Source : Classique UGAC
« Pourquoi la guerre ? »
1-Albert Einstein
Potsdam, le 30 juillet 1932.
Monsieur et Cher Ami,
Je suis heureux qu’en m’invitant à un libre échange de vues avec une personne de mon choix sur un sujet désigné à mon gré, la Société des Nations et son Institut international de Coopération Intellectuelle à Paris m’aient, en quelque sorte, donné l‘occasion précieuse de m’entretenir avec vous d’une question qui, en l’état présent les choses, m’apparaît comme la plus importante dans l’ordre de la civilisation : Existe-t-il un moyen d’affranchir les hommes de la menace de la guerre ?
D’une façon assez générale, on s’entend aujourd’hui à reconnaître que les progrès de la technique ont rendu pareille question proprement vitale pour l’humanité civilisée, et cependant les ardents efforts consacrés à la solution de ce problème ont jusqu’ici échoué dans d’effrayantes proportions.
Je crois que, parmi ceux aussi que ce problème occupe pratiquement et professionnellement, le désir se manifeste, issu d’un certain sentiment d’impuissance, de solliciter sur ce point l’avis de personnes que le commerce habituel des sciences a placées à une heureuse distance à l’égard de tous les problèmes de la vie.
En ce qui me concerne, la direction habituelle de ma pensée n’est pas de celles qui ouvrent des aperçus dans les profondeurs de la volonté et du sentiment humains, et c’est pourquoi, dans l’échange de vues que j’amorce ici, je ne puis guère songer à faire beaucoup plus qu’essayer de poser le problème et, tout en laissant par avance de côté les tentatives de solution plus ou moins extérieures, vous donner l’occasion d’éclairer la question sous l’angle de votre profonde connaissance de la vie instinctive de l’homme. Je suis convaincu que vous serez à même d’indiquer des moyens éducatifs qui, par une voie, dans une certaine mesure étrangère à la politique, seraient de nature à écarter des obstacles psychologiques, que le profane en la matière peut bien soupçonner, mais dont il n’est pas capable de jauger les correspondances et les variations.
Pour moi qui suis un être affranchi de préjugés nationaux, la face extérieure du problème — en l’espèce, l’élément d’organisation — m’apparaît simple : les États créent une autorité législative et judiciaire pour l’apaisement de tous les conflits pouvant surgir entre eux. Ils prennent l’engagement de se soumettre aux lois élaborées par l’autorité législative, de faire appel au tribunal dans tous les cas litigieux, de se plier sans réserve à ses décisions et d’exécuter, pour en assurer l’application, toutes les mesures que le tribunal estime nécessaires.
Je touche là à la première difficulté : Un tribunal est une institution humaine qui pourra se montrer, dans ses décisions, d’autant plus accessible aux sollicitations extra-juridiques qu’elle disposera de moins de force pour la mise en vigueur de ses verdicts. Il est un fait avec lequel il faut compter : droit et force sont inséparablement liés, et les verdicts d’un organe juridique se rapprochent de l’idéal de justice de la communauté, au nom et dans l’intérêt de laquelle le droit est prononcé, dans la mesure même où cette communauté peut réunir les forces nécessaires pour faire respecter son idéal de justice.
Mais nous sommes actuellement fort loin de détenir une organisation supra-étatiste qui soit capable de conférer à son tribunal une autorité inattaquable et de garantir la soumission absolue à l’exécution de ses sentences. Et voici le premier principe qui s’impose à mon attention : La voie qui mène à la sécurité internationale impose aux États l’abandon sans condition d’une partie de leur liberté d’action, en d’autres termes, de leur souveraineté, et il est hors de doute qu’on ne saurait trouver d’autre chemin vers cette sécurité.
Un simple coup d’oeil sur l’insuccès des efforts, certainement sincères, déployés au cours des dix dernières années permet à chacun de se rendre compte que de puissantes forces psychologiques sont à l’oeuvre, qui paralysent ces efforts. Certaines d’entre elles sont aisément perceptibles. L’appétit de pouvoir que manifeste la classe régnante d’un Etat contrecarre une limitation de ses droits de souveraineté.
Cet « appétit politique de puissance » trouve souvent un aliment dans les prétentions d’une autre catégorie dont l’effort économique se manifeste de façon toute matérielle. Je songe particulièrement ici à ce groupe que l’on trouve au sein de chaque peuple et qui, peu nombreux mais décidé, peu soucieux des expériences et des facteurs sociaux, se compose d’individus pour qui la guerre, la fabrication et le trafic des armes ne représentent rien d’autre qu’une occasion de retirer des avantages particuliers, d’élargir le champ de leur pouvoir personnel.
Cette simple constatation n’est toutefois qu’un premier pas dans la connaissance des conjonctures. Une question se pose aussitôt : Comment se fait-il que cette minorité-là puisse asservir à ses appétits la grande masse du peuple qui ne retire d’une guerre que souffrance et appauvrissement ? (Quand je parle de la masse du peuple, je n’ai pas dessein d’en exclure ceux qui, soldats de tout rang, ont fait de la guerre une profession, avec la conviction de s’employer à défendre les biens les plus précieux de leur peuple et dans la pensée que la meilleure défense est parfois l’attaque.)
Voici quelle est à mon avis la première réponse qui s’impose : Cette minorité des dirigeants de l’heure a dans la main tout d’abord l’école, la presse et presque toujours les organisations religieuses. C’est par ces moyens qu’elle domine et dirige les sentiments de la grande masse dont elle fait son instrument aveugle.
Mais cette réponse n’explique pas encore l’enchaînement des facteurs en présence car une autre question se pose : Comment est-il possible que la masse, par les moyens que nous avons indiqués, se laisse enflammer jusqu’à la folie et au sacrifice ? Je ne vois pas d’autre réponse que celle-ci : L‘homme a en lui un besoin de haine et de destruction. En temps ordinaire, cette disposition existe à l’état latent et ne se manifeste qu’en période anormale ; mais elle peut être éveillée avec une certaine facilité et dégénérer en psychose collective. C’est là, semble- t-il, que réside le problème essentiel et le plus secret de cet ensemble de facteurs. Là est le point sur lequel, seul, le grand connaisseur des instincts humains peut apporter la lumière.
Nous en arrivons ainsi à une dernière question : Existe-t-il une possibilité de diriger le développement psychique de l’homme de manière à le rendre mieux armé contre les psychoses de haine et de destruction ? Et loin de moi la pensée de ne songer ici qu’aux êtres dits incultes. J’ai pu éprouver moi-même que c’est bien plutôt la soi-disant « intelligence » qui se trouve être la proie la plus facile des funestes suggestions collectives, car elle n’a pas coutume de puiser aux sources de l’expérience vécue, et que c’est au contraire par le truchement du papier imprimé qu’elle se laisse le plus aisément et le plus complètement saisir.
Et, pour terminer, ceci encore : je n’ai parlé jusqu’ici que de la guerre entre États, en d’autres termes, des conflits dits internationaux. Je n’ignore pas que l’agressivité humaine se manifeste également sous d’autres formes et dans d’autres conditions (par exemple la guerre civile, autrefois causée par des mobiles religieux, aujourd’hui par des mobiles sociaux, — la persécution des minorités nationales). Mais c’est à dessein que j’ai mis en avant la forme de conflit la plus effrénée qui se manifeste au sein des communautés humaines, car c’est en partant de cette forme là qu’on décèlera le plus facilement les moyens d’éviter les conflits armés.
Je sais que dans vos ouvrages vous avez répondu, soit directement soit indirectement, à toutes les questions touchant au problème qui nous intéresse et nous presse. Mais il y aurait grand profit à vous voir développer le problème de la pacification du monde sous le jour de vos nouvelles investigations, car un tel ex-posé peut être la source de fructueux efforts.
Très cordialement à vous.
A. Einstein
« Pourquoi la guerre ? »
2-Sigmund Freud
Vienne, septembre 1932.
Cher Monsieur Einstein,
En apprenant que vous aviez l’intention de m’inviter à un échange de vues sur un sujet auquel vous accordez votre intérêt et qui vous semble mériter aussi l’attention d’autres personnes, je n’ai pas hésité à me prêter à cet entretien. Je présumais que vous choisiriez un problème qui fût aux confins de ce que l’on peut connaître aujourd’hui, et auquel nous pussions l’un et l’autre, le physicien et le psychologue, accéder chacun par sa propre voie, de manière à nous rencontrer sur le même terrain, tout en partant de régions différentes.
Aussi m’avez-vous surpris en me posant la question de savoir ce que l’on peut faire pour libérer les humains de la menace de la guerre. J’ai été tout d’abord effrayé de mon — j’allais dire notre — incompétence, car je voyais là une tâche pratique dont l’apanage revenait aux hommes d’État. Mais je me suis rendu compte que vous n’aviez pas soulevé la question en tant qu’homme de science et physicien, mais comme ami des humains, répondant à l’invitation de la Société des Nations, tel l’explorateur Fridtjof Nansen lorsqu’il entreprit de venir en aide aux affamés et aux victimes de la guerre mondiale, privés de patrie. Je réfléchis aussi que l’on n’attendait pas de moi l’énoncé de propositions pratiques, mais que j’avais simplement à exposer le problème de la sauvegarde de la paix, à la lumière de l’examen psychologique.
Mais là-dessus encore, vous avez dit l’essentiel dans votre lettre et vous m’avez du même coup pris le vent de mes voiles, mais je me prête volontiers à voguer dans votre sillage et je me contenterai de confirmer ce que vous avancez, tout en y apportant mes digressions, au plus près de mes connaissances — ou de mes conjectures.
Vous commencez par poser la question entre droit et force. C’est là, assurément, le juste point de départ de notre enquête. Puis-je me permettre de substituer au mot « force » le terme plus incisif et dur de « violence » ? Droit et violence sont actuellement pour nous des antinomies. Il est facile de montrer que l’un est dérivé de l’autre, et si nous remontons aux origines primitives pour examiner de quelle manière le phénomène s’est produit tout d’abord, la solution du problème nous apparaît sans difficulté. Si, dans ce qui va suivre, vous me voyez exposer comme au tant d’éléments nouveaux, des faits généralement connus et reconnus, vous me le pardonnerez la filiation des données m’y obligeait.
Les conflits d’intérêts surgissant entre les hommes sont donc, eu principe, résolus par la violence. Ainsi en est-il dans tout le règne animal, dont l’homme ne saurait s’exclure ; pour l’homme, il s’y ajoute encore, bien entendu, des conflits d’opinion, qui s’élèvent jusqu’aux plus hauts sommets de l’abstraction et dont la solution semble nécessiter une technique différente. Mais cette complication n’est apparue que plus tard.
A l’origine, dans une horde restreinte, c’est la supériorité de la force musculaire qui décidait ce qui devait appartenir à l’un, ou quel était celui dont la volonté devait être appliquée, lia force musculaire se trouve secondée et bientôt remplacée par l’usage d’instruments ; la victoire revient à qui possède les meilleures armes ou en use avec le plus d’adresse. L’intervention de l’arme marque le moment où déjà la suprématie intellectuelle commence à prendre la place de la force musculaire ; le but dernier de la lutte reste le même : l’une des parties aux prises doit être contrainte, par le dommage qu’elle subit et par l’étranglement de ses forces, à abandonner ses revendications ou son opposition. Ce résultat est acquis au maximum lorsque la violence élimine l’adversaire de façon durable, le tue par conséquent.
Ce procédé offre deux avantages : l’adversaire ne pourra reprendre la lutte à une nouvelle occasion et son sort dissuadera les autres de suivre son exemple. Par ailleurs, la mise à mort de l’ennemi satisfait une disposition instinctive, sur laquelle nous aurons à revenir. Il arrive qu’au dessein de tuer vienne s’opposer le calcul selon lequel l’ennemi peut être employé pour rendre d’utiles services, si, une fois tenu en respect, on lui laisse la vie sauve. En pareil cas la violence se contente d’asservir au lieu de tuer. C’est ainsi qu’on commence à épargner l’ennemi, mais le vainqueur a dès lors à compter avec la soif de vengeance aux aguets chez le vaincu, et il abandonne une part de sa propre sécurité.
Tel est donc l’état originel, le règne de la puissance supérieure, de la violence brutale ou intellectuellement étayée. Nous savons que ce régime s’est modifié au cours de l’évolution, et qu’un chemin a conduit de la violence au droit, — mais lequel ? Il n’en est qu’un, à mon avis, et c’est celui qui aboutit au fait que l’on peut rivaliser avec un plus fort par l’union de plusieurs faibles. « L’union fait la force. » La violence est brisée par l’union, la force de ces éléments rassemblés représente dès lors le droit, par opposition à la violence d’un seul. Nous voyons donc que le droit est la force d’une communauté.
C’est encore la violence, toujours prête à se tourner contre tout individu qui lui résiste, travaillant avec les mêmes moyens, attachée aux mêmes buts ; la différence réside, en réalité, uniquement dans le fait que ce n’est plus la violence de l’individu qui triomphe, mais celle de la communauté. Mais, pour que s’accomplisse ce passage de la violence au droit nouveau, il faut qu’une condition psychologique soit remplie. L’union du nombre doit être stable et durable. Si elle se créait à seule fin de combattre un plus puissant pour se dissoudre une fois qu’il est vaincu, le résultat serait nul. Le premier qui viendrait ensuite à s’estimer plus fort chercherait de nouveau à instituer une hégémonie de violence, et le jeu se répéterait indéfiniment.
La communauté doit être maintenue en permanence, s’organiser, établir des règlements qui préviennent les insurrections à craindre, désigner des organes qui veillent au maintien des règlements, — des lois, et qui assurent l’exécution des actes de violence conformes aux lois. De par la reconnaissance d’une semblable communauté d’intérêts, il se forme, au sein des membres d’un groupe d’hommes réunis, des attaches d’ordre sentimental, des sentiments de communauté, sur lesquels se fonde, à proprement parler, la force de cette collectivité.
Je crois avoir ainsi indiqué tous les éléments essentiels ; le triomphe sur la violence par la transmission du pouvoir à une plus vaste unité, amalgamée elle-même par des relations de sentiments. Tout le reste n’est que commentaires et redites. La situation est simple, tant que la communauté ne se compose que d’un certain nombre d’individus d’égale force. Les lois de cette association fixent alors, en ce qui concerne les manifestations violentes de la force, la part de liberté personnelle à laquelle l’individu doit renoncer pour que la vie en commun puisse se poursuivre en sécurité.
Mais un tel état de tranquillité ne se conçoit que théoriquement ; de fait, le cours des choses se complique, parce que la communauté, dès l’origine, renferme des éléments de puissance inégale — hommes et femmes, parents et enfants — et que bientôt, la guerre et l’assujettissement créent des vainqueurs et des vaincus, qui se transforment en maîtres et esclaves. Le droit de la communauté sera, dès lors, l’expression de ces inégalités de pouvoir, les lois seront faites par et pour les dominateurs, et on laissera peu de prérogatives aux sujets.
A partir de ce moment-là, l’ordre légal se trouve exposé à des perturbations de deux provenances : tout d’abord les tentatives de l’un ou de l’autre des seigneurs pour s’élever au-dessus des restrictions appliquées à tous ses égaux, pour revenir, par conséquent, du règne du droit au règne de la violence ; en second lieu, les efforts constants des sujets pour élargir leur pouvoir et voir ces modifications reconnues dans la loi, donc pour réclamer, au contraire, le passage du droit inégal au droit égal pour tous.
Ce dernier courant sera particulièrement marqué quand se produiront véritablement, au sein de la communauté, des modifications dans les attributions du pouvoir comme il arrive par suite de divers facteurs historiques. Le droit peut alors s’adapter insensiblement à ces nouvelles conditions, ou, ce qui est plus fréquent, la classe dirigeante n’est pas disposée à tenir compte de ce changement : c’est l’insurrection, la guerre civile, d’où la suppression momentanée du droit, et de nouveaux coups de force, à l’issue desquels s’instaure un nouveau régime du droit. Il est encore une autre source de transformation du droit, qui ne se manifeste que par voie pacifique, et c’est le changement de culture qui s’opère parmi les membres de la communauté ; mais il rentre dans un ordre de phénomènes qui ne pourra être traité que plus loin.
Nous voyons donc que, même à l’intérieur d’une communauté, le recours à la violence ne peut être évité dans la solution des conflits d’intérêt. Mais les nécessités, les communautés d’intérêt issues d’une existence commune sur un même sol, hâtent l’apaisement de ces luttes et, sous de tels auspices, les possibilités de solutions pacifiques sont en progression constante. Mais il suffit de jeter un coup d’oeil sur l’histoire de l’humanité pour assister à un défilé ininterrompu de conflits, que ce soit une communauté aux prises avec un ou plusieurs autres groupements, que ce soit entre unités tantôt vastes tantôt plus réduites, entre villes, pays, tribus, peuples, empires, conflits presque toujours résolus par l’épreuve des forces au cours d’une guerre. De telles guerres aboutissent ou bien au pillage, ou bien à la soumission complète, à la conquête de l’une des parties.
On ne saurait porter un jugement d’ensemble sur les guerres de conquête. Nombre d’entre elles, comme celle des Mongols et des Turcs, n’ont apporté que du malheur ; d’autres, en revanche, ont contribué à la transformation de la violence en droit, en créant de plus vastes unités au sein desquelles la possibilité du re-cours à la force se trouvait supprimée et un nouveau régime de droit apaisait les conflits, Ainsi les conquêtes romaines qui apportèrent aux pays méditerranéens la précieuse pax romana.
Les ambitions territoriales des rois de France ont créé un royaume uni dans la paix et florissant. Si paradoxal que cela puisse paraître, force nous est d’avouer que la guerre pourrait bien n’être pas un moyen inopportun pour la fondation de la paix « éternelle », car elle s’avère capable de constituer les vaste unités au sein desquelles une puissance centrale rend de nouvelles guerres impossibles. Cependant elle n’aboutit pas à ce résultat, car les succès de la conquête sont, en règle générale, de courte durée, les unités nouvelle- meut créées se désagrègent à leur tour presque toujours faute de cohésion entre les parties réunies par contrainte.
Et, de plus, la conquête n’a pu créer, jusqu’ici, que des unifications partielles, — de grande envergure il est vrai, — et dont les conflits réclamèrent justement des solutions brutales. Le résultat de tous ces efforts guerriers fut simplement que l’humanité échangea les innombrables et quasi incessantes escarmouches contre de grandes guerres, d’autant plus dévastatrices qu’elles étaient rares.
En ce qui concerne notre époque, la même conclusion s’impose, à laquelle vous avez abouti par un plus court chemin. II n’est possible d’éviter à coup sûr la guerre que si les hommes s’entendent pour instituer une puissance centrale aux arrêts de laquelle on s’en remet dans tous les conflits d’intérêt. En pareil cas, deux nécessités s’imposent au même titre : celle de créer une semblable instance suprême et celle de la doter de la force appropriée. Sans la seconde, la première n’est d’aucune utilité. Or la Société des Nations a bien été conçue comme autorité suprême de ce genre, mais la deuxième condition n’est pas remplie.
La Société des Nations ne dispose pas d’une force à elle et ne peut en obtenir que si les membres de la nouvelle association, — les différents États, — la lui concèdent. Et il y a peu d’espoir, pour le moment, que la chose se produise. Mais on ne comprendrait en somme pas pourquoi cette institution a été créée, si l’on ne savait qu’elle représente, dans l’histoire de l’humanité, une tentative bien rarement conçue, et jamais réalisée en de pareilles proportions. Tentative qui consiste à acquérir l’autorité, c’est-à-dire l’influence contraignante, d’ordinaire basée sur la détention de la force, en faisant appel à certains principes idéaux. Deux facteurs, nous l’avons vu, assurent la cohésion d’une communauté : la contrainte de violence et les relations de sentiment. — les identifications, comme on les désignerait en langage technique, — entre les membres de ce même corps.
Si l’un des facteurs vient à disparaître, il se peut faire que l’autre maintienne la communauté. De telles notions ne peuvent naturellement avoir une signification que si elles correspondent à d’importants éléments de communauté. Reste alors à savoir quelle en est la puissance. L’histoire nous apprend que ces notions ont réellement exercé leur action. L’idée panhellénique, par exemple, la conscience d’être quelque chose de mieux que les barbares voisins, et dont on retrouve la si vigoureuse expression dans les confédérations amphictyoniques, dans les oracles et dans les jeux, fut assez puissante pour adoucir le régime de la guerre parmi les Grecs, mais non point suffisante, naturellement, pour supprimer les conflits armés entre les diverses factions du peuple grec ni même pour dissuader une ville ou une fédération de villes de s’allier aux Perses ennemis pour abaisser un rival.
Le sentiment de communauté chrétienne, dont on sait pourtant la puissance, n’a pas davantage, au temps de la Renaissance, empêché de petits et de grands États chrétiens de rechercher l’appui du Sultan dans les guerres qu’ils se livrèrent entre eux. A notre époque également, il n’est aucune idée à qui l’on puisse accorder une telle autorité conciliatrice. Les idéals nationaux qui gouvernent aujourd’hui les peuples, — la chose n’est que trop claire, —. poussent à l’acte d’opposition.
Il ne manque pas de gens pour prédire que, seule, la pénétration universelle de l’idéologie bolcheviste pourra mettre un terme aux guerres, -— mais nous sommes de toute manière encore fort loin d’un tel aboutissement, et peut-être n’y saurait-on parvenir qu’après d’effroyables guerres civiles. Il semble donc que la tentative consistant à remplacer la puissance matérielle par la puissance des idées se trouve, pour le moment encore, vouée à l’échec, on commet une erreur de calcul en négligeant le fait que le droit était, à l’origine, la force brutale et qu’il ne peut encore se dispenser du concours de la force.
Je ne puis mieux faire maintenant que commenter une autre de vos propositions. Vous vous étonnez qu’il soit si facile d’exciter les hommes à la guerre et vous présumez qu’ils ont en eux un principe actif, un instinct de haine et de destruction tout prêt à accueillir cette sorte d’excitation. Nous croyons à l’existence d’un tel penchant et nous nous sommes précisément efforcés, au cours de ces dernières années, d’en étudier les manifestations.
Pourrais-je, à ce propos, vous exposer une partie des lois de l’instinct auxquelles nous avons abouti, après maints tâtonnements et maintes hésitations ? Nous admettons que les instincts tic l’homme se ramènent exclusivement à deux catégories : d’une part ceux qui veulent conserver et unir ; nous les appelons érotiques, — exactement au sens d’eros dans le Symposion de Platon, -— ou sexuels, en donnant explicitement à ce terme l’extension du concept populaire de sexualité ; d’autre part, ceux qui veulent détruire et tuer ; nous les englobons sous les termes de pulsion agressive ou pulsion destructrice.
Ce n’est en somme, vous le voyez, que la transposition théorique de l’antagonisme universellement connu de l’amour et de la haine, qui est peut-être une forme de la polarité d’attraction et de répulsion qui joue un rôle dans votre domaine. — Mais ne nous faites pas trop rapidement passer aux notions de bien et de mal. — Ces pulsions sont tout aussi indispensables l’une que l’antre ; c’est de leur action conjuguée ou antagoniste que découlent les phénomènes de la vie. Or il semble qu’il n’arrive guère qu’un instinct de l’une des deux catégories puisse s’affirmer isolément ; il est toujours « lié », selon notre expression, à une certaine quantité de l’autre catégorie, qui modifie son but, ou, suivant les cas, lui en permet seule l’accomplissement.
Ainsi, par exemple, l’instinct de conservation est certainement de nature érotique ; mais c’est précisément ce même instinct qui doit pouvoir recourir à l’agression, s’il veut faire triompher ses intentions. De même l’instinct d’amour, rapporté à des objets, a besoin d’un dosage d’instinct de possession, s’il veut en définitive entrer en possession de son objet. Et c’est précisément la difficulté qu’on éprouve à isoler les deux sortes d’instincts, dans leurs manifestations, qui nous a si longtemps empêché de les reconnaître.
Si vous voulez bien poursuivre encore un peu avec moi, vous verrez que les actions humaines révèlent une complication d’une autre sorte. Il est très rare que l’acte soit l’oeuvre d’une seule incitation instinctive, qui déjà en elle-même doit être un composé d’eros et de destruction. En règle générale, plusieurs motifs, pareillement composés, doivent coïncider pour amener l’action. L’un de vos confrères l’avait déjà perçu, — je veux parler ici du professeur G. Ch. Lichtenberg, qui enseignait la physique à Göttingue à l’époque de nos classiques ; mais chez lui, le psychologue était peut-être plus important encore que le physicien. Il avait découvert la rose des motifs quand il déclarait « Les mobiles en raison desquels nous agissons pourraient être répartis comme les trente-deux vents et leurs appellations se formuler Pain — Pain-Renommée ou Renommée — Renommée-Pain. ».
Ainsi donc, lorsque les hommes sont incités à la guerre, toute une série de motifs peuvent en eux trouver un écho à cet appel, les uns nobles, les autres vulgaires, certains dont on parle ouvertement et d’autres que l’on tait. Nous n’avons aucune raison de les énumérer tous. Le penchant à l’agression et à la destruction se trouve évidemment au nombre de ceux-ci : d’innombrables cruautés que nous rapportent l’histoire et la vie journalière en confirment l’existence.
En excitant ces penchants à la destruction par d’autres tendances érotiques et spirituelles, on leur donne naturellement le moyen de s’épancher plus librement. Parfois, lorsque nous entendons parler des cruautés de l’histoire, nous avons l’impression que les mobiles idéalistes n’ont servi que de paravent aux appétits destructeurs ; en d’autres cas, s’il s’agit par exemple des cruautés de la Sainte Inquisition, nous pensons que les mobiles idéaux se sont placés au premier plan, dans le conscient, et que les mobiles destructeurs leur ont donné, dans l’inconscient, un supplément de force. Les deux possibilités sont plausibles.
J’ai scrupule à abuser de votre attention qui entend se porter sur les moyens de prévenir la guerre et non sur nos théories. Et pourtant je voudrais m’attarder encore un instant à notre instinct de destruction, dont la vogue n’est rien en regard de son importance. Avec une petite dépense de spéculation, nous en sommes arrivés à concevoir que cette pulsion agit au sein de tout être vivant et qu’elle tend à le vouer à la ruine, à ramener la vie à l’état de matière inanimée.
Un tel penchant méritait véritablement l’appellation d’instinct de mort, tandis que les pulsions érotiques représentent les efforts vers la vie. L’instinct de mort devient pulsion destructrice par le fait qu’il s’extériorise, à l’aide de certains organes, contre les objets. L’être animé protège pour ainsi dire sa propre existence en détruisant l’élément étranger. Mais une part de l’instinct. de mort demeure agissante au-dedans de l’être animé et nous avons tenté de faire dériver toute une série de phénomènes normaux et pathologiques de cette réversion intérieure de la pulsion destructrice.
Nous avons même commis l’hérésie d’expliquer l’origine de notre conscience par un de ces revirements de l’agressivité vers le dedans. On ne saurait donc, vous le voyez, considérer un tel phénomène à la légère, quand il se manifeste sur une trop grande échelle ; il en devient proprement malsain, tandis que l’application de ces forces instinctives à la destruction dans le monde extérieur soulage l’être vivant et doit avoir une action bienfaisante.
Cela peut servir d’excuse biologique à tous les penchants haïssables et dangereux contre lesquels nous luttons. Force nous est donc d’avouer qu’ils sont plus près de la nature que la résistance que nous leur opposons et pour laquelle il nous faut encore trouver une explication. Peut-être avez-vous l’impression que nos théories sont une manière de mythologie qui, en l’espèce, n’a rien de réconfortant. Mais est-ce que toute science ne se ramène pas à cette sorte de mythologie ? En va-t-il autrement pour vous dans le domaine de la physique ?
Voilà qui nous permet de conclure, pour revenir à notre sujet, que l’on ferait oeuvre inutile à prétendre supprimer les penchants destructeurs des hommes. En des contrées heureuses de la terre, où la nature offre à profusion tout ce dont l’homme a besoin, il doit y avoir des peuples dont la vie s’écoule dans la douceur et qui ne connaissent ni la contrainte ni l’agression. J’ai peine à y croire et je serais heureux d’en savoir plus long sur ces êtres de félicité.
Les bolchevistes eux aussi espèrent arriver à supprimer l’agression humaine en assurant l’assouvissement des besoins matériels tout en instaurant l’égalité entre les bénéficiaires de la communauté. J’estime que c’est là une illusion. Ils sont, pour l’heure, minutieusement armés et la haine qu’ils entretiennent à l’égard de tous ceux qui ne sont pas des leurs n’est pas le moindre adjuvant pour s’assurer la cohésion de leurs partisans. D’ailleurs, ainsi que vous le marquez vous-même, il ne s’agit pas de supprimer le penchant humain à l’agression ; on peut s’efforcer de le canaliser, de telle sorte qu’il ne trouve son mode d’expression dans la guerre.
En partant de nos lois mythologiques de l’instinct, nous arrivons aisément à une formule qui fraye indirectement une voie à la lutte contre la guerre. Si la propension à la guerre est un produit de la pulsion destructrice, il y a donc lieu de faire appel à l’adversaire de ce penchant, à l’eros. Tout ce qui engendre, parmi les hommes, des liens de sentiment doit réagir contre la guerre. Ces liens peuvent être de deux sortes. En premier lieu, des rapports tels qu’il s’en manifeste à l’égard d’un objet d’amour, même sans intentions sexuelles. La psychanalyse n’a pas à rougir de parler d’amour, en l’occurrence, car la religion use d’un même langage : aime ton prochain comme toi- même. Obligation facile à proférer, mais difficile à remplir. La seconde catégorie de liens sentimentaux est celle qui procède de l’identification. C’est sur eux que repose, en grande partie, l’édifice de la société humaine.
Je trouve, dans une critique que vous portez sur l’abus de l’autorité, une seconde indication pour la lutte indirecte contre le penchant à la guerre. C’est l’une des faces de l’inégalité humaine, — inégalité native et que l’on ne saurait combattre, — qui veut, cette répartition en chefs et en sujets. Ces derniers forment la très grosse majorité ; ils ont besoin d’une autorité prenant pour eux des décisions auxquelles ils se rangent presque toujours sans réserves.
Il y aurait lieu d’observer, dans cet ordre d’idées, que l’on devrait s’employer, mieux qu’on ne l’a fait jusqu’ici, à former une catégorie supérieure de penseurs indépendants, d’hommes inaccessibles à l’intimidation et adonnés à la recherche du vrai, qui assumeraient la direction des masses dépourvues d’initiative. Que l’empire pris par les pouvoirs de l’État et l’interdiction de pensée de l’Église ne se prêtent point à une telle formation, nul besoin de le démontrer.
L’État idéal résiderait naturellement dans une communauté d’hommes ayant assujetti leur vie instinctive à la dictature de la raison. Rien ne pourrait créer une union aussi parfaite et aussi résistante entre les hommes, même s’ils devaient pour autant renoncer aux liens de sentiment les uns vis à vis des autres. Mais il y a toute chance que ce soit là un espoir utopique. Les autres voies et moyens d’empêcher la guerre sont certainement plus praticables, mais ils ne permettent pas de compter sur des succès rapides. On ne se plait guère à imaginer des moulins qui moudraient si lentement qu’on aurait le temps de mourir de faim avant d’obtenir la farine.
Vous le voyez, on n’avance guère les choses, à vouloir consulter des théoriciens étrangers au monde, quand il s’agit de tâches pratiques et urgentes. Mieux vaudrait s’efforcer, pour chaque cas particulier, d’affronter le danger avec les moyens qu’on a sous la main. Je voudrais cependant traiter encore un problème que vous ne soulevez pas dans votre lettre et qui m’intéresse spécialement. Pourquoi nous élevons-nous avec tant de force contre la guerre, vous et moi et tant d’autres avec nous, pourquoi n’en prenons-nous pas notre parti comme de l’une des innombrables vicissitudes de la vie ?
Elle semble pourtant conforme à la nature, biologiquement très fondée, et, pratiquement, presque inévitable. Ne vous scandalisez pas de la question que je pose ici. Pour les besoins d’une enquête, il est peut-être permis de prendre le masque d’une impassibilité qu’on ne possède guère dans la réalité. Et voici quelle sera la réponse : parce que tout homme a un droit sur sa propre vie, parce que la guerre détruit des vies humaines chargées de promesses, place l’individu dans des situations qui le déshonorent, le force à tuer son prochain contre sa propre volonté, anéantit de précieuses valeurs matérielles, produits de l’activité humaine, etc. On ajoutera en outre que la guerre, sous sa forme actuelle, ne donne plus aucune occasion de manifester l’antique idéal d’héroïsme et que la guerre de demain, par suite du perfectionnement des engins de destruction, équivaudrait à l’extermination de l’un des adversaires, ou peut-être même des deux.
Tout cela est exact et paraît même si incontestable qu’on en est réduit à s’étonner qu’un accord unanime de l’humanité n’ait point encore banni la guerre. On peut évidemment discuter l’un ou l’autre de ces points et se demander, par exemple, si la communauté ne doit pas avoir, elle aussi, un droit sur la vie de l’individu ; on ne saurait condamner au même titre tous les germes de guerre ; tant qu’il y aura des empires et des nations décidées à ex-terminer les autres sans pitié, ces autres-là doivent être équipés pour la guerre. Mais nous avons hâte de passer sur tous ces problèmes, ce n’est point la discussion à laquelle vous entendiez m’engager. Je veux en arriver à autre chose. Je crois que le motif essentiel pour quoi nous nous élevons contre la guerre, c’est que nous ne pouvons faire autrement. Nous sommes pacifistes, parce que nous devons l’être en vertu de mobiles organiques. Il nous est désormais facile de justifier notre attitude par des arguments.
Voilà qui ne va pas sans explication. Et voici ce que j’ajoute depuis des temps immémoriaux, l’humanité subit le phénomène du développement de la culture. (D’aucuns préfèrent, je le sais, user ici du terme de civilisation.) C’est à ce phénomène que nous devons le meilleur de ce dont nous sommes faits et une bonne part de ce dont nous souffrons. Ses causes et ses origines sont obscures, son aboutissement est incertain, et quelques-uns de ses caractères sont aisément discernables.
Peut-être conduit-il à l’extinction du genre humain, car il nuit par plus d’un côté à la fonction sexuelle, et actuellement déjà les races incultes et les couches arriérées de la population s’accroissent dans de plus fortes proportions que les catégories raffinées. Peut-être aussi ce phénomène est-il à mettre en parallèle avec la domestication de certaines espèces animales ; il est indéniable qu’il entraîne des modifications physiques ; on ne s’est pas encore familiarisé avec l’idée que le développement de la culture puisse être un phénomène organique de cet ordre. Les transformations psychiques qui accompagnent le phénomène de la culture, sont évidentes et indubitables.
Elles consistent en une éviction progressive des fins instinctives, jointe à une limitation des réactions impulsives. Des sensations qui, pour nos ancêtres, étaient chargées de plaisir nous sont devenues indifférentes et même intolérables ; il y a des raisons organiques à la transformation qu’ont subie nos aspirations éthiques et esthétiques. Au nombre des caractères psychologiques de la culture, il en est deux qui apparaissent comme les plus importants :l’affermissement de l’intellect, qui tend à maîtriser la vie instinctive, et la réversion intérieure du penchant agressif, avec toutes ses conséquences favorables et dangereuses.
Or les conceptions psychiques vers lesquelles l’évolution de la culture nous entraîne se trouvent heurtées de la manière la plus vive par la guerre, et c’est pour cela que nous devons nous insurger contre elle ; nous ne pouvons simplement plus du tout la supporter ; ce n’est pas seulement une répugnance intellectuelle et affective, mais bien, chez nous, pacifistes, une intolérance constitutionnelle, une idiosyncrasie en quelque sorte grossie à l’extrême. Et il semble bien que les dégradations esthétiques que comporte la guerre ne comptent pas pour beaucoup moins, dans notre indignation, que les atrocités qu’elle suscite.
Et maintenant combien de temps faudra-t-il encore pour que les autres deviennent pacifistes à leur tour ? On ne saurait le dire, mais peut-être n’est-ce pas une utopie que d’espérer dans l’action de ces deux éléments, la conception culturelle et la crainte justifiée des répercussions d’une conflagration future, — pour mettre un terme à la guerre, dans un avenir prochain. Par quels chemins ou détours, nous ne pouvons le deviner. En attendant, nous pouvons nous dire : Tout ce qui travaille au développement de la culture travaille aussi contre la guerre.
Je vous salue très cordialement et si mon exposé a pu vous décevoir, je vous prie de me pardonner.
Votre Sigmund Freud.
Source : Classique UGAC
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Commentaire recommandé
Merci, Les Crises, de nous fournir cette correspondance peu connue de deux « éminences grises » qui, ne l’oublions surtout pas, date de presque 100ans(88).
Pas possible de commenter sans avoir lu et relu attentivement, en tenant compte des avancées scientifiques, réalisées depuis lors, qui, entre autres sujets, démontrent l’inter-dépendance de tous les êtres vivants et imposent donc de re-penser dans un contexte plus large les notions qui y sont développées.
Car, comme le comprennent ou le pressentent nos jeunes « plus chauds que le climat », c’est le phénomène de la Vie sur terre qui est gravement en péril, menaçant ainsi, aussi, l’existence du genre humain qui cause son déséquilibre.
36 réactions et commentaires
« Si paradoxal que cela puisse paraître, force nous est d’avouer que la guerre pourrait bien n’être pas un moyen inopportun pour la fondation de la paix « éternelle », »
Oui, la paix des cimetières. Aucun doute, avec la fondation d’un Reich de mille ans, la paix en Europe aurait été assurée. Comme illustrations, l’empire romain et le royaume français. Pauvre Sigmund, il avait des lacunes dans sa connaissance de l’histoire. L’empire yankee avance exactement les mêmes arguments pour justifier son hégémonie sous une pax americana.
Reste le bug, le défaut de conception du cerveau humain, le cheval dans la locomotive dirait Koestler.
L’homme, chimpanzé plutôt que bonobo.
+8
Alerter« Il y aurait lieu d’observer, dans cet ordre d’idées, que l’on devrait s’employer, mieux qu’on ne l’a fait jusqu’ici, à FORMER une catégorie supérieure de penseurs indépendants, d’hommes inaccessibles à l’intimidation et adonnés à la recherche du vrai, qui assumeraient la direction des masses dépourvues d’initiative. »
un gouvernement mondial au main d’hommes désintéressés
FORMES
par des multi-milliardaires désintéressés
NON les masses dépourvues d’initiative n’en veulent pas
alors pourquoi pas
un SUPERORDINATEUR abreuvé de DATA qui éviterait les guerres
et dont MICROSOFT nous aurait donné le code source
contre une rente éternelle et annuel de 1 Milliard de dollars
+5
AlerterL’application du principe de pareto (80%des resultats provenant de 20% des actions) a la politique a conduit certains a qualifier et a quantifier la population en 4 categories:
– 80% de la population qui ne veut pas dominer les autres 20% de la population qui cherchent a dominer
– sur les 20% de dominants, 80% sont inefficaces et ne presentent pas de danger, 20% des 80% soit 4% de la population totale sont des dominants « efficaces » et arrivent donc a acquerir et a vouloir exercer un pouvoir reel.
-sur les 80% de « non-dominants »,20% le sont par choix et volonte active,80% le sont par incapacité ou conformisme.Donc 64% de la population suivront n’importe quel cesar ou fuhrer pour ne pas etre exclu du groupe tandis que 16% seront des « resistants » ou des « penseurs libres ».
ou agir? sur les 4% de « sociopathes efficaces » ou plutot grace a l’education sur les 64% de moutons endormis?Mais les 4% de « dictateurs efficaces » savent que la conquete et la manipulation de l’education et de l’information est un prerequis de la conquete du pouvoir…
La direction d’un societe vers la guerre ou la dictature serait donc le fait d’un combat entre les 4% de dictateurs deliberes et les 16% de « democrates conscients » tandis que 64% de moutons dorment confortablement et que 16% de bergers allemands attendent l’autorisation et la prise de pouvoir d’un fuhrer pour assouvir leur soif de pouvoir impunement.
+28
AlerterOui, Pareto et sa circulation des élites est bien trop absent des analyses. Merci d’y avoir fait référence.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Vilfredo_Pareto
+0
AlerterOui, confirmé par l’expérience de Milgram : https://fr.wikipedia.org/wiki/Exp%C3%A9rience_de_Milgram ; et de biens d’autres expériences de psychologie sociale depuis ; sans que jamais je n’aie pu lire (quelles que soient les expériences de soumission) des explications convaincantes qui nous diraient pourquoi et comment.
Mon hypothèse, c’est que le massacre systématique depuis des millénaires de tous les rebelles par les pouvoirs (quels qu’ils soient) qu’ils remettaient en cause, a de facto sélectionné une majorité d’êtres humains porteurs des gènes de la domestication, comme pour nos animaux domestiques pour lesquels c’est totalement prouvé.
C’est d’ailleurs une vraie bonne question de savoir sur quels leviers nous devrions agir pour changer ces proportions et les problèmes, semble-t-il, indépassables que cela provoque… Mais pourquoi pas sur tous les leviers simultanément ? Comme dans tous les problèmes multifactoriels, il n’y a jamais de solution unique qui pourrait tout résoudre.
+3
AlerterL’approche psychologique d’ Einstein basée sur la perception de l’évidence, se révèle bien plus pertinente que celle de Freud conditionnée par sa théorie de la névrose portée au degré d’une idéologie. L’appétit politique de puissance, le désir de puissance se déploie par l’échec de l’intégration névrotique par les pulsions érotiques. Il y a donc deux types de personnalités : les personnalités névrotiques, liées, intégrées et les personnalités narcissiques, déliées, clivées. Le destin de chaque individu se construit dans l’histoire de son développement personnel au sein de sa famille. Mais le destin de la famille est influencé par la société qui organise des passions collectives. Ainsi le capitalisme peut être compris comme une passion collective pour le profit illimité qui subsume le désir de puissance et en tire sa force. La passion personnelle de Freud pour sa « neurotica » l’a empêché d’aller au bout de sa compréhension du narcissisme qu’il a pourtant creusée. Il n’a pas compris le capitalisme et cela l’a empêché de comprendre le nazisme, puisque le premier a engendré le second. Pourtant c’était devant ses yeux. Einstein était bien plus lucide. En fait la cécité de Freud révèle en creux son propre désir de puissance à l’oeuvre dans la construction d’une passion collective autour de sa théorie de la névrose et de son école de psychanalyse.
+1
AlerterBien plus pertinente ? Je ne trouve pas. Cette « perception de l’évidence » est du domaine de la conscience. Et Einstein comprend que ce n’est pas suffisant pour espérer un succès. Il demande l’avis de Freud, qui travaille sur ses récentes théories de l’inconscient et subconscient. Théories qui viennent compléter et éclairer la compréhension de la psyché de l’être humain.
Freud donne un avis plutôt optimiste et pertinent je trouve : « La culture changera, ou canalisera, nos instincts les plus primaires »
Les deux sont tout à fait pertinents pour moi. Avec une préférence pour Freud, bien plus spécialisé dans la compréhension de la nature humaine.
+2
AlerterLa culture a-t-elle changé, canalisé les instincts les plus primaires ? Je trouve l’optimisme de Freud complètement complaisant à l’égard de la culture dominante de son époque, c’est-à-dire bourgeoise capitaliste devenue néolibérale mondialiste. Einstein s’est montré bien plus perspicace.
+0
AlerterFreud n’accordant de « psyché » (âme, ou esprit) qu’aux seuls humains, il n’a pu trouver d’explications et de définitions qu’en rapport avec cette approche limitée de la spiritualité.
Bien qu’ayant découvert cet immense continent invisible qu’est le subconscient, pourtant constitué de non-dits, il n’échappe pas à l’insupportable prétention de n’accorder de la réalité qu’à ce qu’il peut nommer.
Il me semble pourtant qu’on pourrait à présent lire son avis: « La culture changera, ou canalisera, nos instincts les plus primaires. », en remplaçant le mot « culture »(bien vu, Milsabor) par « le savoir », afin de le rendre effectivement optimiste et pertinent(comme veut l’entendre Inox).
À condition que l’intégralité du savoir soit également disponible, partagée, par tou-te-s…(par ex, les moyens de limitation des naissances, clé de la stabilisation démographique et de l’émancipation volontaire des individus), que la technologie moderne des moyens de communication/transmission permet de plus en plus, et ainsi contribue certainement aux prises de conscience salutaires.
Pour ma part, la définition de l’amour qui me semble, jusqu’à présent, la plus pertinente, « c’est l’énergie qui rapproche les êtres les uns des autres » (mais je ne sais plus qui a écrit cela, ni où je l’ai lu…)
Énergie qu’on peut considérer comme « vitale » puisque ce rapprochement conditionne la reproduction et la protection réciproque.
+0
AlerterC’est assez réducteur de s’arrêter au savoir je pense. La culture englobe beaucoup plus. On pourrait la définir comme un mode de vie commun. En essayant de ne pas être trop réducteur, un partage de savoir (en effet), de valeurs, d’émotions à travers l’art entres autres, etc…Je vois la culture comme un des moteurs de la tolérance, ingrédient indispensable pour réussir à bien vivre ensemble.
De manière plus générale, je comprends Freud de la manière suivante : C’est ensemble qu’on pourra canaliser nos instincts les plus négatifs. Et pourquoi pas les changer avec du temps (mais ça, j’y crois moyennement)
Et là je rejoins Milsabor, je pense qu’on prend un mauvais chemin avec l’individualisme exacerbé de notre époque.
+0
AlerterIl n’y a pas « la culture », mais bien DES cultures, généralement dominées par des pouvoirs (politiques, religieux, économiques…) qui s’en servent pour se maintenir.
Le savoir, c’est la connaissance de la diversité des cultures, comme de la diversité des réalités et des POSSIBILITÉS et IMPOSSIBILITÉS.
Il offre le choix, aux personnes qui y ont accès, de se conformer, ou pas, au « vivre ensemble »(forme de société) qui leur est imposé, et de relativiser, analyser, l’une ou l’autre proposition de changement.
Aujourd’hui, à part aux « documents classifiés » précieusement gardés, dissimulés, par des services de renseignements et de « sécurité » omnipotents, chacun-e de nous a quasiment accès à tout le savoir du monde… à condition de vouloir le chercher.
Ceci dit, c’est bien grâce à la « culture »(livres et cinéma) que j’ai appris, bien avant l’avènement de l’internet, que les amérindiens appelaient l’ours « frère ours ».
À moins que ce soit une légende, de celles que la culture trimballe autant que de savoirs?
+0
AlerterAie aie aie … faudrait revoir vos bases de psychologie… où passent les personnalités psychotiques ?
Par contre bravo pour l’economie et la loi de Pareto – bien vue !
+1
AlerterJe n’ai jamais appris qu’un peuple ait supplié en bloc ses dirigeants de faire la guerre.
Comme le dit Freud il y a les chefs et les sujets.
Ce sont les dirigeants qui sont en cause et comme le dit avec sagesse Einstein :
« Comment se fait-il que cette minorité-là puisse asservir à ses appétits la grande masse du peuple qui ne retire d’une guerre que souffrance et appauvrissement ? »
Et comme explication il rajoute l’essentiel :
« de puissantes forces psychologiques sont à l’oeuvre ».
Et oui, nos dirigeants sont, je dirais presque par définition, des personnes psychologiquement pas très nettes.
+12
AlerterNe pas oublier de mentionner également que le mouton à un intérêt bien compris! L’herbe verte au pré clos et protégé du loup se traduit pour sapiens par une basse besogne (pillage, répudiation de dette, de traîtrise et autres coup bas) , accomplie sur le blanc-seing accordé au maître. Il y’a là aussi le pourquoi d’une acceptation de cette mascarade de démocratie.
L’onjectif est juste le niveau de vie max et l’effort consenti minimum. Bref le beurre et l’argent du beurre … et pour le reste surtout ne pas savoir!
+2
AlerterMerci, Les Crises, de nous fournir cette correspondance peu connue de deux « éminences grises » qui, ne l’oublions surtout pas, date de presque 100ans(88).
Pas possible de commenter sans avoir lu et relu attentivement, en tenant compte des avancées scientifiques, réalisées depuis lors, qui, entre autres sujets, démontrent l’inter-dépendance de tous les êtres vivants et imposent donc de re-penser dans un contexte plus large les notions qui y sont développées.
Car, comme le comprennent ou le pressentent nos jeunes « plus chauds que le climat », c’est le phénomène de la Vie sur terre qui est gravement en péril, menaçant ainsi, aussi, l’existence du genre humain qui cause son déséquilibre.
+3
Alerter“Pourquoi la guerre ?”
La vraie question serait plutôt : « Pourquoi la cupidité, la jalousie, la vanité et la soif de puissance »…
Et la question subsidiaire est : « Pourquoi la majorité de la population se comporte comme des moutons de Panurge et suit les « élites » en bêlant jusqu’au précipice ? »
Si vous répondez à ces deux questions, vous avez la réponse à la question posée par Einstein.
+4
Alerter« Pas possible de commenter sans avoir lu et relu attentivement, en tenant compte des avancées scientifiques, réalisées depuis lors, qui, entre autres sujets, démontrent l’inter-dépendance de tous les êtres vivants et imposent donc de re-penser dans un contexte plus large les notions qui y sont développées. »
Nous ne nous en sortirons pas (ensemble en tout cas) si nous ne décidons pas de faire appel à notre autre dimension (qui n’est pas celle de notre corps animal avec son programme de survie) et qu’on peut appeler notre conscience supérieure.
D’ailleurs Einstein avait écrit :
« Un être humain est une partie limitée dans le temps et l’espace, il fait l’expérience de ses pensées et de ses sentiments comme quelque chose séparé du reste, une sorte d’illusion d’optique de la conscience. Cette illusion est pour lui une prison qui le limite à ses désirs personnels et à l’affection pour les quelques personnes de son entourage. Sa tâche est de se libérer par lui-même de cette prison en élargissant son cercle de compassion jusqu’à y inclure toutes les créatures vivantes et la nature entière dans toute sa beauté. »
Et plus concrètement pour notre sujet :
« Sans désarmement, pas de paix durable. »
+8
Alerter« Élargir son cercle de compation jusqu’ày inclure toutes les créatures vivantes »
Einstein avait suivi une formation bouddhiste ?
+0
AlerterAyant bénéficié d’une légère approche du bouddhisme il y a 40ans, je suis toujours stupéfaite de constater que la plupart des philosophes occidentaux aujourd’hui considérés et accessibles en français soient fort ignorants (dédaigneux? détournés?) des propositions formulées par cette philosophie en particulier, et par les diverses autres philosophies asiatiques en général.
Sans doute une autre illustration du sentiment de suprématie de l’homme blanc…
Ne pas négliger l’imprégnation inconsciente du dogme inscrit dans la Genèse:
« Dieu a créé l’homme à son image et à sa ressemblance », si plaisante à ceux qui ne voient pas plus loin que leur miroir.
J’ignore quand fut démontrée la notion de la « chaîne alimentaire universelle », mais on peut imaginer qu’Einstein, avec sa grande intelligence, n’eut aucune peine à établir le rapport entre cette réalité physique et la recommandation spirituelle de compassion transmise dans la tradition boudhiste.
+0
Alerter« Dieu a créé l’homme à son image et à sa ressemblance »
Petite erreur : Génèse 1:27 : « Dieu créa l’homme à son image, à son image il le créa. »
A son image, mais PAS à sa ressemblance.
Dégringolade pour nous les humains, que personne ne veut voir puisqu’on continue à croire qu’on ressemble à Dieu !
+0
AlerterMon erreur provient donc de l’enseignement de la bible traduite pour l’enfant que j’étais dans l’école primaire communale du village wallon où je vivais(en Belgique), où la religion catholique était enseignée, à l’époque(années 50) sans le moindre autre choix(changement intervenu plus tard suite à l’affirmation du mouvement pour l’enseignement de la morale laïque qui, lorsque mes enfants l’ont suivi, m’a paru fort influencé par la morale chrétienne et ses notions de « bien » et de « mal » ).
Dois-je préciser que je n’ai pas approfondi ensuite…
À noter que la France n’a pas hésité à inclure dans sa devise le mot « fraternité », également issu des religions du Livre avec son Dieu le père tout puissant, créateur de ciel et de la terre, etc…
Stupeur et rage des premiers colons sur le continent américain, lorsqu’ils entendirent les « indiens » (qui envisageaient autrement l’esprit) nommer les animaux leurs « frères »…et excellent prétexte pour massacrer ces « sauvages ».
+0
AlerterCe serait rigolo d’avoir un aperçu de la véritable pensée de Sigmund, c’est à dire sans sa dose quotidienne de coke.
Pour ce qui est de Bébert, ayant lui même apporté sa pierre à l’édifice ARME NUCLEAIRE, il devrait savoir que civis pacem para bellum, surtout dans ce règne animal que l’homme entend dominer.
A mon modeste avis la solution= une éducation et une culture non basées sur la compétition. Bref, on n’est pas sorti de l’auberge…
+3
Alerter« Lorsque l’humanité sera enfin sage,
nous passerons de la compétition dans l’individualisme
à l’individualité dans la coopération. »
Colette Magny en 1963, chanson sur l’album « Décadence «
+0
AlerterUne belle découverte, vraiment merci. Je sais pourquoi je suis fan des crises parmi quelques poncifs et pensées avariées, on y trouve aussi ce genre de trésors bien plus souvent qu’ailleurs.
Magnifique échange entre 2 génies, dont il faut apprécier chaque mot. J’imagine sans peine que si de tels esprits avaient connu la génétique, la sociologie ainsi que l’analyse systémique, actuelles, la plupart des mystères humains (dont leur singularité à être la seule espèce animale à commettre des génocides au nom des idéologies et de dogmes) seraient élucidés.
C’est en plus, plein de déductions phénoménologiques fondées que les sciences démontreront plus tard : « … Ces derniers forment la très grosse majorité ; ils ont besoin d’une autorité prenant pour eux des décisions auxquelles ils se rangent presque toujours sans réserves. »
Depuis, il y a eu l’expérience de Milgram, mais aussi la découverte génétique des gènes de la domestication (pour les animaux, mais tout indique que c’est pareil pour nous). Ces derniers ont été sélectionnés et ont perduré de facto pour devenir très majoritaires à cause des innombrables massacres et éliminations systématiques de tous les rebelles, perpétués par tous les pouvoirs (quels qu’ils soient) qu’ils remettaient en cause.
+4
AlerterBref, il y a vraiment énormément de perles dans cet échange (notamment celle concernant l’analyse que la Société des Nations n’empêcherait rien du tout… pas plus que l’ONU aujourd’hui) ; mais une m’a fait « tilter » :
« L’union du nombre doit être stable et durable. Si elle se créait à seule fin de combattre un plus puissant pour se dissoudre une fois qu’il est vaincu, le résultat serait nul. »
C’est un constat implacable et une vraie prédiction sur comment se déroule l’évolution sociétale humaine : avancées et régressions sans cesse dès que l’attention et les combats se relâchent (et sur bien des plans nous sommes en régression faute de combattants).
Mais c’est aussi la constatation que nous n’avons jamais obtenu et n’obtiendrons jamais rien sans combat.
Une vraie claque à la médiocratie qui donne juste envie d’appliquer l’article 35 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1793 (non repris dans notre actuelle Constitution) qui nous dit : « Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs. ».
Cette Constitution prévoyait, en cas de régression, le droit à la désobéissance et à la révolte, une sagesse malheureusement enterrée sous la bien-pensance bourgeoise.
Merci les gilets jaunes, j’espère à bientôt.
+5
AlerterLe passage « sociétal », la transformation, des humains cueilleurs/chasseurs/pêcheurs en agriculteurs/éleveurs fut indubitablement un moment-clé de son succès en tant qu’espèce dominatrice. À ce moment-là, ils avaient compris que nous sommes surtout des estomacs sur pattes et qu’il était plus commode de produire leur nourriture sur place(sans doute aussi l’origine de la « propriété privée ») plutôt que de courir après.
Les millénaires se succédant, ainsi que les abus dérivant de l’appropriation/exploitation/accumulation de « biens »(allant jusqu’à prétendre pouvoir posséder d’autres humains en niant leur appartenance à leur propre race), ils ont pu ainsi développer des sociétés, certes remarquables en termes de progrès(principalement la diminution de la mortalité infantile et l’allongement du temps de vie), mais inégalitaires et dévastatrices, qui nous conduisent « droit dans le mur »: appauvrissement des sols, épuisement des ressources(dont la plus indispensable:l’eau), massacre de la biodiversité(et donc rupture de la chaîne alimentaire), et enfin ce réchauffement climatique dont les scientifiques nous entretiennent quotidiennement.
De sorte que c’est l’énergie du désespoir qui se met en œuvre à présent, pour nous conseiller plus d’humilité et une nouvelle transformation, le PARTAGE, comme proposition de sauvegarde.
+0
AlerterJ’ai l’impression de n’avoir pas lu le même texte que les autres commentateurs.
La réponse de Freud est sidérante (quand on pense à l’influence qu’il a eu après la seconde guerre mondiale). Sa vision de l’homme et de la société n’est pas tellement différente de celle des nazis dont il est question dans l’autre billet de ce jour. Bien sûr, Freud plaide pour une « économie » des instincts alors que les nazis étaient plutôt dans l’idée qu’il fallait « libérer » les instincts. Mais le fondement de sa pensée est biologique et il trouve tout à fait conforme aux lois de la vie qu’une minorité (biologiquement adaptée à ça) domine une masse de moutons domestiqués…
Quand à Einstein… dans le genre adepte du gouvernement mondial et de l’ingénierie sociale, on fait difficilement mieux…
+2
AlerterIl ne faut pas confondre les niveaux auxquels Freud parle. Tout ce qu’il rapporte sur la psychologie humaine est parfaitement fondé et vérifié pour la plupart des concepts qu’ils utilisent. Une partie de notre inconscient (notamment pulsionnel) est raciste, dictatorial, violent … bref, moralement, politiquement et humainement dégueulasse (Cf. entre autres : Hannah Arendt : la « Banalité du mal »). Sa vision de l’état de soumission d’une majorité de personnes est en outre depuis très étayée par les nombreuses expériences de psychologie sociale qui le démontre.
Le nier, c’est se priver de comprendre comment modifier cela. Il propose (entre autres) la culture, mais clairement ce n’est pas suffisant, parce que certains nazis étaient (et sont toujours) des gens très cultivés.
Quant à Einstein, laissez-lui ces aspirations qui n’ont rien d’utopique. Y aura-t-il un jour une solution, entre autres et par exemple, à l’hégémonie sans partage US ? Si les États ne se coalisent pas pour former une sorte de gouvernement mondial, j’ai des doutes. Idem pour l’ingénierie sociale, je ne vois pas pourquoi vous semblez lui attribuer une valeur négative (pour certains de ses aspects manipulatoires peut-être). À un moment, il faut savoir ce qu’on veut et en tirer les conséquences, sans juger moralement les outils utilisés, du moins si c’est pour un mieux pour tous.
+2
AlerterEn ce qui concerne l’ingénierie sociale, le sujet serait trop long à développer ici. Mais globalement, c’est une boîte de Pandore qu’à mon avis on ferait mieux de ne pas ouvrir.
Concernant la vision du monde de Freud, et en particulier sa théorie de la pulsion de mort: elle est très contestée au sein même du courant psychanalytique. C’est une vision de l’âme humaine très pessimiste et surtout très matérialiste, déterministe et fondée sur le primat du biologique. Sur le plan politique, comme on le voit dans le texte, Freud n’était pas un grand démocrate. Il qualifie la volonté des communistes de redistribuer la richesse d’utopique et y voit une manifestation de la pulsion de mort ( un ferment de la destruction de la civilisation, donc). Peut-être être est-ce pour ça qu’on a tellement encensé Freud après-guerre en Occident. En URSS, je crois qu’il n’était pas très populaire (bien que de nombreux penseur aient essayé de combiner Marxisme et Freudisme).
Je ne dis pas que la pensée de Freud est nulle et non avenue. Mais il ne faut pas la prendre non plus pour parole d’évangile – ni non plus pour de la science.
+1
AlerterToutes les sciences (y compris celles qui n’en sont pas lorsqu’elles sont humaines) sont des boîtes de Pandore. Cependant dans de bonnes mains, elles ont quand même permis à l’humanité d’avancer vers du mieux. Aussi, je ne refuse pas, par principe, plus l’ingénierie sociale que les autres.
La sentence de Rabelais (« science sans conscience n’est que ruine de l’âme ») reste pour tous les domaines la base pour empêcher les dérives, les abus et les crimes (c’était d’ailleurs un cas de conscience qu’Einstein a abondamment commenté, notamment sur l’utilisation de la bombe atomique).
Je ne considère aucun penseur comme un prophète. Ça ne m’empêche pas d’en apprécier certaines clairvoyances, sans oublier de toujours les resituer dans le contexte de l’époque (de ce que l’on savait et pensait au moment où ils ont émis leurs idées).
En outre, déduire des constats de Freud qu’il ne serait pas un grand démocrate, c’est totalement abusif. C’est comme si vous disiez que tous les cancérologues qui constatent à quel point certaines dispositions génétiques favorisent le cancer sont de facto eugénistes ou pour l’euthanasie, ça n’a pas de sens. Les constats sont faits pour trouver des solutions pas pour accepter sans lutter, ou pire.
Pour info, toutes les dictatures sans exception (sauf celle opportuniste des Argentins qui tirait des micros installés dans les cabinets des psys l’essentiel de leurs renseignements) ont toujours pourchassé les psys freudiens et autres. Ça devrait vous éclairer sur la menace réelle que représente toute forme d’introspection pour toutes les dictatures et le chemin de libertés personnelles auquel chacun est libre de souscrire ou pas.
+2
AlerterBien sûr! L’injonction « connais-toi toi-même » est la base élémentaire de la sagesse(proposée dès l’antiquité comme le contraire de la folie, alors que la proposition actuelle, c’est la « normalité »).
+0
AlerterLes nazis ont cherché à récupérer Jung au début de leur règne. Avec Freud, ce n’était pas la psychanalyse qui les dérangeait, mais le fait qu’il soit juif.
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AlerterBien sûr, tous les auteurs juifs (entre autres) sont passés par l’autodafé ; mais pour Freud, il faut connaître les raisons invoquées qui les ont justifiées ; la phrase était : « Contre la valorisation excessive de la vie pulsionnelle qui dégrade l’âme, pour la noblesse de l’âme humaine ! Je jette aux flammes les écrits de Sigmund Freud. »
« Énorme », non ? Pour des nazis qui ont totalement rationalisé, libéré, donné libre cours et mis en actes les plus sombres pulsions criminelles humaines…
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AlerterOui, c’est intéressant en effet. Notamment parce que leur critique des lumières mettait en avant la prééminence de « l’instinct ». Les instincts contre la raison.
A ma connaissance leur argumentation contre Freud (et pour Jung, son ancien disciple, il faut le souligner) était fondé sur le fait que Freud selon eux était trop matérialiste (contrairement à Jung selon eux)
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Alerter« Matérialiste » ? C’est vraiment dingue. C’est à l’évidence du déni et même de la forclusion, de l’ordre des dénégations et projections des patients psychotiques qui pensent que ce sont les autres qui sont « fous », mais pas eux.
Alors que la bonne hygiène mentale ne peut advenir que si on sait intimement que nous le sommes tous.
Toutes les dictatures, toutes les croyances, tous les dogmes recèlent en eux-mêmes ce type de « problèmes » (le mot est faible) projectifs, et la raison dans ces cas-là a malheureusement déjà démontré qu’elle est totalement insuffisante, de même que la culture d’ailleurs.
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AlerterDans la lettre d’Einstein je retiens ces morceaux de phrases :
« Pour moi qui suis un être affranchi de préjugés nationaux »
« La voie qui mène à la sécurité internationale impose aux États l’abandon sans condition d’une partie de leur liberté d’action, en d’autres termes, de leur souveraineté »
Dans la lettre de Freud je retiens cette phrase :
« On ne saurait porter un jugement d’ensemble sur les guerres de conquête. Nombre d’entre elles, comme celle des Mongols et des Turcs, n’ont apporté que du malheur ; d’autres, en revanche, ont contribué à la transformation de la violence en droit, en créant de plus vastes unités au sein desquelles la possibilité du re-cours à la force se trouvait supprimée et un nouveau régime de droit apaisait les conflits, Ainsi les conquêtes romaines qui apportèrent aux pays méditerranéens la précieuse pax romana.
Les ambitions territoriales des rois de France ont créé un royaume uni dans la paix et florissant »
Les propos d’Einstein sont donc influencés par sa condition de juif « affranchi de préjugés nationaux », donc internationaliste, pensée très classique aussi de nos jours.
Sur la lettre de Freud, la comparaison qu’il fait entre les conquêtes « négatives » des turcs et les conquêtes « positives » des romains, français ou hellènes me parait révélatrice de sa personnalité.
Freud a toujours été nostalgique de l’empire austro-hongrois, c’est en ce sens qu’il faut le comprendre.
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