Source : Insurge Intelligence, Nafeez Ahmed, 16-06-2015
Les élites utilisent la Henry Jackson Society pour vendre la surveillance, la guerre, la suprématie blanche, les banques et la misogynie
Une cinquième colonne extrémiste violente opère au cœur du pouvoir en Grande-Bretagne, et elle s’oppose à tout ce qui nous est cher dans les démocraties occidentales : les libertés civiles, l’égalité, la paix, la diplomatie et l’État de droit.
On ne le croirait pas à première vue. En fait, vous pourriez vous faire avoir par leurs porte-parole à l’air inoffensif, qui s’élèvent contre la menace des extrémistes musulmans, défendent les droits des femmes musulmanes menacées, défendent le principe de la liberté d’expression – régulièrement courtisés par la télévision et la presse nationales en tant qu’experts avertis sur les questions de politique mondiale.
Mais en regardant sous la surface, une image totalement différente apparaît : un réseau d’élites transatlantiques égocentriques qui tentent de déformer le discours public sur des questions clés qui constituent une menace non pas pour l’intérêt public, mais pour leurs propres intérêts.
Une organisation clé au centre de ce réseau est la Henry Jackson Society (HJS), un think-tank britannique influent fondé il y a dix ans, apparemment pour promouvoir de nobles idéaux comme la liberté, les droits de l’homme et la démocratie. Mais son équipe consacre la majeure partie de son énergie à promouvoir le contraire.
Plus récemment, la HJS s’est tournée vers la diabolisation des partisans d’Edward Snowden et des défenseurs de la vie privée en tant que complices d’Al-Qaïda et de l’« État islamique » (EI) – comme le fait également le Sunday Times de Rupert Murdoch, avec son histoire bidon affirmant que les « révélations de Snowden » avaient permis à la Russie et à la Chine d’identifier des agents actifs du MI6.
Les journalistes qui ont examiné les dossiers Snowden disent qu’il n’y avait rien dans ces dossiers qui permettrait d’identifier les agents du MI6.
L’ancien haut fonctionnaire de la CIA Robert Steele, dont les livres ont été plébiscités par le passé et qui était alors président de la commission spéciale sur le renseignement, a déclaré :
« Je peux affirmer catégoriquement qu’il ne pouvait y avoir de noms ni d’agents ni d’officiers de renseignement dans les documents de Snowden. Le système ne fonctionne tout simplement pas de cette façon. »
Mais le délai de deux semaines entre la publication du rapport de la HJS et la publication de l’article phare du Sunday Times n’est probablement pas une coïncidence. Comme le Times, le dernier rapport de la HJS accablant Snowden s’appuie presque entièrement sur des sources de renseignement anonymes ainsi que sur des affirmations non fondées des responsables de la surveillance de masse, pour affirmer que les révélations de Snowden ont « paralysé » la « guerre contre le terrorisme ».
Le rapport de la HJS ignore également des faits contradictoires, comme celui documenté par la New America Foundation, selon lequel les programmes de surveillance par analyse de masse de la NSA « n’ont eu aucun impact perceptible » sur la prévention des actes terroristes.
La possibilité que le rapport de la HJS et les affirmations du Times s’inscrivent dans une campagne de diffamation plus large visant à justifier la surveillance de masse, orchestrée par des éléments de la communauté du renseignement, est indirectement soutenue par un nouveau rapport surprenant lancé jeudi dernier à l’Université de Bath.
L’article de la célèbre organisation d’intérêt public, Spinwatch, jette un nouvel éclairage sur les origines de la société, à une exception près :
« … tous les journalistes parmi les signataires étaient associés au Times : y compris le rédacteur en chef adjoint Gerard Baker, et les chroniqueurs Oliver Kamm et Stephen Pollard. Gove était également un journaliste attitré du Times jusqu’à son élection au parlement en 2005, et a continué à écrire pour le journal. Un autre signataire, l’économiste de l’Institut Hudson, Irwin Stelzer, était chroniqueur pour le Sunday Times et proche conseiller de Rupert Murdoch. »
Selon Spinwatch, la HJS est également directement liée à de hauts responsables de la sécurité américaine et britannique complices de l’expansion du dispositif de surveillance.
Pour la première fois, l’article de Spinwatch révèle clairement comment la HJS utilise son accès sans précédent aux Chambres du Parlement avec le soutien de réseaux néoconservateurs et d’extrême droite aux États-Unis, ainsi que de riches élites au Royaume-Uni, pour protéger le pouvoir des entreprises, faire progresser l’État policier dans le pays et légitimer l’utilisation de l’armée pour le pétrole à l’étranger.
Les partisans de Bush trouvent un nouveau foyer
Malgré des débuts modestes à l’Université de Cambridge, le patronage néoconservateur de la Société était évident dans la liste des personnalités américaines qui ont signé la Déclaration de principes de la HJS. Nombre de ces signataires, comme le montre le rapport Spinwatch, « étaient associés à la campagne pour la guerre en Irak, notamment par le biais d’organisations de lobbying telles que le Project for a New American Century [Projet pour le Nouveau Siècle Américain, NdT] et le Committee for the Liberation of Iraq [Comité pour la libération de l’Irak , NdT] ».
Ils comprennent des faucons pro-guerre comme :
Richard Perle, ancien secrétaire adjoint à la défense des États-Unis, et président du Conseil de la politique de défense du Pentagone de 2001 à 2003, qui a dû démissionner après avoir été critiqué pour ses fonctions d’administrateur dans des sociétés ayant « des intérêts commerciaux importants liés au ministère de la défense des États-Unis » ;
William Kristol, rédacteur en chef fondateur du Weekly Standard de Rupert Murdoch, et cofondateur du célèbre think-tank pro-Bush, le Project for the New American Century , ainsi que membre du Comité pour la libération de l’Irak, tout aussi belliciste ;
Robert Kagan, cofondateur du PNAC ;
Clifford May, président du nouveau think-tank néoconservateur, la Fondation pour la défense des démocraties, et ancien directeur des communications du Comité national républicain ;
Bruce P. Jackson, président d’un autre groupe néoconservateur, le Project for Transitional Democracies, et précédemment officier de renseignement militaire sous la direction de Richard Perle au bureau du secrétaire à la défense (1993 à 2002) ;
Le général Jack Sheehan, ancien commandant suprême des forces alliées de l’OTAN et commandant en chef du commandement atlantique américain (1994-1997), qui a servi simultanément sous Perle au sein du Conseil de la politique de défense et en tant que vice-président de l’entreprise américaine de défense Bechtel, « qui a reçu le premier grand contrat pour la reconstruction de l’Irak » ;
James Woolsey, ancien directeur de la CIA, autre membre du conseil de la politique de défense de Perle en 2003, alors qu’il était également « un des directeurs de Paladin Capital Group, une société de capital-risque qui investit dans la sécurité intérieure, ainsi que vice-président de l’entreprise de défense Booz Allen Hamilton » – qui avait bien sûr employé Edward Snowden pour le compte de l’Agence de sécurité nationale (NSA) ;
Irwin Stelzer, économiste à l’Institut Hudson, alors bras droit de Rupert Murdoch, et maintenant chroniqueur économique américain au Sunday Times.
Ces noms parlent d’eux-mêmes. Ils montrent que la HJS, au départ, était destinée par certains de ses principaux fondateurs à légitimer un changement de régime violent au Moyen-Orient au nom de la diffusion de la « démocratie », ce qui ne peut être mis en doute.
Le bunker des conservateurs
Sous ses prétentions multipartites, la HJS a également bénéficié, lors de son lancement, d’un soutien important de la part des politiciens conservateurs et travaillistes, bien que ses penchants de droite ne soient pas un secret.
Rédigé par le sociologue universitaire David Miller, les chercheurs doctorants Tom Griffin et Hilary Aked de l’Université de Bath, et la spécialiste en sciences sociales Sarah Marusek, le rapport Spinwatch énumère en détail les antécédents et les liens des principaux signataires britanniques de la HJS :
Quatre députés conservateurs, à savoir Michael Gove, Ed Vaizey, David Willetts et Michael Ancram – les trois premiers deviendront bien sûr des ministres de premier plan dans le gouvernement de David Cameron ; Robert Halfon, directeur des Amis conservateurs d’Israël, et Nick Boles, directeur de Policy Exchange, le think-tank pro-Tory [Philosophie politique traditionaliste et conservatrice anglaise, NdT] présidé par Gove ; ainsi que les députés travaillistes Denis MacShane, Gisela Stuart et Jackie Lawrence.
Les autres membres britanniques influents qui se sont inscrits à la fondation HJS sont le professeur Vernon Bogdanor, ancien tuteur de David Cameron ; Paul Cornish de Chatham House ; Paul Beaver, consultant du ministère de la défense et ancien rédacteur en chef de Jane’s Defence Weekly ; Lord Powell, conseiller personnel des premiers ministres Margaret Thatcher et John Major ; le général de division John Drewienkiewicz, conseiller militaire auprès du haut représentant pour la Bosnie en 1998 ; Jamie Shea, secrétaire général adjoint délégué pour les relations extérieures de l’OTAN ; l’ancien chef du MI6, Sir Richard Dearlove, qui a été profondément impliqué dans la fabrication d’allégations sur les armes de destruction massive à l’approche de la guerre d’Irak de 2003 ; le colonel Tim Collins, ancien officier de l’armée britannique qui dirige aujourd’hui New Century, une entreprise de services de sécurité basée sur le renseignement ; et Mark Etherington, gouverneur civil de la province irakienne de Wâsit (2003-2004).
De la même manière que la « relation spéciale » entre les États-Unis et la Grande-Bretagne se traduit essentiellement par le fait que la Grande-Bretagne agit de facto comme le caniche diplomatique de l’Amérique, la HJS se considère depuis longtemps comme un avant-poste pour diffuser l’idéologie néoconservatrice américaine dans l’establishment politique, les médias et la société civile britanniques.
En août 2006, lors d’une conférence organisée par l’Institut Hudson à Washington DC, Douglas Murray, qui rejoindra la HJS en tant que directeur en 2011, a proclamé :
« Des mouvements comme la Henry Jackson Society à Londres et le groupe Euston se sont explicitement liés et se sont tournés vers la philosophie audacieuse et inspirante qui a relancé le conservatisme américain au cours du dernier demi-siècle. Nous nous tournons vers votre exemple et nous aimons ce que nous voyons. »
N’oublions pas que la guerre d’Irak durait depuis trois ans, alors qu’aucune ADM n’avait été trouvée en Irak et que le pays s’effondrait dans une guerre civile. Pendant ce temps, les États-Unis et le Royaume-Uni accumulaient d’énormes dettes, notamment en raison des dépenses de guerre, alors que des entreprises de défense américaines et britanniques, qui n’avaient pas de comptes à rendre, récoltaient les bénéfices de leur incapacité à reconstruire le pays dévasté.
À la fin de cette année-là, écrivent Miller et consorts, la HJS « était devenue la principale expression institutionnelle du néoconservatisme britannique, une création originale d’intellectuels britanniques qui partageaient les préoccupations des néoconservateurs américains d’origine face à l’émergence d’un mouvement populaire anti-guerre en Grande-Bretagne ».
Pour le reste de son article, l’équipe de Spinwatch fournit de nombreuses preuves documentaires prouvant que les activités principales de la HJS ont été essentiellement destinées à rendre les idéaux des néocons aussi acceptables et raisonnables que possible.
Cela signifie qu’ils ont encouragé une peur excessive et xénophobe des musulmans, diabolisé l’activisme anti-guerre et la dissidence politique sur les campus universitaires britanniques, tout en essayant de ranimer la haine populaire à l’égard des banques et du secteur financier au lendemain du krach financier de 2008.
Banaliser l’extrême-droite
En mai 2009, les fondateurs de la HJS, Alan Mendoza et Barak M. Seener, ont participé à une conférence à Washington DC intitulée « Libel Lawfare : Silencing Criticism of Radical Islam » [Lutte contre la calomnie : faire taire les critiques de l’islam radical, NdT], dont le thème bizarre était que la critique de l’islam était réprimée par des procès fondés sur les lois relatives aux discours de haine.
Outre le problème apparemment mineur de l’absence de preuves concrètes, il y avait la question un peu plus pertinente du principal sponsor de la conférence, le Forum du Moyen-Orient [Le Forum du Moyen-Orient, fondé en 1994 par Daniel Pipes, est un lobby pro-israélien basé à Philadelphie aux États-Unis, NdT].
Comme le rapportent le professeur Miller et son équipe, le directeur fondateur du Forum sur le Moyen-Orient est Daniel Pipes, qui a « bénéficié d’une large notoriété publique, notamment par des nominations présidentielles », malgré la promotion d’idées racistes et xénophobes, comme « l’affirmation erronée que le président Obama était un ancien musulman et qu’une école publique laïque de New York enseignant la langue arabe était une « Madrasa » ».
La perspective raciste de Pipes était qu’être ethniquement arabe implique la promotion de la terreur. Sa principale objection à l’école concernait « les problèmes plus fondamentaux implicites dans une école de langue arabe : la tendance au contenu islamiste et arabisant et au prosélytisme ».
Dans une illustration exemplaire de la nature de la campagne de Pipes contre l’extrémisme islamiste, il a un jour mis en garde sur le fait que :
« Les sociétés d’Europe occidentale ne sont pas préparées à l’immigration massive de personnes à la peau brune cuisinant des aliments étranges et ne respectant pas exactement les normes d’hygiène germaniques. »
En mars 2005, après que Pipes a été invité à prendre la parole à l’université de Toronto, une lettre adressée à la direction de l’université par des professeurs et des diplômés a fait état de son « long passé de discours xénophobes, racistes et sexistes qui remonte à 1990 ».
Mais la HJS a eu la curieuse habitude de s’aligner sur de tels groupes.
En mai 2009, rapporte Spinwatch, la société Henry Jackson a accueilli un exposé de Siv Jensen, leader du Parti du progrès norvégien et actuellement ministre des finances sous le gouvernement de coalition. Le Parti du Progrès a été largement reconnu comme un parti qui se plie aux sentiments xénophobes anti-musulmans.
De 1999 à 2006, le terroriste d’extrême droite Anders Breivik, qui a été condamné pour le massacre de 77 personnes, a été un membre actif du Parti du Progrès, qui, selon certains, a joué un rôle clé dans sa radicalisation avec sa paranoïa de plus en plus hystérique sur l’immigration, entraînant une « islamisation furtive » de la société norvégienne.
Le lien n’est pas sans importance. En 2009, 16 % des personnes ayant exprimé leur sympathie pour le Parti du progrès ont déclaré avoir « des sympathies d’extrême droite ».
Les sympathies apparentes de la HJS pour la même idéologie que celle qui a motivé Breivik se sont concrétisées lorsque Marko Atilla Hoare, membre fondateur et directeur de longue date de la HJS, a été sommairement démis de ses fonctions par Alan Mendoza après avoir publié un article critiquant l’idéologie de Breivik sur le site web de la HJS. Démontrant la profonde cohérence de la HJS sur la protection de la liberté d’expression, Mendoza a fait en sorte que l’article de Hoare soit entièrement retiré.
L’un des bailleurs de fonds de la HJS en 2011 était l’Abstraction Fund, dont la présidente et la trésorière est Nina Rosenwald. Comme Max Blumenthal l’a exposé dans The Nation, Rosenwald a financé un enchevêtrement d’organisations qui alimentent « une alliance qui émerge rapidement entre le courant pro-Israël et la frange islamophobe ».
En plus de la HJS, Rosenwald a également financé des réseaux néofascistes, incluant Brigitte Gabriel, qui a déclaré en 2006 que les musulmans « n’ont pas d’âme – ils sont prêts à tuer et à détruire » ; l’ancien fonctionnaire du Pentagone Frank Gaffney, du Centre néoconseil pour la politique de sécurité (CSP), qui a publié des pamphlets conspirateurs avertissant que les musulmans américains sont engagés dans un « djihad furtif » pour instaurer la « loi de la charia » dans le pays ; et le Gatestone Institute, qui publie des articles racistes appelant à la remigration des Marocains de souche d’Europe, ainsi que des articles du blogueur qui a été l’une des principales sources d’inspiration haineuse de Breivik.
Comme je l’ai déjà signalé, Gatestone – dont Rosenwald est également le président fondateur – compte parmi ses membres des sommités comme Lord Daniel Finkelstein, ancien directeur du think-tank pro-Tory Policy Exchange, qui est étroitement lié à la HJS, et conseiller de David Cameron, ainsi que chroniqueur et ancien rédacteur en chef du Times.
Et Gatestone est également directement lié à la HJS. Douglas Murray, directeur associé de la HJS, a simultanément siégé au conseil d’administration de Gatestone jusqu’à la fin de 2014, et y est aujourd’hui agrégé supérieur de recherche.
Le « contre-djihad » comme couverture de la suprématie blanche
Le rapport de Spinwatch met en évidence un certain nombre de déclarations révélatrices faites par les directeurs de la HJS qui démontrent la xénophobie généralisée qui semble motiver leur travail contre-extrémiste.
« Nous sommes arrivés il y a longtemps au point où la seule chose que les Britanniques blancs peuvent faire est de garder le silence sur le changement dans leur pays. »
C’est ce qu’a déploré Murray dans un opuscule acrimonieux, se plaignant que Londres était devenue « une terre étrangère », parce que, littéralement, « il n’y a pas assez de blancs dans les quartiers ».
Et il a continué : « Ignorés pendant une génération, on attend d’eux qu’ils continuent, en silence mais avec joie, à s’autodétruire, à accepter les coups et continuent malgré tout à respecter leur pays ».
Murray a fait de nombreuses déclarations similaires au fil des ans, principalement axées sur la grave menace que représentent les immigrants musulmans pour l’Europe.
Le changement de langage est ici crucial. Les références ouvertes à la façon dont les « blancs » sont assiégés par les immigrants et les minorités ethniques à la peau noire et brune ne sont plus acceptables dans une société policée et repoussent les limites des lois contre le racisme et l’incitation.
Cela semble expliquer la tendance croissante à reconfigurer exactement les mêmes attitudes discriminatoires, en utilisant un langage qui se concentre sur de nouvelles catégories apparemment acceptables d’« étrangers », à savoir la religion et la culture.
Dans une illustration troublante de ce changement à partir de mars 2013, le patron de Murray, Alan Mendoza, directeur exécutif de la HJS, a prononcé un discours lors d’une conférence de l’American Israel Public Affairs Committee (AIPAC) à Washington DC, où il s’est plaint, selon le Washington Jewish Week :
« L’immigration est également une raison de la montée des sentiments anti-Israël [en Europe]. En 1998, 3,2 % des Espagnols étaient nés à l’étranger. En 2007, ce pourcentage était passé à 13,4 %. »
Notez que la principale préoccupation de Mendoza est simplement « l’étranger », qui est automatiquement assimilé à l’hostilité envers Israël. Mais il poursuit en précisant sa préoccupation particulière à l’égard des Musulmans :
« Dans des villes comme Londres, Paris et Copenhague, 10 % des habitants sont musulmans. La population musulmane européenne a doublé au cours des 30 dernières années et devrait encore doubler d’ici 2040.
Malgré tous les avantages que l’immigration a apportés, il a été difficile pour les pays européens d’absorber les immigrés dans leur société étant donné leur incapacité à intégrer les nouveaux arrivants. »
Ici, Mendoza mêle subtilement le langage de la peur des hordes musulmanes, qui modifie en permanence le paysage européen, à des préoccupations raciales plus générales sur la manière d’« absorber les immigrants » et d’« intégrer les nouveaux arrivants », dont aucun n’est identifié comme musulman.
Il revient ensuite à diaboliser plus crûment les Musulmans d’Europe, dont « les voix sont entendues bien au-dessus de la moyenne des Européens, qui ont tendance à ne pas s’exprimer… les immigrants musulmans le font en sachant parfaitement qu’ils ne seraient pas autorisés à s’exprimer comme cela dans de nombreux pays du Moyen-Orient » – ce qui est ironique étant donné que la seule chose dont les populations musulmanes sont autorisées à parler dans les dictatures du Moyen-Orient est la question de la Palestine.
De même, William Shawcross, qui a été administrateur de la HJS de 2011 jusqu’à sa démission en 2012 pour prendre en charge la Charity Commission britannique, a déjà écrit sur la façon dont l’Europe est « menacée par une vaste cinquième colonne – qu’il y a des milliers de personnes nées en Europe, en Grande-Bretagne, en France, en Hollande, au Danemark, partout – qui souhaitent nous détruire ». Ces gens sont des « islamistes-fascistes qui sont unis dans la haine à notre encontre ».
Sous le mandat de Shawcross, plus d’un quart des enquêtes statutaires de la Charity Commission qui restent ouvertes depuis avril 2012 ont visé des organisations musulmanes.
Sauver les femmes en accueillant des misogynes
Mais comme l’observent le professeur Miller et son équipe, il existe une réelle tension entre les valeurs ostensiblement libérales de la HJS et son farouche programme de droite.
L’année dernière, par exemple, la HJS a projeté le film « Honour Diaries », produit par le célèbre groupe anti-musulman américain, le Clarion Project. Puis, en janvier 2015, la HJS a publié un article sur la violence faite aux femmes fondé sur « l’honneur » au Royaume-Uni, « un problème qui touche principalement les communautés minoritaires d’Asie du Sud ».
S’il ne fait aucun doute que la violence fondée sur l’honneur est un problème réel qui mérite d’être pris au sérieux et traité, le problème est l’utilisation par la HJS de cette question pour stigmatiser les musulmans.
« Avant cela, la HJS n’avait jamais montré d’intérêt substantiel pour les droits des femmes au Royaume-Uni ; et n’avait jamais, par exemple, mené de recherches auparavant sur le problème beaucoup plus répandu de la violence domestique au sens large », observent les auteurs de Spinwatch.
Plus accablant encore, le même mois, la HJS a accueilli une conférence de Bobby Jindal, le célèbre gouverneur républicain de Louisiane connu pour sa promotion d’une législation misogyne et homophobe sur la religion et l’avortement.
En décembre 2014, Spinwatch rapporte qu’il « s’est retrouvé mêlé à une série d’événements en raison de sa participation à un rassemblement de prière financé par l’American Family Association, ultra-conservatrice, qui est accusée de lier des catastrophes naturelles comme l’ouragan Katrina à l’acceptation croissante du mariage homosexuel et de l’avortement ».
Lors de son événement HJS, Jindal a affirmé que les immigrants musulmans cherchaient à « coloniser les pays occidentaux », et a répété des affirmations discréditées sur les zones musulmanes « interdites » en Grande-Bretagne. Par la suite, « Jindal a maintenu ses commentaires et la HJS n’a émis aucune clarification ni critique ».
Le « contre-djihad » comme couverture pour diaboliser la dissidence politique
L’abus du « contre-extrémisme » pour légitimer la suprématie blanche xénophobe va de pair avec la diabolisation de ceux qui pourraient contester cette approche.
Le rapport Spinwatch rassemble des preuves publiques alarmantes sur la façon dont le projet HJS, « Droits des étudiants », prétend surveiller et s’opposer à l’extrémisme sur les campus universitaires, mais en réalité, il utilise simplement le spectre de l’« extrémisme » pour salir l’activisme étudiant contre la criminalité d’État, tout en essayant de protéger les mouvements de suprématie blanche des critiques légitimes.
Un exemple révélateur de cette situation, mis en évidence par Spinwatch, est l’opposition de la Student Rights à une politique de « pas de plateforme pour les fascistes » adoptée par le syndicat des étudiants de la London School of Economics (LSE).
À l’époque, le projet Student Rights de la HJS « soutenait que le British National Party, parti d’extrême droite, était « un parti politique légitime qui a remporté deux sièges aux élections européennes, qui compte environ 60 conseillers régionaux au Royaume-Uni et pour lequel un peu moins d’un million de personnes ont voté dans tout le pays », et qu’il devrait donc être autorisé à prendre la parole sur les campus ».
Tout en défendant les fascistes, les Student Rights se disent encore préoccupés par le fait que certaines universités permettent à des « orateurs islamistes » extrémistes de s’exprimer sur le campus. Même cela a souvent été une couverture pour cibler la dissidence. Dans un cas, les Student Rights « ont suggéré qu’une université annule une semaine entière d’événements critiques de la « guerre contre le terrorisme » parce qu’elle considère que cela « alimente les griefs contre l’Occident », bien qu’elle n’ait jamais suggéré qu’une loi quelconque serait violée ».
Les Student Rights de la HJS ont également attaqué les universitaires qui « ont critiqué – ou préconisé un boycott d’Israël » en les qualifiant d’« extrémistes ». Ce type de « contre-extrémisme » malavisé a souvent suscité une attention médiatique exagérée, pour être ensuite démenti.
Par exemple, le groupe a une fois produit un briefing condamnant deux membres du personnel de la LSE [London School of Economics, NdT] qui étaient membres du British Committee for the Universities of Palestine (BRICUP), affirmant qu’un événement du BRICUP impliquait des railleries antisémites. La BBC a même rapporté ces affirmations, avant d’être obligée de « publier une correction » lorsqu’elles se sont avérées fausses.
Selon Raheem Kassam, membre de la HJS et directeur des Student Rights à l’époque, les Student Rights assimilaient « l’extrémisme politique croissant » à l’activisme de solidarité avec la Palestine. Kassam est ensuite devenu rédacteur en chef de l’organisation tout aussi xénophobe Breitbart UK, dirigée par le négationniste du climat professionnel James Delingpole, avant de devenir le directeur de campagne de Nigel Farage à l’UKIP.
Comme le professeur Miller et son équipe le concluent dans leur rapport :
« En plus de faire pression sur les universités pour qu’elles imposent aux étudiants musulmans des mesures restrictives qui, en fait, institutionnaliseraient l’islamophobie, son travail [sur les droits des étudiants] a également cherché à réduire l’espace pour toute dissidence politique radicale sur le campus. »
La mentalité stalinienne de la HJS sur la liberté d’expression et le débat académique était un précurseur étrangement familier de ce qui est maintenant la politique officielle du gouvernement conservateur dans le cadre du programme « Prevent » remanié.
Le nouveau projet de loi sur la sécurité antiterroriste, et les directives qui y sont associées, visent à rendre obligatoire pour tous les travaux du secteur public dans les universités, les écoles, les crèches, les hôpitaux, les autorités locales, etc. de surveiller et de prévenir toutes les formes d’« extrémisme non violent ».
Et ce, malgré le fait que la ministre de l’Intérieur Theresa May elle-même, dans une interview sur la législation sur BBC Radio 4, n’a pas pu donner une définition cohérente de « l’extrémisme non violent ». La commodité de ce vide rédactionnel nébuleux signifie que tous les points de vue sceptiques à l’égard de la politique gouvernementale – en particulier les politiques intérieures et étrangères militarisées et discriminatoires du gouvernement dans le contexte de la « guerre contre le terrorisme » – pourraient être assimilés à un « extrémisme non violent ».
La HJS a également une relation étroite avec une autre organisation née au cœur de Whitehall : le think tank anti-extrémisme connu sous le nom de Quilliam Foundation.
Kassam de la HJS, note l’équipe de Spinwatch, a admis avoir travaillé « en étroite collaboration avec la Fondation Quilliam » en 2010, et Ghaffar Hussain de Quilliam « a ensuite fait partie du conseil consultatif des Student Rights », ainsi qu’être membre de la HJS.
« L’importance de cette collaboration est de souligner à quel point les pratiques de Student Rights étaient en accord avec celles tolérées par l’État ; Quilliam a reçu des millions de dollars de financement du gouvernement, en promouvant un discours très similaire. »
La Fondation Quilliam de Maajid Nawaz est connectée au même réseau de soutien de droite aux États-Unis. Comme je l’ai exposé dans une enquête précédente au cours des cinq dernières années, Quilliam a reçu environ un million de dollars de la Fondation Gen Next, un réseau philanthropique qui fonctionne comme un front caritatif pour la droite la plus extrême du Parti républicain.
Parmi les directeurs américains de Quilliam figurent des personnalités néoconservatrices de haut niveau comme Chad Sweet, ancien responsable de la sécurité intérieure de l’administration Bush et directeur de campagne du sectaire, ouvertement raciste, homophobe et belliciste Ted Cruz, ainsi que des personnes liées au financement du terrorisme saoudien et au régime autoritaire égyptien de Moubarak.
Notamment, même pendant son mandat de directeur de Quilliam, Sweet organisait simultanément des événements de campagne pour Cruz, organisés par des groupes d’extrême droite anti-musulmans et racistes.
Il existe ici une interconnexion directe de haut niveau. Sweet est cofondateur et directeur principal du Cherthoff Group, un entrepreneur américain influent dans le domaine de la défense, fondé par l’ancien secrétaire d’État à la sécurité intérieure, Michael Cherthoff, sous lequel il a travaillé. Michael Cherthoff fait partie du conseil des mécènes internationaux de la Henry Jackson Society, et du conseil consultatif du groupe parlementaire multipartite (APPG) pour la sécurité intérieure de la HJS à la Chambre des communes.
Pratiques abusives au parlement pour le complexe militaro-industriel et des services de renseignement
La HJS s’est retirée de son rôle de secrétariat de l’APPG [All-party parliamentary group, groupe de parlementaires anglais d’appartenances politiques diverses, NdT] pour la sécurité intérieure, ainsi que de l’APPG pour la sécurité transatlantique et internationale, après que des plaintes officielles déposées par Spinwatch ont confirmé que la HJS n’avait pas respecté les règles parlementaires.
La campagne Spinwatch avait conduit à une enquête du commissaire parlementaire aux normes, demandant à la HJS de fournir une liste « citant toute société commerciale ayant fait un don de plus de 5 000 £ » à la Société au cours de l’année précédente, soit en un seul versement, soit de manière cumulative. Préférant ne pas divulguer le nom des sociétés qui l’ont parrainée, la HJS a décidé de se retirer simplement de ses fonctions de secrétariat dans les APPG.
Cependant, un aperçu des APPG et d’autres APPG impliquant des membres, des conseillers et des mécènes de la HJS donne un aperçu intriguant des types d’intérêts pour lesquels la HJS faisait effectivement pression au parlement sans examen public.
Le rapport Spinwatch note que l’APPG sur la sécurité intérieure dirigé par la HJS de 2009 à 2014 a inclus dans son conseil consultatif le tsar de la sécurité intérieure de Bush, Michael Chertoff, dont le groupe Cherthoff emploie l’ancien directeur de la NSA et de la CIA, Michael Hayden.
Depuis 2012, Cherthoff est président du conseil d’administration de BAE Systems, basé à Londres, qui figure parmi les dix plus grands entrepreneurs de défense au monde.
Le collègue de Chertoff au sein du conseil consultatif était « Sir David Omand, un ancien directeur de l’agence britannique GCHQ [Government Communications Headquarters, NdT] d’espionnage des communications ».
« L’implication de personnalités comme l’ancien ministre de l’intérieur Lord Reid, vice-président conjoint de l’APPG pour la sécurité intérieure, et Lord Carlile, responsable indépendant de la révision de la législation antiterroriste entre 2005 et 2011, qui a supervisé la révision de la stratégie de prévention de l’extrémisme, démontre que ces groupes étaient potentiellement influents », observent Miller et son équipe.
Les membres des deux APPG « ont tendance à partager une compréhension militarisée de la sécurité », comme le révèlent les autres APPG dont ils font partie.
Spinwatch souligne l’exemple de la Baronne Nicholson, membre de l’APPG pour la sécurité transatlantique et internationale. Nommée par David Cameron comme envoyée pour le commerce du Royaume-Uni en Irak, elle a simultanément été présidente exécutive de l’Iraq Britain Business Council :
« A l’occasion du dixième anniversaire de l’invasion de l’Irak, elle a écrit un article pour la Lib Dem Voice intitulé « La guerre en valait-elle la peine », une question à laquelle elle a répondu par un « oui retentissant », bien qu’elle ait reconnu la violence permanente dans le pays. Citant les chiffres de la croissance économique, son ton est triomphaliste car, dit-elle, le marché libre, qui avait été « étouffé » sous Saddam Hussein, est maintenant florissant – elle est « fière de dire » que la croissance de l’industrie pétrolière, qu’elle cite en exemple, est « menée par la société britannique BP. »
Le calibre des « conférenciers experts » accueillis par l’APPG est également révélateur. Il s’agit notamment, comme le montre le rapport Spinwatch, de l’ancien secrétaire américain à la défense William Perry – le parrain du Forum des Highlands du Pentagone (qui, comme je l’ai signalé ailleurs, a joué un rôle déterminant dans les politiques néoconservatrices, en particulier la surveillance de masse et les guerres au Moyen-Orient) ; de Richard Hooker, doyen du Collège de défense de l’OTAN ; Douglas Feith, sous-secrétaire à la défense pour la politique de Bush (2001-2005), qui a précédemment coécrit avec le patron de la HJS, Richard Perle, une feuille de route controversée pour l’éclatement du Moyen-Orient ; William Lietzau, alors sous-secrétaire adjoint à la défense pour la politique des détenus et figure clé responsable de l’établissement du camp de détention de Guantanamo Bay ; et John Bolton, ambassadeur de Bush auprès des Nations unies
Vendre l’austérité pour donner du pouvoir aux banques
Coïncidant avec la dérive croissante de la Société vers l’extrême droite – illustrée par l’absorption en 2011 de Douglas Murray et de son Centre pour la cohésion sociale – la HJS a lancé un projet pour la réhabilitation des perceptions publiques du capitalisme.
L’équipe de Spinwatch s’est inspirée de mon propre reportage dans The Guardian sur la manière dont le projet a été partiellement financé par la City of London Corporation, pour démontrer pourquoi les acteurs financiers « jugés responsables d’avoir causé la crise » ne devraient pas être punis, et pour combattre les appels à une meilleure réglementation des banques et des marchés.
Spinwatch confirme que d’autres intérêts financiers ont été courtisés pour soutenir le projet, notamment McKinsey & Company, le principal cabinet de conseil en services financiers américain, KPMG, le cabinet néerlandais de comptabilité mondiale, et Clifford Chance, le cabinet juridique britannique multinational.
Le projet a donné naissance à un groupe de travail présidé par Lady de Rothschild, PDG d’EL Rothschild et Dominic Barton, directeur général de McKinsey, qui a publié en 2012 un article intitulé « Vers un capitalisme plus inclusif ».
En mai 2014, le projet HJS a abouti à une grande conférence mondiale sur la nécessité d’un « capitalisme plus inclusif », qui n’a cependant rien fait pour s’attaquer aux causes structurelles fondamentales de la crise financière mondiale – mais a recommandé des mesures pour atténuer l’hostilité croissante du public à l’égard de l’austérité néolibérale.
Parmi les principaux orateurs figuraient l’ancien président américain Bill Clinton, la directrice du FMI Christine Lagarde et le gouverneur de la Banque d’Angleterre Mark Carney. Les participants à la conférence représentaient des entreprises qui, ensemble, contrôlaient environ 30 % de la richesse financière totale du monde.
Spinwatch s’inspire également de mon article dans le Guardian sur l’évolution peu connue de la HJS vers le conseil en risque politique pour les intérêts commerciaux et les gouvernements, dans le cadre d’une société à but lucratif appelée « Analyse stratégique ».
Le travail principal de cette dernière consiste à produire un rapport trimestriel sur les risques et les prévisions dans le secteur du pétrole et du gaz au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, « à l’intention des personnes travaillant dans les secteurs juridique, financier, énergétique, bancaire, de la consultance et des infrastructures », ainsi que des « services de recherche, d’analyse et de conseil commercialement pertinents » pour les clients « afin de les aider à atténuer les risques et à identifier les opportunités pour leur entreprise ».
Comme le conclut l’article de Spinwatch :
« Il est difficile de voir comment un alignement sur les intérêts d’un secteur connu pour tirer profit de la « calamité des ressources naturelles » est compatible avec la rhétorique de promotion de la démocratie de la HJS. Cela est d’autant plus troublant que l’Analyse stratégique met l’accent sur le poids politique de la HJS. Le site web de l’Analyse stratégique indique également que « la Henry Jackson Society traite régulièrement avec la Chambre des communes ». Alan Mendoza a déclaré son affiliation à Strategic Analysis et à la HJS dans le Register of Interests of Lords Members’ Staff, où il est également inscrit comme assistant de Lord Trimble et, par conséquent, dispose d’un passe parlementaire. »
Qui tire les ficelles ?
Le nouveau rapport Spinwatch a été parrainé par la Fondation Cordoba, un think tank londonien, qui a déjà été critiqué par la Fondation Quilliam et d’autres pour avoir été une « façade » pour les Frères musulmans.
Il n’y a guère de preuves de ce fait, si ce n’est que le père d’Anas al-Tikriti, Oussama Tawfiq al-Tikriti, était à la tête du parti des Frères musulmans en Irak. Oussama Tawfiq est aujourd’hui à la tête du plus grand bloc politique sunnite en Irak, le Parti islamique irakien, qui fait partie du gouvernement en place en Irak, soutenu par les États-Unis.
Anas al-Tikriti a toutefois participé à la création du Centre des droits de l’homme des Émirats, une ONG londonienne respectée qui fait campagne contre les violations des droits de l’homme aux Émirats arabes unis (EAU). C’est sans doute la principale raison pour laquelle les EAU – qui ont longtemps servi de plaque tournante pour le financement du terrorisme d’Al-Qaïda – ont le culot d’avoir déclaré la Fondation Cordoba d’Al-Tikriti groupe terroriste.
J’ai demandé à l’auteur du rapport, le professeur David Miller, fondateur et directeur de Spinwatch, ce qu’il dirait en réponse aux accusations selon lesquelles le nouveau rapport Spinwatch sur le HJS aurait été « manipulé » au profit de Cordoba. Miller a décrit cela comme étant une « diffamation » basée sur « aucune preuve » :
« Pas un seul cas en relation avec notre travail sur la « guerre froide contre les Musulmans britanniques » ou dans le travail sur le lobby israélien, n’a été entaché d’inexactitudes. »
La question cruciale, a-t-il souligné, est que des groupes comme la HJS, Harry’s Place et d’autres sont opaques en ce qui concerne leur financement, malgré leurs prétentions à promouvoir le libéralisme.
Contrairement à elles, les sources de financement de Spinwatch depuis sa création sont méticuleusement cataloguées sur son site web. Dans l’ensemble, Spinwatch a reçu un montant relativement minime de Cordoba – ses autres principaux bailleurs de fonds sont le Joseph Rowntree Charitable Trust, l’Open Society Foundation, le Network for Social Change, la Commission européenne, parmi beaucoup d’autres.
« Nous sommes transparents en ce qui concerne notre financement. Nos détracteurs ne le sont pas », a déclaré le professeur Miller.
« Une des raisons pour lesquelles nous sommes transparents est que nous pensons que le conflit d’intérêts est un problème sérieux tant dans le journalisme que dans le travail universitaire… Les lecteurs devront donc juger notre travail dans le contexte de nos divulgations de conflits d’intérêts sur les sources de notre financement et ils devront également juger si nos déclarations selon lesquelles d’autres bailleurs de fonds de la Fondation Cordoba ont eu une quelconque influence sur notre travail sont crédibles. Pour ma part, je peux affirmer que ni Cordoba ni le MEMO [Middle East Monitor] ne nous ont jamais demandé de changer quoi que ce soit dans nos articles et, en fait, ils n’ont pas eu la possibilité de revoir le texte avant sa publication. »
En revanche, il a fallu la dernière enquête de Spinwatch pour faire la lumière sur les types d’intérêts financiers derrière la HJS, en exploitant les rares données disponibles dans les archives publiques. Le rapport constate que l’élite des bienfaiteurs de la HJS « comprend un certain nombre de fondations liées aux donateurs du Parti conservateur ».
L’un d’eux, qui a spécifiquement financé le projet médiatique anti-palestinien de la HJS « Just Journalism », est Lord Stanley Fink, décrit comme le « parrain de l’industrie des fonds spéculatifs », un donateur majeur du Parti conservateur et un ancien trésorier du Parti conservateur.
Selon Antony Lerman, ancien directeur de l’Institut de recherche sur les politiques juives (JPR), M. Kalms lui a dit un jour que le seul « intérêt » que les Juifs européens devaient poursuivre en Europe « est de combattre l’Islam, en montrant un soutien total aux deux personnes qui se sont opposées à l’Islam – Tony Blair et George Bush. La plupart des Musulmans ne voulaient pas s’intégrer. En fin de compte, ils s’aligneraient derrière les fondamentalistes ».
Parmi les autres bailleurs de fonds de la HJS, citons Edward Atkin, « un donateur conservateur régulier », et la famille du fondateur de River Island, Bernard Lewis, « qui a fait un don au Parti conservateur par l’intermédiaire du Lewis Trust Group », parmi beaucoup d’autres.
Mais l’ampleur du financement de la HJS par cet éventail d’intérêts d’extrême droite, pro-Tory et anti-Palestiniens qui se chevauchent reste inconnue, car la HJS n’opère pas avec une grande transparence en ce qui concerne ses principaux donateurs.
L’équipe de Spinwatch conclut :
« Loin de promouvoir la démocratie tant au niveau national qu’à l’étranger, comme le souhaitaient les fondateurs initiaux, la société a rejoint les rangs du réseau transatlantique d’islamophobie en s’appuyant sur le soutien financier des ferventes élites pro-israéliennes et de leurs fondations donatrices. »
Les implications sont inévitables.
La Henry Jackson Society n’est pas un think-tank indépendant.
C’est un groupe de façade pour les puissants extrémistes néoconservateurs d’extrême droite à la tête du complexe militaro-industriel et du renseignement.
Le Dr Nafeez Ahmed est un journaliste d’investigation, un auteur à succès et un spécialiste de la sécurité internationale. Ancien rédacteur du Guardian, il écrit la chronique « System Shift » pour VICE’s Motherboard et est également chroniqueur pour Middle East Eye. Il a remporté le prix 2015 Project Censored Award, connu sous le nom de « Alternative Pulitzer Prize », pour son travail de journaliste d’investigation exceptionnel pour le Guardian, et a été sélectionné par le Evening Standard dans le cadre de l’émission « Power 1,000 », qui regroupe les Londoniens les plus influents au niveau mondial.
Source : Insurge Intelligence, Nafeez Ahmed, 16-06-2015
Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.
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Commentaire recommandé
Too Long Didnt Read.
Un article bourre de noms d’individus,d’organisation ,du name dropping, sur un pays etranger ,voisin mais etranger: qu’est ce que j’en fais?ou plutot qu’est ce que j’obtiens en echange de la lecture de cet article? des informations impossible a verifier? une grosse confusion paralysante?
12 réactions et commentaires
Too Long Didnt Read.
Un article bourre de noms d’individus,d’organisation ,du name dropping, sur un pays etranger ,voisin mais etranger: qu’est ce que j’en fais?ou plutot qu’est ce que j’obtiens en echange de la lecture de cet article? des informations impossible a verifier? une grosse confusion paralysante?
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AlerterJe n’ai parcouru -vaguement- que le début. Tout ça m’a l’air bien confus. Je crois qu’il faut essayer de genrer tout ça (mon nouveau dada).
Masculin: républicain, analyse (top-down), structure, évolutionnisme (progressisme);
Féminin: démocrate, synthèse (bottom-up), fonction, conservatisme.
Dans les sociétés il est pour moi clair que c’est la fonction qui crée l’organe. En principe on ne s’organise pas pour rien, demandez aux logisticiens. Pourquoi nos sociétés « modernes » sont-elles organisées comme elles le sont actuellement?
+2
AlerterEn février, ça cogite, ça mijote, çà réseaute.
Douglas Murray dont le nom est cité à plusieurs reprises dans cet article (plus une photo) est directeur associé de la Henry Jackson Society qu’il a rejointe selon l’auteur en 2011.Il est intéressant de visiter le site de l’association . https://henryjacksonsociety.org/ .Ses fondements https://henryjacksonsociety.org/statement-of-principles/ (traduction Google, à lire si vous avez quelques minutes).
Douglas Murray était l’un des intervenants lors de la National Conservatism Conference, des 3 et 4 février 2020 à Rome.
https://nationalconservatism.org/natcon-rome-2020/presenters/douglas-murray/
Marion Maréchal , nouvelle égérie-du-conservatisme-qui-ne-fait-pas-de-politique a prononcé également un discours attendu à cette même réunion.
https://www.valeursactuelles.com/clubvaleurs/politique/exclusif-marion-marechal-rome-que-reste-t-il-de-la-france-lheure-du-neo-feminisme-et-du-terrorisme-intellectuel-115695
J’espère que les souverainistes conservateurs français auront compris où je voulais en venir.Un souverainiste averti en vaut deux.
Ça pipeaute.
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AlerterJ’ai parcouru l’article de Nafeez Ahmed, il y a à boire et à manger. Cette Henry Jackson Society me paraît louche, néo-conservatrice et belliciste, la liste de ses membres britanniques est édifiante : elle inclut Richard Dearlove, ancien chef du MI-6 qui a contribué à la guerre d’Irak en fabriquant des « preuves » ; Mark Etherington, gouverneur d’une province de l’Irak sous occcupation ; Jamie Shea, souvenez-vous ! Le porte-parole de l’OTAN durant la guerre du Kosovo, celui qui nous berçait de son accent so british au rythme des bombardements sur la Serbie. Jamie Shea, l’unique source d’information des « journalistes » de l’Otanie (lui-même en était un peu gêné, comme il devait le reconnaître en avril 2000).
Mais cet article me paraît trop long, et il vise trop large. Tous ceux qui rejettent le bellicisme et le néo-conservatisme ne sont pas forcément des adeptes du féminisme à outrance, ou de l’immigration massive.
Si Nafeez Ahmed pouvait résumer son propre article…
+15
AlerterEn gros,soit on est immigrationniste à tous crins,soit on est neocon d’extrême droite et anti musulman.C’est le fil qui sous tend toute la lecture de cet article,indigeste et qui cite tellement de monde qu’on s’y perd. A force de vouloir trop prouver,on ne prouve rien du tout.
+9
Alerter@calal,@christian gedeon
je trouve vos commentaires sévères.
– oui certains billets ici sont difficiles à lire car ils ne correspondent pas toujours à notre référentiel culturel.J’ai assez souvent survolé certains d’entre eux car je n’avais ni le temps ni les connaissances pour les approfondir.Je ne m’en cache pas. J’en garde toutefois toujours une ligne directrice.
– @calal,vous faîtes ce commentaire à 8h11 . Puis un autre à 8h19 concernant une autre parution de ce jour.Vous auriez pu, par vous-même aisément vérifier quelques informations grâce à internet.Cela vous aurez pris certes du temps et empêcher sans doute un second post .Je ne cherche pas à vous « coincer » en vous rappelant cette « chronologie ».Cette remarque me permet le point suivant.
– l’intérêt de ce blog consiste également en ses commentaires. Ainsi, pour essayer de comprendre un article qui n’est pas dans mon « domaine de compétence » , le soir je lis les différents commentaires édités dans la journée, ils peuvent parfois se montrer instructifs et pédagogiques.
Par exemple, quand j’ai lu cet article ce matin, j’étais certain qu’@Fritz , « passionné » par la guerre du Kosovo (autant que par les wisigoths ), ferait un commentaire qui resituerait certains personnages de la Jackson Society ,ce qui peut être utile aux lecteurs moins avertis.
D’ailleurs, nombre d’entre eux ont plussoyé cet article, long et dense , je vous le concède.
+4
AlerterCher LBSSO,je n’ai pas dit difficile à lire,j’ai dit indigeste,car mal rédigé et fouillis.Pour le reste il ne m’apprend pas grand chose,notammentMurray,Perle ou Jamie Shea,l’innénarrable commentateur des bombardements otanesques en Serbie.
Et oui,je suis dur dans mon commentaire parce que l’article est une ratatouille. Qui mélange allégrement féminisme,islamophobie et patin couffin. Mais faut il s’étonner de l’émergence devenue coming out de cette « nouvelle droite » que d’aucuns appellent extrême?Pour ce qui me concerne,c’est logique et attendu,peut-être même planifié depuis bien longtemps.
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AlerterLe conservatisme, une ratatouille à toutes les sauces.
« une ratatouille qui mélange allègrement féminisme, islamophobie et patin couffin »
Sur la forme, on est d’accord, article assez mal rédigé.
En revanche, ce n’est pas l’auteur qui mélange les thèmes que vous citez. C’est la Henry Jackson Society. Nafeez Ahmed veut au contraire en dénoncer les incohérences.
L’auteur limite son exposé à cette seule association néo-conservatrice qu’il tente de prendre en défaut. En ce sens , je suis également en désaccord avec @Fritz quand il écrit que l’auteur « vise trop large ». Au contraire, il se limite à la Jackson Society.Son objet n’est pas d’étudier globalement « le néo-conservatisme » et ses approximations mais celles de ce « think tank ». Plan serré.
Trop : il n’aborde pas suffisamment la doctrine économique de ce cercle.
Je confirme que l’on peut être contre l’instrumentalisation du féminisme et « une immigration massive » sans être « neocon d’extrême droite et anti musulmans » ou néo-conservateur.De même que s’interroger sur les formes du débat concernant le climat et/ou l’introduction du loup ne fait pas le néoconservateur.
Conservatisme : néo,libéral,national,ou social ou…Pour rester dans la métaphore culinaire, il est à toutes les sauces. Dans un monde en accélération quoi de plus normal ? Cher @christian gedeon, vous en reprendrez bien un petit peu ?
+2
AlerterCher Calal,le propre de la vision du monde ultralibérale est d’être incohérente dans ses apparences,sachant que son but et son moyen est de maintenir le monde en équilibre le plus instable possible,pour créer sans interruption de nouvelles opportunités au sens anglo du terme. Et avec la dollarisation du monde,que d’aucuns voyaient déjà finie avec le gag des nouvelles routes de la soie,les us et leurs alliés disposent d’une force de frappe presque illimitée. Donc instabilité égale …stabilité.cqfd.Pour eux.
J’ai dit gag parce que historiquement ces routes n’ont jamais existé au sens qu’on leur donne.C’était une succession de caravanes,qui chargeaient et déchargeaient à chaque « frontière « . Et rien d’autre. Et surtout,ces routes n’étaient « chinoises » que sur le territire controlé par l’Empire du milieu,au mieux jusqu’aux oasis du Tarim.
+0
AlerterCette société néo-conservatrice, qui souhaite une OTAN forte et offensive, et une Grande-Bretagne relais de la domination américaine, n’a pas choisi son nom au hasard. Le sénateur Henry Jackson était un « faucon démocrate », qui est mort en 1983, juste après avoir condamné l’URSS dans le drame du Boeing sud-coréen.
https://en.wikipedia.org/wiki/Henry_M._Jackson
Pendant la guerre du Pacifique, il a défendu l’internement des citoyens américains d’origine japonaise.
Ses ennemis le surnommaient « le sénateur Boeing » ou même « la p… de Boeing » (the Boeing whore).
Parmi les parrains de cette « honorable société » figure l’extrémiste lituanien Vytautas Landsbergis.
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AlerterLe national conservatisme vient d’ Israël. Point barre ….de toutes les infos et articles que j’ ai glané ici et là depuis plusieurs mois
C’ est , il me semble l’ essentiel à retenir
+8
AlerterJ’ai réflechi avant de poster ce commentaire. C’est une questuion pour moi sans réponse que celle de savoir pourquoi on en revient toujours à Israël,aujourd’hui,et pardonnez moi,aux juifs hier et avant hier. Qu’on conteste la politique israélienne,OK. Qu’ on soit pro palestinien,OK. Et tout ce genre de choses. Mais faire d’Israël le neo berceau du national conservatisme,çà me dépasse un peu…çà me chatouille la plume,et çà me gratouille les neurones.Parce qu’Israêl ,si tel est le cas,figure dans une longue liste de pays plus nationalistes et plus conservateurs,tu meurs,tout de suite. Au hasard,l’Inde,le Pakistan oui,tiens,l’Iran. pour les plus importants. la Russie aussi peut-être,où le nationalisme est exalté,et où Poutine vient de manifester sans fioritures inutiles son refus du « mariage » homosexuel. La Lettonie,la Lituanie et l’Estonie,tiens,dont on parle peu,et on a tort. L’Ukraine et ce sans commentaires. L’Ecosse,à fond les ballons pour rejouer highlander. Bon,j’arrête. Alors,pourquoi Israël seul? A supposer que l’allégation soit vérifiée.
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