de rémunération totale. Savez-vous, Monsieur Tavares, ce que c’est que d’être classé comme intérimaire ? Et bien que vous travailliez année après année, vous restez un intérimaire qui reçoit des salaires et des avantages nettement inférieurs à ceux de vos frères et sœurs qui font exactement le même travail ? M. Tavares, avez-vous la moindre idée de ce dont il s’agit ?
Et je dis à Jim Farley, le PDG de Ford : l’année dernière, vous avez gagné près de 21 millions de dollars en rémunération totale. Je suppose que lorsque vous prendrez votre retraite, vous bénéficierez d’une excellente pension, d’une prime de retraite en or et de toutes sortes d’avantages. Avez-vous la moindre idée de ce que c’est que d’être un travailleur vieillissant, d’avoir travaillé toute sa vie et de ne pas avoir d’argent à la banque au moment de préparer sa retraite ?
Je sais que les médias n’ont parfois pas été aussi clairs qu’ils auraient pu l’être sur ce point : ce pour quoi l’UAW se bat n’est pas radical. Au cours du premier semestre 2023, les trois grands constructeurs automobiles ont réalisé 21 milliards de dollars de bénéfices, soit 80 % de plus que l’année dernière à la même époque. En d’autres termes, ils s’en sortent plutôt bien. Au cours de la dernière décennie, les trois grands ont réalisé 250 milliards de dollars de bénéfices rien qu’en Amérique du Nord. L’année dernière, ces entreprises ont dépensé 9 milliards de dollars, non pas pour améliorer la vie de leurs travailleurs, mais pour payer des rachats d’actions et des dividendes afin d’accroître la fortune de leurs actionnaires.
Alors que les PDG et les actionnaires de l’industrie automobile se sont enrichis comme des bandits, les travailleurs qui produisent les véhicules gagnent des salaires totalement inadéquats et qui, au cours des dernières décennies, ont pris de plus en plus de retard.
Vous savez tous qu’il fut un temps où un emploi syndiqué dans l’industrie automobile était l’étalon-or de la classe ouvrière américaine. Nous sommes déterminés à faire revivre cette époque. Nous n’accepterons pas qu’au cours des vingt dernières années, le salaire moyen des travailleurs américains de l’automobile ait diminué de 30 % après correction de l’inflation. Voulez-vous savoir pourquoi vous êtes en grève en ce moment ? C’est la raison.
Je lis souvent dans les médias qu’une grève est néfaste pour l’économie. Eh bien, laissez-moi vous dire quelque chose à propos de l’économie. Lorsque des ouvriers de l’automobile n’ont pas les moyens d’acheter les voitures qu’ils fabriquent, c’est mauvais pour l’économie. Lorsque des ouvriers de l’automobile n’ont pas les moyens de contracter un prêt hypothécaire pour acheter une maison modeste, c’est mauvais pour l’économie. Lorsque des ouvriers de l’automobile n’ont pas les moyens de faire garder leurs enfants ou d’économiser pour les envoyer à l’université, c’est mauvais pour l’économie. Lorsque des travailleurs de l’automobile ne peuvent pas se payer des médicaments sur ordonnance ou des soins de santé, c’est mauvais pour l’économie.
Un emploi syndiqué dans l’industrie automobile était l’étalon-or de la classe ouvrière américaine. Nous sommes déterminés à faire revivre cette époque.
Il est tout à fait raisonnable que les travailleurs de l’automobile reçoivent enfin une part équitable des bénéfices records que leur travail a permis de réaliser. Cela signifie que si les Trois Grands peuvent se permettre de dépenser 9 milliards de dollars en dividendes et en rachats d’actions l’année dernière, ils peuvent se permettre d’accorder aux ouvriers de l’automobile une indemnité de vie chère décente afin que leurs salaires suivent l’inflation. Cela signifie qu’il est grand temps de mettre fin au désastreux système à deux vitesses. Cela signifie qu’il faut enfin mettre fin au recours aux travailleurs temporaires. Et surtout, cela signifie que chaque travailleur de l’automobile doit bénéficier d’un régime de retraite décent afin de pouvoir prendre sa retraite dans la dignité.
Cela signifie que les travailleurs devraient avoir le droit de faire grève lorsqu’un constructeur automobile annonce qu’il va fermer une autre usine rentable aux États-Unis (et d’ailleurs, au fil des ans, ils ont fermé soixante-cinq de ces usines).
Mais ce n’est pas tout. Alors que nous luttons contre la menace existentielle du changement climatique et que nous essayons de faire en sorte que cette planète soit saine et habitable pour nos enfants, cela signifie que lorsque l’industrie automobile construit de nouvelles usines de véhicules électriques et de batteries, les travailleurs de ces usines deviennent membres de l’UAW et reçoivent les mêmes salaires et les mêmes avantages que les membres du syndicat.
Nous refusons d’accepter une société dans laquelle si peu de gens ont tant et tant de gens ont si peu.
Frères et sœurs, les PDG de General Motors, Ford et Stellantis et leurs principaux actionnaires de Wall Street doivent comprendre qu’ils ne peuvent pas tout avoir. Nous refusons de vivre dans une oligarchie. Nous refusons d’accepter une société dans laquelle si peu de gens ont tant et tant de gens ont si peu.
Frères et sœurs, trop c’est trop. Soyons solidaires pour mettre fin à la cupidité des entreprises. Soyons solidaires pour reconstruire la classe moyenne en voie de disparition. Créons une économie qui fonctionne pour tous, et pas seulement pour les 1 %. Et soyons tous – chaque Américain dans chaque État de ce pays – aux côtés de l’UAW.
Je vous remercie de votre attention.
Contributeur
Bernie Sanders est un sénateur américain du Vermont.
Source : Jacobin, Bernie Sanders, 17-09-2023
Traduit par les lecteurs du site Les-Crises
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Commentaire recommandé
« En quoi consiste cette devise ? Dans l’union de ces trois mots : liberté, égalité, fraternité. Oubliez-en un, les autres n’ont plus de signification. Dites la liberté seulement, et vous arrivez à ceci : les hommes ne s’aiment pas ; chacun pour soi ; la lutte s’engage ; les uns triomphent, les autres sont vaincus : plus de liberté. Pour qu’elle existe, il faut mettre dans l’égalité ; et pour que l’égalité elle-même se maintienne, il faut la sanctifier par le sentiment de la fraternité. » (Louis Blanc, Le Moniteur universel, 24/03/1848)
17 réactions et commentaires
Whaou , ça c’est du discours .Et après ils voteront ces imbéciles pour Biden ou Trump …Bah faut dire aussi que la démocrasse américaine est loin d’etre exemplaire .
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AlerterAux USA les électeurs ne votent pas pour le président du moins directement le système électoral n’a rien a voir avec le nôtre Au fait plus de 65 pour cent des électeurs de sont abstenus aux municipales françaises en 2020 et vous avec vous voté par exemple ?
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AlerterJe voterai quand je disposerai du RIC en toutes matières et à tous les niveaux territoriaux pour pouvoir reprendre la parole pour décider de ce qui me regarde ! Voir le CLIC, MCP, Espoir-ric,ric-France,….!
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AlerterÀ Grenoble, ville qui bien sûr est dirigée par le très démocratique Éric Piolle, les unions de quartier ont proposé d’instaurer un RIC local permettant d’instaurer une démocratie locale réelle…
Cette proposition a été encensée par le maire et toute l’équipe municipale qui a décidé de mettre cette proposition immédiatement en place et désormais les habitants ont le droit de faire valoir leur souhaits de vie…
Je déconne !!!
Tous les « grands démocrates » de l’équipe municipale ont décrété que c’était une horreur, que c’était ILLÉGAL et que les CONS n’avaient qu’à FERMER LEUR GUEULES comme partout ailleurs en France et dans les pays développés.
Et pour bien rappeler « qui est le maître » les citoyens qui étaient opposés à la mise en place du stationnement payant dans TOUTES les ruelles du quartier se sont pris une fin de non recevoir en pleine gueule…
Associée bien sûr à une augmentation des impôts locaux de 30% (pour payer les conneries idéologiques et les frais de justice et d’avocats dans le procès au cours duquel le « maître » été condamné par la justice)…
Dans les petits villages, la démocratie participative est bien plus efficace :
[Modéré]
En attendant les habitants financent AUSSI des pubs à la con pour le miracle vélo (couloirs de la mort).
Mais pour circuler à vélo à Grenoble il faudrait d’abord ne pas se le faire voler en permanence, même chez soi…
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AlerterDiscours fort. Mais l’individualisme est tellement valorisé dans ce pays que les gens préfèrent se débrouiller seuls. Ou bien ils font confiance à des politiciens soit-disant modérés ou « plus raisonnables » qui sont en réalité des néolibéraux convaincus au service de Wall Street, du genre Hillary Clnton. Je ne parle même pas de Trump, qui en est à traiter Joe Biden de marxiste : https://www.salon.com/2023/08/05/says-that-communists-and-marxists-led-by-biden-are-violating-his-civil-rights/
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AlerterSelon Emmanuel Todd, il n’y a surtout peu de notion d’égalité, juste de liberté dans leur valeur (même en Grande-Bretagne). Iels acceptent plus qu’il y en a (beaucoup ? et jusqu’à quand ?). Contrairement à la France qui a une valeur d’égalité aussi (avec la fraternité, qui est de plus en plus oublié aussi ?). Ce n’est-il pas trop d’acculturation états-uniennes et anglaises qui change de plus en plus cette valeur en France et dans certains pays non anglo-saxonne ?
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Alerter« En quoi consiste cette devise ? Dans l’union de ces trois mots : liberté, égalité, fraternité. Oubliez-en un, les autres n’ont plus de signification. Dites la liberté seulement, et vous arrivez à ceci : les hommes ne s’aiment pas ; chacun pour soi ; la lutte s’engage ; les uns triomphent, les autres sont vaincus : plus de liberté. Pour qu’elle existe, il faut mettre dans l’égalité ; et pour que l’égalité elle-même se maintienne, il faut la sanctifier par le sentiment de la fraternité. » (Louis Blanc, Le Moniteur universel, 24/03/1848)
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AlerterQuel titre… Alors que le mec est dirigeant de l’un des deux partis traditionnels de la grande bourgeoisie. C’est gonflé.
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AlerterJustement, Bernie Sanders présente un profil atypique au sein de l’establishment du parti démocrate, raison pour laquelle les primaires dudit parti furent truquées au profit de Hilary Clinton. M. Sanders appartient à cette gauche qui se souciait vraiment des classes populaires et des classes moyennes et pas seulement pour accéder au pouvoir et ensuite les trahir au profit de la bourgeoisie faisant subventionner une partie de son train de vie par la collectivité
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AlerterIl est indépendant. Je crois qu’il a adhéré quelques années au parti démocrate pour pouvoir demander son investiture, mais il est à nouveau indépendant.
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Alerter« Avez-vous la moindre idée de ce que cela représente pour l’un de vos employés d’essayer de survivre avec 17 dollars de l’heure, ce qui est le salaire de départ moyen d’un ouvrier de l’automobile ? Savez-vous, Madame Barra, ce que c’est que d’essayer d’élever une famille, de mettre de la nourriture sur la table et de payer le loyer quand on gagne vingt dollars de l’heure ? »
Sur ce point, j’ai du mal à comprendre. Le salaire minimum aux USA est de 7,25$ de l’heure et 17 ou 20$ sont au dessus des 15$ promis par J.Biden. Les revenus des dirigeants sont certes exorbitants et en hausse, et il y a bien une oligarchie de plus en plus pesante, mais … Ben, faudrait voir quelles sont les difficultés des américains pour vivre (logement, santé, éducation, bouffe, …), -et attention, il y a de grosses différences à travers les différents Etats- et/ou les ressentis d’un employé pour mieux comprendre.
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AlerterBernie Sanders, contrairement à la gauche grande bourgeoise de la Côte Est obsédée par des minorités lui permettant de détourner le regard de la classe ouvrière qu’elle a trahie, n’oublie pas les classes moyennes, clef de la société des Etats Unis dès années 1940 à la fin des années 1980. Hélas, comme l’élite du parti démocrate l’a évincé au profit de Hilary Clinton, ce discours favorable aux travailleurs a pu être récupéré par Donald Trump, qui a occupé l’espace ainsi laissé vide. S’agissant de l’industrie automobile, ses ouvriers bénéficiaient de salaires très décents, irriguant l’économie de bien des villes. Ce qui avait contribué à la faillite de GM et Chrysler provenait moins de ces salaires parfois très confortables avant la crise des subprimes que de l’explosion des coûts de santé aux états unis : ces entreprises avaient accordé des prestations de soins à leurs (très nombreux) employés à une époque où ces prestations n’atteignaient pas des niveaux délirants. Il s’agit d’un sujet souvent éludé : l’accès aux soins pour les classes moyennes, dont le coût devenu prohibitif affaiblit tout le pays. Il n’y a pourtant rien qui prouve qu’un médecin soigne mieux ses patients s’il a les moyens de se payer une Ferrari que s’il ne peut s’offrir qu’une Cadillac. Il faudra un jour se demander comment le coût des soins a pu ainsi exploser et au profit de qui.
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AlerterCeci est très intéressant. Où avez vous trouvé ces informations ?
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AlerterC’étaient des choses très discutées quand Chrysler Ford et GM se trouvèrent au bord de la faillite vers la fin des années 2000. Ford y échappa de peu, pas les deux autres. En gros, les Big Three devaient assumer les pensions et les frais médicaux de leurs anciens employés, alors qu’ils affrontaient la concurrence des constructeurs japonais et allemands dont les usines américaines, récentes, avaient des salariés bien plus jeunes, moins nombreux, et qui refusaient de s’affilier à l’uaw. Résultat : les Big Three produisaient des véhicules plus chers puisqu’il fallait je crois répercuter de 2 000 à 4 000 dollars de coûts « sociaux » par voiture. Pour une raison ou une autre, l’uaw n’a pas voulu convertir ces droits sociaux en actions Chrysler ou GM, qui auraient illico bondi après l’abandon de ces engagements. L’uaw prétendait que les constructeurs jouaient avec les peurs en menaçant de faire faillite. Mais il y avait bel et bien un problème, très dur à gérer, que la crise des subprimes a rendu intenable.
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Alerter« Il faudra un jour se demander comment le coût des soins a pu ainsi exploser et au profit de qui. »
Je me demandais par curiosité quels étaient les coûts de soins aux USA. Ils sont énormes en effet (au moins 200$ pour une simple consultation chez un médecin généraliste …).
Sinon, en ce qui concerne les hôpitaux, de ce qu’a rapporté Chris Hedges, ce n’est pas rose actuellement ( https://elucid.media/societe/lhopital-salaries-passes-heros-zero-infirmieres-penurie-greve-chris-hedges ). Il faudrait des efforts politiques qui aillent dans le bon sens, ce que ne fait pas le Congrès. Selon un docteur à la fin de l’article, avec une couverture universelle de santé et en rejetant la mainmise des entreprises à but lucratif du système de soins.
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AlerterBernie Sanders est sans doute bien brave et généreux, mais complètement inconscient des réalités actuelles, accroché à un modèle de société industrielle/technologique hyper-productiviste qui a démontré son absurdité et ses nuisances à l’égard des êtres humains et de leur biotope (les « ressources naturelles », l’ensemble des êtres vivants interdépendants).
Pour ce qui est de l’industrie automobile, la solution de mobilité, où que ce soit, réside dans la recherche et l’application de véhicules utilitaires(de transports d’objets/matériaux utiles et nécessaires ainsi que de transports en commun de personnes) fonctionnant avec un minimum d’énergies fossiles, et dans l’abandon progressif des véhicules particuliers destinés aux plaisirs égoïstes et individualistes des privilégié-e-s de la « société de consommation ».
Sans oublier de porter toute l’attention sur la production locale de « biens » indispensables (en premier lieu, ceux destinés à l’alimentation) ainsi que sur l’établissement d’une politique de logement qui rapproche les « travailleurs-euses » de leurs lieux d’activité.
Bien sûr, cette proposition bouscule totalement « l’économie de marché » compétitive, mais cela ne devrait-il pas être le premier souci de tout qui se prétend un-e digne représentant-e des opprimé-e-s?
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AlerterÀ force de division, il ne reste plus que des individus. Aucun groupe n’a été épargné, aucune communauté, il ne reste rien, sommés de marcher au pas du techno data sciento humano capitalisme, les politiques n’assurent plus leurs roles et se muent en VRP coercitif de la révolution digitale. Ni sanders ni trump, ni état profond, mais simplement des business plan avec comme variable notre soumission.
Reajuster la notion de groupe passera inévitablement pas une destruction des empires et des états nations. En route vers le tribalisme et la regionalisation
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