Source : The Guardian, Denis Campbell, 15-03-2020
Exclusif : Un document de la santé publique anglaise consulté par le Guardian indique que quatre personnes sur cinq « devraient » contracter le virus
L’épidémie de coronavirus au Royaume-Uni durera jusqu’au printemps prochain et pourrait entraîner l’hospitalisation de 7,9 millions de personnes, révèle un document secret de Public Health England (PHE) [agence exécutive du département de santé – NdT] destiné aux hauts fonctionnaires du NHS.Dans ce document, dont le Guardian a eu connaissance, c’est la première fois que les responsables de la santé qui luttent contre le virus admettent qu’ils s’attendent à ce qu’il circule pendant encore 12 mois et qu’il entraîne une énorme pression supplémentaire sur un NHS déjà surchargé.
Il explique également que les responsables de la santé sont prêts à accepter que près de 80 % des Britanniques soient infectés par le coronavirus au cours de cette période.
Le professeur Chris Whitty, conseiller médical en chef du gouvernement, a précédemment présenté ce chiffre comme le pire des scénarios et a suggéré que le chiffre réel s’avérerait inférieur à cela. Cependant, le mémo indique clairement que quatre personnes sur cinq « devraient » contracter le virus.
Le document précise que : « Jusqu’à 80 % de la population devrait être infectée par le Covid-19 dans les 12 prochains mois, et que jusqu’à 15 % (7,9 millions de personnes) pourraient avoir besoin d’une hospitalisation ».
Le mémo fait état des dernières conclusions officielles quant à la gravité de l’infection, qui pourrait affecter à la fois la santé du public et celle du personnel des services essentiels tels que le NHS, la police, les pompiers et les transports.
Il a été rédigé ces derniers jours par l’équipe de préparation et de réponse aux urgences de PHE et approuvé comme étant pertinent par le Dr Susan Hopkins, responsable de la PHE en charge de l’épidémie. Il a été communiqué aux directeurs d’hôpitaux et aux médecins du NHS en Angleterre.
Selon le Directeur général de l’OMS : L’Europe est désormais au centre de la pandémie de coronavirus
« Si le public entend que cela pourrait durer 12 mois, cela conduira les gens à être très contrariés et assez inquiets », a déclaré Paul Hunter, professeur de médecine à l’Université d’East Anglia.
« Une année est tout à fait plausible. Mais ce chiffre n’est ni bien perçu ni bien compris », a ajouté M. Hunter, expert en épidémiologie.
« Je pense que cela va baisser en été, vers la fin juin, et revenir en novembre, comme c’est le cas pour la grippe saisonnière habituelle. Je pense que le coronavirus sera présent de façon définitive, mais qu’il deviendra moins grave avec le temps, à mesure que l’immunité s’accroîtra », a-t-il ajouté.
Admettre que le virus va continuer de causer des problèmes pendant une année supplémentaire semble saper les espoirs que l’arrivée de températures plus chaudes cet été le tuerait.
Le document révèle également qu’environ 500 000 des 5 millions de personnes jugées vitales parce qu’elles travaillent « dans les services essentiels et les infrastructures critiques » seront en arrêt maladie à un moment donné pendant le pic de l’épidémie, qui durera un mois. Parmi ces 5 millions de personnes, on compte 1 million de membres du personnel du NHS et 1,5 million de personnes travaillant dans le secteur des soins sociaux.
Toutefois, le mémo soulève des questions sur la manière dont la Grande-Bretagne continuerait de fonctionner normalement, ce qui constitue un avertissement : « On estime qu’au moins 10 % de la population britannique toussera à un moment donné pendant les mois d’activité maximale de Covid-19 ». Selon les conseils de santé actualisés que Boris Johnson a dévoilés jeudi dernier, toute personne manifestant une toux devrait s’isoler pendant au moins sept jours.
Le document indique également que :
- Le service de santé ne peut pas faire face au nombre important de personnes symptomatiques qui doivent être testées, car les laboratoires sont « soumis à une forte pression de la demande ».
- Désormais, seuls les malades dans un état très grave, déjà hospitalisés, et les personnes qui se trouvent dans des maisons de soins et des prisons où le coronavirus a été détecté, seront testés.
- Les services de dépistage sont soumis à une telle pression que même le personnel du NHS ne bénéficiera pas d’un prélèvement, malgré son rôle clé et le risque qu’il ne transmette le virus aux patients.
Une personnalité du NHS impliquée dans les préparatifs face à la « vague » croissante de patients dont la vie est mise en danger par le Covid-19, a déclaré qu’un taux d’infection de 80 % pourrait entraîner la mort de plus d’un demi-million de personnes.
Si le taux de mortalité de 1%, que de nombreux experts utilisent comme hypothèse de travail s’avère être exact, cela signifierait 531 100 décès. Mais si la thèse que Whitty soutient avec insistance et qui table sur un taux plus proche de 0,6 % s’avère exacte, alors cela impliquerait la mort de 318 660 personnes.
Les experts qui conseillent les gouvernements dans le monde entier quant à la façon dont les épidémies se développent et finissent par décliner, disent qu’il y aura une augmentation rapide des cas jusqu’à un pic – puis une diminution. Whitty, qui a vu la modélisation effectuée par des scientifiques britanniques et internationaux, affirme que le nombre de cas augmentera rapidement au cours des 10 à 14 prochaines semaines.
Cela signifie qu’il y aura un pic entre fin mai et mi-juin, lorsque le NHS sera soumis à une forte pression. La stratégie de tous les pays consiste à retarder ce pic et à l’étaler sur une période plus longue, afin que les services de santé soient mieux à même d’y faire face. Il est également possible que de nouveaux traitements soient disponibles d’ici là.
Après le pic, le nombre de cas et de décès devrait baisser pendant 10 semaines ou plus, jusqu’à ce qu’il atteigne un niveau assez bas, qui pourrait ne pas être nul. Pendant les mois d’été en particulier, le nombre de cas devrait diminuer car les gens passent plus de temps à l’extérieur et sont moins susceptibles d’être confinés dans les petites pièces d’une maison ou d’un bureau avec des personnes infectées.
On craint toujours que le virus ne réapparaisse en automne ou en hiver, ce qui signifie qu’il faudra planifier à long terme. Tant qu’un vaccin n’aura pas été mis au point, peut-être d’ici 18 mois, les responsables de la santé n’ont aucune assurance de pouvoir protéger les gens contre la maladie.
Source : The Guardian, Denis Campbell, 15-03-2020
Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.
Nous vous proposons cet article afin d'élargir votre champ de réflexion. Cela ne signifie pas forcément que nous approuvions la vision développée ici. Dans tous les cas, notre responsabilité s'arrête aux propos que nous reportons ici. [Lire plus]Nous ne sommes nullement engagés par les propos que l'auteur aurait pu tenir par ailleurs - et encore moins par ceux qu'il pourrait tenir dans le futur. Merci cependant de nous signaler par le formulaire de contact toute information concernant l'auteur qui pourrait nuire à sa réputation.
2 réactions et commentaires
Des suppositions, des suppositions, rien d’autre. Bref ! à la hauteur du Guardian.
+0
AlerterDéjà pendant la seconde guerre mondiale, on se tournait vers l’Angleterre pour avoir des nouvelles ayant au moins un vague rapport avec la réalité. Bienvenue dans le monde réel.
+0
AlerterLes commentaires sont fermés.