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12.novembre.202412.11.2024 // Les Crises

Il y a 41 ans : 220 Marines américains tués dans la guerre d’Israël contre le Liban

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Avons-nous retenu la leçon ? Si les États-Unis ne s’étaient pas mêlés des affaires de Tel-Aviv, les bombardements n’auraient jamais eu lieu.

Source : Responsible Statecraft, Paul R. Pillar
Traduit par les lecteurs du site Les-Crises

L’objectif du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou, qui est de piéger les États-Unis dans une guerre plus large au Moyen-Orient, est déjà en partie atteint. Au début du mois, les forces américaines ont été directement engagées, pour la deuxième fois cette année, via l’interception de missiles tirés par l’Iran en représailles à des attaques israéliennes contre des intérêts iraniens.

Les États-Unis ont également attaqué des cibles au Yémen, même avec des bombardiers lourds B-2 à long rayon d’action. Les combats avec le Yémen, tout comme les échanges de tirs avec l’Iran, sont une conséquence directe de la politique israélienne d’assujettissement des Palestiniens et du carnage dans la bande de Gaza après l’attaque du Hamas du 7 octobre.

L’une des plus récentes extensions de l’implication des États-Unis dans les guerres d’Israël a été le déploiement en Israël du système de défense antimissile THAAD, accompagné d’une centaine de militaires américains chargés de le faire fonctionner. Non seulement ces déploiements mettent les Américains de plus en plus en danger, mais ils encouragent également Netanyahou à intensifier ses guerres en réduisant l’impact des inévitables représailles de la part de ceux qu’Israël attaque.

Alors qu’aucune fin n’est en vue dans l’escalade israélienne, et que cette escalade s’est concentrée ces dernières semaines sur un assaut israélien au Liban qui a commencé à reproduire certaines des souffrances de Gaza, les Américains devraient réfléchir à la façon dont les États-Unis se sont retrouvés piégés dans une guerre israélienne antérieure dans cette région, et au résultat tragique de cette implication qui s’est produite il y a 41 ans.

Israël a envahi le Liban en 1982, marquant ainsi le début d’une occupation qui n’a pris fin qu’en 2000. Cette invasion israélienne du Liban, tout comme l’invasion actuelle, était directement liée à la même politique israélienne consistant à écraser et à soumettre les Palestiniens. Le principal objectif d’Israël en 1982 était de détruire les capacités de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), qui résidait alors au Liban, et de chasser l’OLP du Levant. Israël a également cherché à faire pencher l’équilibre des forces au sein du Liban – qui avait déjà été plongé dans une guerre civile – vers des forces favorables à Israël.

L’invasion et l’occupation israéliennes ont considérablement accru les souffrances des Libanais et des réfugiés palestiniens. Le massacre des camps de réfugiés de Sabra et Chatila, en septembre 1982, a constitué l’un des épisodes les plus terribles de l’histoire du pays. Les miliciens de la Phalange ont massacré quelque 3 000 civils tandis que l’allié de la Phalange, les Forces de défense israéliennes, tirait des fusées éclairantes pour que le massacre se poursuive pendant la nuit.

Quelques semaines plus tôt, les États-Unis, sous l’administration Reagan, avaient accepté de déployer des Marines américains, aux côtés de petits contingents militaires français, britanniques et italiens, dans le cadre d’une force multinationale au Liban. À première vue, ce déploiement avait une noble mission de maintien de la paix, qui consistait à mettre fin à la violence au Liban. Mais les observateurs libanais et autres avaient des raisons de percevoir l’action des États-Unis comme une prise de position en faveur d’Israël et des forces politiques internes qu’elle favorisait.

Outre le contexte des relations générales entre les États-Unis et Israël, la principale réalisation de la force multinationale était de faciliter le départ de l’OLP du Liban, ce qui faisait partie de l’objectif d’Israël lors de l’invasion du Liban.

En outre, comme pour d’autres déploiements de personnel militaire américain dans des endroits déjà dangereux, la logique meurtrière de la protection des forces s’est mise en marche et le maintien de la paix s’est transformé en action offensive. Le président Reagan a autorisé « l’autodéfense agressive » contre les forces hostiles qui représentaient une menace pour les Marines, ces mêmes forces hostiles étant également des adversaires d’Israël et de ses alliés de la milice libanaise. L’engagement des États-Unis sur le terrain a été soutenu par des tirs navals, notamment par le cuirassé New Jersey qui a tiré des obus de 400 mm sur des cibles situées dans les montagnes près de Beyrouth.

Tout cela s’ajoutait à l’aversion habituelle des éléments nationaux pour toute présence militaire étrangère, qui, en d’autres temps et en d’autres lieux, a alimenté des réactions violentes, y compris le terrorisme suicidaire.

La réaction la plus meurtrière à l’action des États-Unis au Liban s’est produite le 23 octobre 1983, lorsqu’un kamikaze a conduit un camion chargé d’explosifs contre le bâtiment de l’aéroport de Beyrouth que les Marines utilisaient comme caserne. L’explosion du camion piégé a tué 220 Marines et 21 autres militaires américains. Il s’agit de la journée la plus meurtrière pour le corps des Marines américains depuis la bataille d’Iwo Jima lors de la Seconde Guerre mondiale et du bilan le plus lourd pour l’ensemble de l’armée américaine depuis le premier jour de l’offensive du Têt au Viêtnam en 1968.

Il est légitime d’affirmer que ce prix élevé a été payé en vain. Les États-Unis ont retiré leurs forces et la force multinationale a été dissoute quelques mois plus tard, tandis que la guerre civile libanaise s’est poursuivie jusqu’en 1990 et que l’occupation israélienne de certaines parties du Liban s’est poursuivie pendant plus de dix ans.

La responsabilité de l’attentat a été revendiquée au nom du Jihad islamique, dont on a compris plus tard qu’il s’agissait d’éléments chiites libanais qui allaient se regrouper pour former ce que l’on appelle aujourd’hui le Hezbollah.

Le Hezbollah doit son origine et sa montée en puissance dans les années 1980 à son opposition farouche à l’invasion et à l’occupation israéliennes. Il n’a jamais cherché à se battre avec les États-Unis sur la base d’une idéologie transnationale semblable à celle d’Al-Qaïda. Il s’est concentré sur ses objectifs de conquête et de maintien du pouvoir politique au Liban, de défense des intérêts des chiites libanais et de défense du Liban dans son ensemble contre les déprédations israéliennes.

Les opérations menées par le Hezbollah à l’étranger découlent de ces objectifs. Elles comprennent deux attentats à la bombe contre des intérêts israéliens ou juifs à Buenos Aires, chacun en représailles à des attaques israéliennes au Moyen-Orient, et le soutien du Hezbollah à son allié local, le régime d’Assad en Syrie. La seule attaque contre des intérêts américains qui peut sembler éloignée des combats au Liban et dans laquelle le Hezbollah a pu jouer un rôle indirect (en soutenant des éléments saoudiens partageant les mêmes idées) – l’attentat à la bombe contre les tours Khobar en Arabie saoudite en 1996 – était une fois de plus une question de présence militaire américaine mal acceptée sur un sol étranger.

L’attentat à la bombe contre la caserne des Marines en 1983 était le résultat direct du fait que les États-Unis se sont laissés entraîner dans l’une des guerres offensives d’Israël. Sans cette implication, l’attentat n’aurait jamais eu lieu.

Le prix à payer pour que les États-Unis se laissent entraîner dans les guerres actuelles d’Israël ne sera pas nécessairement le même au Liban. Les coups portés par l’offensive israélienne aux capacités du Hezbollah au Liban n’ont probablement pas diminué sa capacité à mener des opérations asymétriques ailleurs. Sa volonté d’utiliser cette capacité contre les intérêts américains s’accroît dans la mesure où les États-Unis se laissent associer aux offensives meurtrières d’Israël et dans la mesure où ces offensives rendent certaines parties du Liban semblables aux effroyables décombres de Gaza.

*

Paul R. Pillar est chercheur principal non résident au Centre d’études de sécurité de l’université de Georgetown et chercheur non résident au Quincy Institute for Responsible Statecraft. Il est également membre associé du Geneva Center for Security Policy.

Les opinions exprimées par les auteurs sur Responsible Statecraft ne reflètent pas nécessairement celles du Quincy Institute ou de ses associés.

Source : Responsible Statecraft, Paul R. Pillar, 21-10-2024

Traduit par les lecteurs du site Les-Crises

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Commentaire recommandé

La Mola // 12.11.2024 à 14h10

m’enfin, parler « d’extermination » ou de « génocide » quand on l’a sous les yeux est devenu à peu près interdit dans nos « démocraties » oxydentales
« Et ce ne ce,sont pas les claviers des « modérateurs » en ligne sur les médias qui y peuvent quelque chose » : ben si, hélas…. ils parviennent à bloquer toute liberté d’expression qui ne soit pas « dans la ligne » officielle.
exemple le plus récent à Amsterdam où les déclarations initiales du chef de la police locale ont été « obscurcies » au profit de l’inversion des responsabilités des violences déchaînées. (nul doute que les sinistrés valenciens auront apprécié, par exemple, que la minute de silence qui leur était consacrée en début de match ait été huée par les « gentils » visiteurs !)

3 réactions et commentaires

  • Jacques-marie Bourget // 12.11.2024 à 08h17

    241 citoyens américains et quelques libanaises, elles aussi prisent dans l’explosion du BLT. Mais ces morts surent rester discrètes…

  • Pazuzu // 12.11.2024 à 12h25

    une version locale au Liban est qu’il s’agissait d’une vengeance après que les américains en voulant tuer un chef de milice à Beyrouth avait éventré le bâtiment adjacent. Un immeuble d’habitations. Causant une hécatombe parmi les riverains.
    A l’époque France et Etats-Unis voulaient déjà prendre le contrôle du Liban de manière pro-israélienne, eb utilisant le clan Gémayel.

    Puisque Al Qaeda est mentionné en passant , on rappellera qu’il est né sur des restes de l’armée iraquienne dans la prison d’Abou Graib à Bagdad sous les yeux des américains. Le groupe a servi contre la Syrie, jusqu’à ce que Al Baghdadi s’autonomise et que l’intervention russe au côté de la Syrie oblige les américains à eux aussi frapper sur les djihadistes pour ne pas donner l’impression trop voyante de les soutenir. Sous Trump celà donna les batailles de Mossoul et de Rakka, avec mot d’ordre « extermination ». Les bidasses américains et kurdes ayant consigne de tuer tout le monde.
    Aucun dirigeant euro-américain ni israelien ne mesure le niveau de haine vengeresse que les boucheries occidentales et israeliennes induisent sur le long terme. Et ce ne ce,sont pas les claviers des « modérateurs » en ligne sur les médias qui y peuvent quelque chose. Celà dort et couve deci delà hors Oxydent hors de portée.

    • La Mola // 12.11.2024 à 14h10

      m’enfin, parler « d’extermination » ou de « génocide » quand on l’a sous les yeux est devenu à peu près interdit dans nos « démocraties » oxydentales
      « Et ce ne ce,sont pas les claviers des « modérateurs » en ligne sur les médias qui y peuvent quelque chose » : ben si, hélas…. ils parviennent à bloquer toute liberté d’expression qui ne soit pas « dans la ligne » officielle.
      exemple le plus récent à Amsterdam où les déclarations initiales du chef de la police locale ont été « obscurcies » au profit de l’inversion des responsabilités des violences déchaînées. (nul doute que les sinistrés valenciens auront apprécié, par exemple, que la minute de silence qui leur était consacrée en début de match ait été huée par les « gentils » visiteurs !)

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