« Pour chaque dollar que le FMI a encouragé un ensemble de pays pauvres à dépenser en biens publics, il leur a demandé de réduire quatre fois plus les dépenses par le biais de mesures d’austérité », a estimé le groupe humanitaire.
Source : Common Dreams, Jake Johnson
Traduit par les lecteurs du site Les-Crises
Le Fonds monétaire international (FMI) insiste sur le fait que les soi-disant « planchers de dépenses sociales » adoptés dans le cadre de ses programmes de prêts aux pays pauvres et à revenu intermédiaire contribuent à protéger les services sociaux essentiels contre les types d’austérité que la puissante institution a historiquement imposés aux emprunteurs.
Mais une analyse d’Oxfam International, publiée jeudi au milieu des réunions de printemps du FMI et de la Banque mondiale, a révélé que les planchers de dépenses du Fonds – qui font partie d’une stratégie mise en œuvre en 2019 – « s’avèrent largement impuissants face à ses propres politiques d’austérité qui, au lieu de cela, obligent les pays à réduire les financements publics. »
Le groupe humanitaire a estimé que « pour chaque dollar que le FMI a encouragé un ensemble de pays pauvres à dépenser pour les biens publics, il leur a demandé de réduire quatre fois plus par le biais de mesures d’austérité. »
Les « planchers de dépenses sociales » du FMI ont encouragé l’augmentation des dépenses sociales corrigées de l’inflation d’environ 1 milliard de dollars au cours de la deuxième année de ses programmes de prêts par rapport à la première année, dans les 13 pays participants pour lesquels des données sont disponibles », a estimé Oxfam. « En comparaison, la campagne d’austérité du FMI a obligé la plupart de ces mêmes gouvernements à supprimer plus de 5 milliards de dollars de dépenses publiques au cours de la même période. »
Le rapport d’Oxfam intervient alors que les pays pauvres sont confrontés à ce que les Nations unies ont qualifié mardi de « décennie perdue », en grande partie à cause de la montée en flèche des niveaux d’endettement et des hausses de taux d’intérêt mises en œuvre par la Réserve fédérale américaine et d’autres banques centrales.
Le groupe de pression Debt Justice, basé au Royaume-Uni, a publié en début de semaine des chiffres montrant qu’en 2023, les paiements de la dette des pays à faible revenu atteindront leur niveau le plus élevé en 25 ans, mettant en péril les dépenses en matière de santé, d’éducation, d’action climatique, etc.
Dans son nouveau rapport intitulé IMF Social Spending Floors : A Fig Leaf for Austerity? [Planchers de dépenses sociales du FMI : Une feuille de vigne pour l’austérité ?, NdT] – Oxfam a analysé les données de 17 pays à revenu faible ou intermédiaire qui ont accepté des programmes de prêts à long terme avec le FMI en 2020 et 2021, années au cours desquelles le coronavirus a fait des ravages dans le monde entier.
Le groupe a constaté que les planchers de dépenses sociales du FMI étaient inefficaces pour atteindre leur objectif déclaré de préserver des niveaux minimums d’investissement social.
« D’après les données disponibles, aucun des 17 pays ne dispose actuellement d’un plancher de dépenses sociales suffisant pour couvrir le coût de la réalisation de l’objectif de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en matière de santé, sans parler des objectifs dans d’autres domaines tels que l’éducation » a constaté Oxfam. « Les planchers convenus par le FMI avec le Tchad, le Cameroun, la Jordanie et Madagascar signifient que leurs objectifs de dépenses sociales fixés dans le programme du FMI ont en fait diminué de 3 à 5 % au cours de la durée de leurs prêts. »
Amitabh Behar, le nouveau directeur exécutif intérimaire d’Oxfam International, a déclaré que « pour aggraver les choses, ces planchers sociaux sont devenus davantage des plafonds. »
« Alors que seulement la moitié des 17 pays que nous avons analysés avaient effectivement respecté leurs planchers de dépenses sociales – ce qui est assez décevant – seulement deux d’entre eux avaient dépensé 10 % de plus que ce qu’ils avaient convenu avec le FMI » a ajouté Behar.
Le nouveau rapport a été publié quelques mois après qu’une analyse distincte d’Oxfam a révélé que 13 des 15 programmes de prêts du FMI négociés au cours de la deuxième année de la pandémie de Covid-19 exigeaient « de nouvelles mesures d’austérité telles que des taxes sur les denrées alimentaires et les carburants, ou des réductions de dépenses qui pourraient mettre en péril des services publics vitaux », y compris les soins de santé.
Oxfam et Development Finance International ont estimé l’année dernière que la moitié des pays à revenu faible et moyen inférieur ont réduit la part de leur budget consacrée aux dépenses de santé au cours des deux premières années de la crise du coronavirus.
Dans son rapport de jeudi, Oxfam suggère un certain nombre d’améliorations que le FMI pourrait apporter à ses programmes de prêts afin de protéger les services publics clés des pays pauvres contre les coupes budgétaires.
« Le FMI devrait fixer des niveaux de dépenses sociales permettant au moins d’atteindre les objectifs de dépenses et les résultats sociaux définis dans les stratégies de développement des pays » a recommandé le groupe. « Il devrait s’agir d’objectifs de dépenses sociales soutenus par des cadres macroéconomiques qui permettent de progresser rapidement vers les objectifs de développement durable. »
Oxfam a également soutenu que « les planchers de dépenses sociales devraient être augmentés par des mesures progressives de collecte de revenus, en particulier différentes formes d’imposition de la richesse, plutôt que par une réaffectation des ressources ou des coupes budgétaires. »
« Si l’initiative des « planchers de dépenses sociales » conserve son urgence et sa promesse initiales, a déclaré Behar dans un communiqué jeudi, elle est minée par les pires effets de l’austérité que le FMI poursuit avec beaucoup plus d’enthousiasme. »
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Jake Johnson
Jake Johnson est rédacteur pour Common Dreams.
Source : Common Dreams, Jake Johnson, 13-04-2023
Traduit par les lecteurs du site Les-Crises
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Commentaire recommandé
« Pour chaque dollar que le FMI a encouragé un ensemble de pays pauvres à dépenser en biens publics, il leur a demandé de réduire quatre fois plus les dépenses par le biais de mesures d’austérité »
Le FMI reste le temple du capitalisme, on ne peut donc pas attendre de cette institution qu’elle remette en cause ses propres dogmes : un État social tous les jours un peu moins disant, une marchandisation qui touche tous les domaines, une économie toujours plus ouverte à la concurrence, le recours à l’endettement massif encouragé. La fin du politique, en quelque sorte.
5 réactions et commentaires
Pourquoi qualifier de « fiasco » ces mesures d’aides au « développement » économique, alors que la contrepartie exigée par le FMI consiste « justement » à demander aux États emprunteurs d’appliquer des politiques d’austérité?
Dans son rapport, OXFAM ne fait que valider les objectifs de rigueur imposés par le FMI. Comme on peut le constater depuis des décennies, ces prêts alimentent grassement une classe dirigeante cupide au détriment des populations. La mise en avant d’intentions sanitaires, éducatives et environnementales dissimule en fait la véritable destination de ces fonds, à savoir, le renforcement d’un système de domination reposant sur la police, l’armée, la justice et la démocratie.
Seules les entreprises d’armement et les banques, toutes occidentales, profitent de l’idéologie libérale du ruissellement.
Dans leur rôle de bonne conscience occidentale, Oxfam et toutes les ONG consorts entretiennent ce mythe auprès d’une opinion publique lassée de ces dénonciations récurrentes.
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Alerter« Pour chaque dollar que le FMI a encouragé un ensemble de pays pauvres à dépenser en biens publics, il leur a demandé de réduire quatre fois plus les dépenses par le biais de mesures d’austérité »
Le FMI reste le temple du capitalisme, on ne peut donc pas attendre de cette institution qu’elle remette en cause ses propres dogmes : un État social tous les jours un peu moins disant, une marchandisation qui touche tous les domaines, une économie toujours plus ouverte à la concurrence, le recours à l’endettement massif encouragé. La fin du politique, en quelque sorte.
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Alerter@Lt Briggs,
Une diminution du salaire minimum et des indemnités chomage, une réduction du montant des retraites et une augmentation de la durée de cotisation, la vente a vil prix du bien commun, la privatisation des services publics, l’augmentation des taxes que paient les plus pauvres pour réduire les impôts que paient les plus riches. Le résultat prévisible : Destruction du tissu économique locale, augmentation du cout des services essentiels, chute de la consommation et réduction des rentrés fiscales. Amplification de l’optimisation fiscale agressive et de la fraude fiscale. L’aggravation de la malnutrition, de la mendicité et de la prostitution. Réduction de l’espérance de vie et hausse de la mortalité infantile, l’exode des forces vives du pays, notamment des jeunes diplômés, le renoncement aux soins essentiels et hausse de la criminalité et des suicides. L’esclavage par la dette perpétuelle, la mise sous tutelle du pays et la fin de l’espoir. Bienvenue dans le monde merveilleux du néolibéralisme. Bientôt sur vos écrans, en France.
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AlerterUn jours, il faudra quand même bien se demander comment ces institutons mondiales font pour encore ètre perçus comme des instrument apolitiques et non partisans… et ce-faisant, en quoi ils sont légitimes.
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AlerterC’est Poutine je crois qui suggérait une remise à plat de l’ensemble de ces institutions internationales c’est peut être pourquoi il lui font la guerre..
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