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30.mai.202330.5.2023
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Vers quel nouvel ordre mondial ? La fin de la domination étasunienne et ses conséquences, par Jacques Sapir

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Il devient de plus en plus évident que nous sommes aujourd’hui à l’aube d’un nouvel ordre mondial. Les transformations qui ont affecté les rapports de force géostratégiques, mais aussi les rapports de forces économiques et les règles et pratiques du commerce international l’attestent. L’ordre mondial issu de la fin de la Guerre Froide en 1991, et qui était marqué par une domination sans partage de l’Hyper-Puissance américaine[1], s’est progressivement fragmenté. Mais, ce qui naitra de cette fragmentation n’est pas encore pleinement défini.

Cette fragmentation peut se solidifier en une nouvelle Guerre Froide tout comme pourrait apparaître d’ici quelques années nouvel ordre mondial q plus respectueux des droits des Nations, plus centré sur les problèmes communs de ces nations, problèmes qui vont de la sauvegarde de l’environnement au développement social et économique qui reste à accomplir dans de nombreux pays, et enfin mieux compatible avec l’émergence d’un contrat social de progrès au sein de chacun d’entre eux. Tel est sans doute le défi le plus important que nous aurons à affronter dans ces prochaines années.

(Cette note est issue d’un projet d’article qui a été soumis à la revue russe Economic and Social Changes: Facts, Trends, Forecast / Экономические и социальные перемены: факты, тенденции, прогноз et qui sera, après révisions, publiés dans le n°4/2023)

Ces problèmes seront alors, dans l’article qui suit, abordés en commençant par rappeler ce qu’est un ordre mondial, en quoi l’ordre mondial dominant depuis 1992 avait commencé à se fragmenter à partir de la crise financière de 2008-2010, et comment les chocs successifs – chocs allant de la pandémie de la COVID-19 à la nouvelle situation géostratégique qui se déploie depuis février 2022 – ont accéléré cette fragmentation mais ont aussi dessiné les contours d’un nouvel ordre mondial. Les conséquences que cela peut avoir sur la forme et le contenu du contrat social, autrement dit la dialectique entre les facteurs externes et les facteurs internes de changement, seront alors précisées. Ces facteurs iront-ils dans un sens de progrès social ou vers celui d’une régression ? Cette question doit aussi être posée. Cela permettra alors de tenter de conclure en cherchant à préciser si nous sommes bien aujourd’hui en présence de ce que l’on pourrait appeler un moment mondial de pivotement des grands équilibres.

0. Qu’est-ce qu’un ordre mondial ?

L’expression « changement de l’ordre mondial » est incontestablement largement utilisée depuis la fin de février 2022[2]. Mais, qu’est-ce que recouvre cette expression « ordre mondial » ? Elle a une longue histoire qui s’enracine dans l’histoire des relations internationales et fut employée par des personnages aussi différents que J.M. Keynes[3], G. Bush[4] ou la philosophe Hannah Arendt[5].

De fait, c’est avec l’idée d’une institutionnalisation des relations internationales que nait la notion d’un ordre mondial. Cette institutionnalisation doit être rattachée à Hugo de Groot dit Grotius qui, au début du XVIIème siècle va révolutionner la vision du Droit en l’appliquant à des personnes morales, autrement dit des États[6]. Avant Grotius, les droits étaient essentiellement tout perçus comme rattachés à des objets. C’est lui qui introduit une notion de droits comme appartenant à des personnes[7], qu’elles soient morales ou physiques, signifiant alors l’expression d’une capacité d’agir ou les moyens de réaliser telle ou telle chose. De cette manière de voir découle l’idée d’une société unique d’États qui serait régie non par la force ou la guerre[8], mais par des lois effectives et par un accord mutuel visant à faire respecter la loi[9].

On retrouve d’ailleurs cette notion chez Vico au-début du XVIIIe siècle[10]. C’est donc entre la fin des Guerres de Religion et l’émergence de ce que l’on appelle la « période classique », qu’émerge progressivement cette idée du droit international et par conséquent d’un ordre mondial[11]. Ces idées se retrouveront dans le Traité de Westphalie[12], en cela que ce Traité vaut reconnaissance du principe d’égalité des États et de celui de souveraineté tant externe qu’interne, et, plus tard, au XIXe siècle, dans le Congrès de Vienne de 1815[13]. Cependant, à l’époque, cet ordre n’était mondial que dans la mesure où les puissances européennes se définissaient comme « monde ».

Les idées et les notions utilisées par Grotius vont connaitre une nouvelle jeunesse entre la fin du XIXème siècle et les tentatives pour limiter la violence dans les conflits armés[14], et le premier conflit mondial avec le Traité de Versailles[15] et la naissance de la SDN en 1920[16]. On le sait, nombre d’idées contenues dans la charte de la SDN furent par la suite reprises en 1944-45 dans celle des Nations-Unies[17]. Ces notions trouvèrent rapidement leur point d’application dans le commerce international, les questions monétaires et l’économie en général comme en témoigne la citation de Keynes qui est faite dans le contexte s’un projet de Banque Centrale internationale. Les accords de Bretton-Woods en 1944[18], accords qui conféraient à l’Union soviétique une place d’observateur, puis le Traité de la Havane[19], hélas mort-né, et la création du GATT, en portent témoignage. On peut donc considérer que, derrière l’expression d’ordre mondial, il y a l’ensemble des rapports de force entre les États, rapports de force qui sont à la fois institutionnalisés et déterminés par des règles du droit international.

La notion d’ordre mondial s’applique parfaitement à un système institutionnalisé des relations internationales[20]. On conçoit que l’application de règles, que l’on regroupe sous le terme de droit international, soit une meilleure chose que l’application de la force nue. Encore faut-il, néanmoins, que ces règles soient appliquées de manière égale à tous les pays et qu’un pays ne décide pas de lui seul, de créer de nouvelles règles sans concertation avec les autres Nations. Cela fut rappelé par Vladimir Poutine le 10 février 2007 lors de son discours à la conférence de Munich sur la sécurité[21]. C’est aujourd’hui la position de l’Inde face à ce qu’elle perçoit comme l’application d’un « double standard » concernant la position de la Russie[22].

De plus, un ordre mondial polarisé par une grande puissance, la Grande-Bretagne avant 1914 et les États-Unis depuis 1945 et en particulier depuis 1991, pose le problème des relations entre pays dominants et pays dominés. Un tel ordre mondial n’a jamais été égalitaire entre les nations concernées, et c’est en particulier le cas pour l’ordre économique international incarné par l’OMC[23]. Il a défavorisé les pays anciennement colonisés (ou créés par la colonisation) et globalement les pays peu industrialisés[24]. De fait, cet ordre mondial a résulté de l’entente des pays riches et puissants[25].

Il n’est pas étonnant qu’il fût contesté. Il a connu de multiples incarnations. L’ordre international de 1944-45 n’est déjà plus celui qui prévaut de 1949 au début des années soixante, quand il se replie sur les pays alliés des États-Unis et exclu, de fait, l’URSS, la Chine, et l’ensemble des pays communistes. Il change encore au début des années 1970 quand les États-Unis imposent le principe des taux de change flottants[26]. De fait, avec la décomposition des accords de Bretton-Woods, la notion de système monétaire international puis d’ordre monétaire international fait son entrée, comme l’une des formes d’un ordre international plus général. Cela entraine une focalisation sur le rôle du dollar des États-Unis[27].

L’idée d’une émergence d’un « nouvel » ordre mondial, différent tant de celui issue de 1945 et de la guerre froide, que de la domination des États-Unis d’Amérique à la suite de l’effondrement de l’URSS, se fait jour depuis le début des années 2000[28]. Cet ordre mondial ne serait plus polarisé par un, ou un petit nombre, de pays. Il serait, dans le sens le plus complet du terme, multipolaire. Sans doute, le premier à en avoir parlé fut John Maersheimer[29]. L’idée s’est progressivement affirmée que l’ordre mondial, tel qu’il s’était reconstitué depuis la fin de l’URSS sous la domination des États-Unis, a été mis en cause par la montée en puissance des économies émergentes[30]. Avec cette idée est aussi apparue la notion qu’un conflit entre les États-Unis et la Chine était possible, puis à craindre, voire inévitable[31]. L’ordre mondial s’est enfin trouvé partagé entre trois pôles pour ceux qui espéraient que l’Europe puisse avoir un rôle[32].

1. Les évolutions du commerce international depuis la crise financière de 2008-2010 et l’apparition de la fragmentation

L’ordre mondial a, on l’a dit, toujours été le reflet des rapports de force. En particulier dans sa dimension d’ordre économique mondial il n’a pas reflété seulement les différences de richesses entre les nations, mais aussi leur pouvoir géostratégique implicite ou explicite. Les États-Unis avaient émergé, au début des années 1990, du fait de la disparition de l’Union soviétique, comme la puissance hégémonique détenant une forme d’imperium mondial[33]. Les États-Unis disposaient, en ce début de la dernière décennie du xxe siècle, d’une totale suprématie, tant militaire qu’économique, tant politique que culturelle. La puissance américaine rassemblait alors la totalité des caractéristiques du « pouvoir dominant », capable d’influencer l’ensemble des acteurs sans avoir à user directement de sa force après la démonstration qu’elle venait de fournir, et surtout d’établir son hégémonie sur l’espace politique international, en particulier en imposant ses représentations explicites et implicites ainsi que son discours[34].

Pourtant, cette hégémonie, qui se traduit aussi par l’adoption généralisée de règles de libre-échange avec le passage du GATT à l’OMC en 1994[35], va se déliter progressivement devant des crises financières que les États-Unis ne sauront et ne pourront contrôler, des échecs militaires (en Iraq et en Afghanistan), et l’émergence rapide de nouvelles puissances (Chine, Inde, Brésil mais aussi désormais Indonésie et Turquie) ou d’anciennes ayant su se réinventer (la Russie)[36].

La crise financière de 2008-2010, que l’on surnomme « crise des subprime » fut un moment important dans la remise en cause de l’ordre mondial qui était apparu en 1991-1992, tout comme elle fut un ébranlement majeur dans l’ordre économique[37]. Mais, ce ne fut pas le seul. La crise financière dite « crise asiatique » de 1997-1998, et qui marque à la fois le début du rôle international de la Chine[38] mais aussi le début de la reconstruction de la Russie[39], la préfigure largement[40].

En fait, cet ordre mondial qui s’apparentait à une Pax Americana[41] se décompose rapidement tant du fait des incapacités et des erreurs commises par les dirigeants des États-Unis que de la montée en puissance d’autres puissances. La globalisation, qui avait été acceptée comme cadre unique des activités économiques, commence en réalité à se déliter et à être remise en cause dès avant la crise de 2008-2010[42], un délitement qui s’accélèrera naturellement à la suite de cette crise[43].

Figure 1

Source : IMF, World Economic Outlook (April 2023) database

De fait, si l’on compare les pays qui forment aujourd’hui les BRICS au groupe du G-7, on constate que leur part dans le PIB mondial (calculé en PPP) est respectivement de 46% et 16% en 1992.

Encadré 1

Pays du G-7 Pays des BRICS
Canada

France

Germany

Italy

Japan

United Kingdom

United States of America

Brazil

China

India

Russia

Republic of South Africa

Pays considérés comme des « alliés » des pays du G-7 Pays ayant demandé leur adhésion aux BRICS
Australia

Austria

Belgium

Greece

Hungary

Ireland

South Korea

Netherlands

New Zealand

Norway

Poland

Portugal

Romania

Singapore

Spain

Sweden

Algérie

Argentine

Arabie saoudite

Bakreïn

Egypte

Emirats arabes unis

Indonésie

Iran

En 2008, quand se déclenche la « crise des subprime », cette part est passée à 36% pour le G-7 et 24% pour les BRICS. Quand surviendra la pandémie de la COVID-19, en 2020, pays du G-7 et BRICS seront à égalité avec 31%. Si l’on regarde maintenant la part respective du groupe G-7 et « alliés » et celui des BRICS et pays identifiés ayant officiellement demandé en 2023 leur adhésion aux BRICS[44], l’évolution est encore plus saisissante. La part est de 58% et 25% du PIB mondial en 1992 ; elle passe à 41% et 39% en 2020. La transformation des rapports de force économique est une réalité, à la fois évidente et massive, sur les trente dernières années. Elle signe, en réalité, la fin d’un ordre économique trop exclusivement centré sur les pays occidentaux.

Cet ordre économique s’appuyait sur un ordre social à l’intérieur de ces pays. La globalisation avait permis la mise en place d’un contrat social particulier à partir des années 1980-1990. En échange de salaires faibles, « justifiés » par une inflation basse induite par la concurrence mondiale issue de l’ouverture des économies à la suite des accords de libre-échange qui se sont multipliés avec la transformation du GATT en OMC en 1994 (et en Europe du « marché unique »[45]) mais aussi imposés par un chômage élevé[46] (alimenté par des flux d’immigration), les classes populaires des pays développés se voyaient offrir des produits de consommation à faible coûts issus des pays nouvellement industrialisés[47]. Cela permettait de rendre le système supportable, en dépit d’une forte montée des inégalités sociales[48] induite par la domination de la sphère financière et des activités associées[49]. Le développement rapide de la sphère financière depuis la fin des années 1990 a engendré un système rentier d’une nature particulière[50] qui prélève une grande partie de la valeur créée dans les activités productives.

Cette situation, et la montée de la distorsion dans la répartition des revenus, entraine alors une tendance à la disparition des classes moyenne[51], et à la relégation territoriale de ces anciennes classes moyennes déchues[52]. La destruction programmée d’une grande partie de l’industrie, à l’exception de certains secteurs qui étaient plus ou moins préservés, alimentait ce chômage, forçait ces économies à une tertiarisation accélérée et induisait des changements sociaux qui aboutissaient à fragmenter la société, aboutissant à ce qu’un sociologue a appelé une « société archipelisée »[53] et à réduire ses capacités de résistance face à ces changements. Les mouvements de protestations qui en ont résulté, des « gilets jaunes »[54] au mouvement contre la réforme des retraites en France, le Brexit au Royaume-Uni et l’élection de D. Trump aux Etats-Unis[55], témoignent de la crise sociale induite par ce modèle de développement. Le fait que le Brexit ait provoqué un début de reconfiguration politique en Grande-Bretagne[56], qui a abouti à la victoire écrasante de Boris Johnson lors des élections de fin 2019[57], en est un bon symptôme. La violence de la répression policière, en particulier dans le cas du mouvement des « gilets jaunes »[58], indique bien aussi à quel point l’ordre social interne a été mis en cause par ce mouvement.

Les changements que l’on a décrits à l’échelle internationale reflètent mais aussi remettent naturellement en cause ce pacte social. Désormais, s’il n’est pas faux de parler de de-globalization du monde, cette dernière doit aussi se comprendre comme une de-occidentalisation de ce dernier[59].

Ce processus de de-globalization ne se limite pas à la simple puissance des économies. Il implique une mise en cause progressive des règles de l’OMC et du libre-échange généralisé. Cette mise en cause peut apparaître comme une mise en cause du multi-latéralisme. La crise du système commercial multilatéral est en réalité profonde et elle traduit la remise en cause de l’ordre économique international[60]. Ainsi, l’OMC se trouve concurrencée par des accords bilatéraux, régionaux et méga-régionaux, y compris en matière de règlement des différends, pour lesquels sont prévus des mécanismes d’arbitrage. Il semblerait que l’OMC n’arrive pas à s’adapter au nouveau contexte de la conduite des politiques économiques alors qu’elle est « sommée de se réinventer »[61]. C’est là, en réalité, que l’on mesure les limites de la tentative d’imposer une forme d’ordre mondial par des règles qui, à un moment, ne sont plus supportables par des groupes de pays[62]. Dans le même temps, la part des pays des BRICS dans le commerce international ne cessait de monter.

Figure 2

Source : WTO https://www.wto.org/english/res_e/statis_e/merch_trade_stat_e.htm

Il faut aussi constater que les pays des BRICS restent largement sous représentés, que ce soit par rapport à leur part dans le PIB mondial ou à celle dans le commerce mondial, dans les organisations internationales, un fait qui ne peut qu’affaiblir la légitimité de l’(ancien) ordre mondial.

Table 1

Parts des BRICS dans les principales organisations internationales

World Bank IDA MIGA IMF SDR Quota
No. of votes % of total No. of votes % of total No. of votes % of total No. of votes % of total Millions % of total
Brésil 54,264 2.11 478,0 1.66 2,83 1.3 111,9 2.22 11,0 2.32
Russie 67,26 2.62 90,65 0.31 5,752 2.64 130,5 2.59 12,9 2.71
Inde 76,777 2.99 835,2 2.89 1,218 0.56 132,6 2.63 13,1 2.76
Chine 131,426 5.11 661,0 2.29 5,754 2.64 306,3 6.08 30,5 6.41
RAS 18,698 0.73 74,37 0.26 1,886 0.86 32,0 0.63 3,1 0.64
Total 348,425 13.56 2,139,1 7.41 17,44 8.0 713,2 14.15 70,6 14.84

IDAL, International Development Association; MIGA, Multilateral Investment Guarantee Agency

Source: Liu Z.. & Papa M., “Can BRICS De-dollarize the Global Financial System” in Elements in the Economics of Emerging Markets, Cambridge University Press, January 2022, Table 5, p. 56.

Mais, cette remise en cause du multilatéralisme a été initiée, en réalité, par l’un des pays qui avaient le plus fait pour l’imposer : les États-Unis. La mise en place de diverses mesures, comme le Foreign Corrupt Practices Act, loi votée en 1977[63] mais qui a pris toute son importance avec une modification de 1998 et son application agressive à partir des années 2000[64], et le Foreign Account Tax Compliance Act de 2010, a été considérablement aggravée par la décision des autorités américaines de considérer que tout usage du Dollar faisait tomber automatiquement les sociétés étrangères sous le coup de la loi américaine.

C’est ce que l’on appelle le principe de l’extraterritorialité. Un rapport parlementaire sur ce problème a d’ailleurs été rédigé en 2016[65]. Le problème principal vient de ce que les transactions qu’il s’agissait d’honorer sont des contrats passés en dollars. Or, dans ce cas, les transactions ont nécessairement besoin de transiter par une banque américaine pour « acheter » des dollars, tombant alors sous le coup de la loi américaine. Des sociétés française (Alstom[66], Technip) et des banques (BNP-Paribas, puis Crédit Agricole et Société Générale) ont été condamnées via ces procédures.

Ces mesures se sont poursuivies sous l’administration de Donald Trump. Par ailleurs, en 2014, L’Union européenne s’est ralliée à une politique de sanctions économiques contre la Russie et n’a pas réagi dans les faits aux sanctions décidées par les Etats-Unis contre l’Iran[67]. Par cette politique des « sanctions économiques », que ces dernières visent Cuba, l’Iran, la Russie ou le Venezuela, les Etats-Unis, et l’Union européenne[68] ont donc accéléré le phénomène de la démondialisation.

Le retrait américain de l’accord de Vienne avec l’Iran (le Joint Comprehensive Plan of Action[69]), n’a pas exclusivement visé à isoler l’Iran par le biais de sanctions économiques. Par crainte de représailles du fait de l’application extraterritoriale du droit américain, la dénonciation de cet accord a permis de frapper la France et l’Allemagne. Hormis l’Italie et la Grèce, qui ont directement négocié avec les États-Unis en contournant Bruxelles, aucun autre État européen n’a pu à ce jour bénéficier des exemptions américaines sur les exportations iraniennes de pétrole. Ce retrait unilatéral a engendré des répercussions économiques lourdes pour les entreprises européennes et en particulier françaises tel que PSA, Renault, Total et Airbus[70].

En montrant donc que les échanges, et les normes qui leurs sont liées, pouvaient être interrompus pour des raisons essentiellement politiques, Les Etats-Unis ont apporté la démonstration que ces échanges et ces normes correspondaient moins à un ordre mondial qu’à la politique des États-Unis[71]. Une note de la DGSI[72] établit ainsi que « « les entreprises françaises évoluant dans ces secteurs (il s’agit des secteurs à haute technologie comme l’aéronautique, la santé la recherche) font l’objet d’attaques ciblées, notamment par le biais de contentieux juridiques, de tentative de captation d’informations et d’ingérence économique »[73].

Enfin, l’ordre international s’est aussi délité dans le domaine monétaire. Celui-ci reposait, depuis la fin des accords de Bretton-Woods en 1973, sur un système que l’on peut qualifier d’étalon-dollar[74] et qui a rapidement soulevé de nombreuses critiques[75]. Ce système a toujours été dysfonctionnel[76], mais ceci est devenu évident au début des années 2000[77]. La création de l’EURO en 1999 n’avait pas modifié cette situation[78], dans la mesure où la part de l’EURO dans les réserves des différentes Banques Centrales n’avait pas dépassé la somme des parts des monnaies des pays qui avaient adoptés cette monnaie unique. Cette part, après avoir connu un mouvement la rapprochant de la somme des monnaies européennes existantes avant l’Euro, a d’ailleurs connu une baisse assez importante à partir de 2010. La part de l’US dollar a elle aussi baissé, mais elle restait supérieure à 60% avant la crise de la COVID-19.

Figure 3

Source : IMF, COFER, https://data.imf.org/?sk=E6A5F467-C14B-4AA8-9F6D-5A09EC4E62A4

Si tant le Dollar que l’EURO baissait, cela était dû à la montée des « autres monnaies » utilisées comme réserves par les banques centrales. Il était donc clair, et cela dès 2010, que l’on était en présence d’une tendance à la fragmentation du système monétaire international, tendance en partie induite par des raisons de sécurité géopolitiques[79]. Mais, cette tendance était lente. Pour des raisons institutionnelles, comme son utilisation massive comme unité de compte sur de nombreux marchés de matières premières, comme pour des raisons d’opportunité pratique[80], le dollar restait encore, à la veille de la pandémie, la monnaie dominante du système monétaire international[81].

2. Le choc de la COVID-19 et le bouleversement de la situation géopolitique

Ces tendances, qui étaient discernables dès la fin des années 2010, et en particulier la fin de ce que certains auteurs ont appelé l’hyper-mondialisation[82]. Elles ont cependant acquis une nouvelle réalité entre 2020 et 2023.

Dans les trois ans et demi qui nous séparent du début réel de la pandémie, le monde a subi une série de chocs sanitaires, économiques et géopolitiques sans pareils. Les conséquences n’en seront complètement perçues que d’ici la fin de la décennie. Les ruptures multiples des chaînes logistiques alimentant la production, du fait des confinements liés à la COVID-19[83], ont mis à mal une économie mondialisée et provoqué une prise de conscience dans de nombreux pays de la vulnérabilité découlant de ces chaînes. Ces ruptures semblent avoir eu un plus grand effet en 2021 dans des économies où l’appareil industriel était important (Allemagne) que dans des économies où la part des services était plus grande[84]. Deux auteurs de la banque BNP-Paribas ont ainsi pu écrire :

« …la pandémie de Covid-19 a, une fois de plus, mis en évidence que, dans certains secteurs clés comme les équipements informatiques, les semi-conducteurs et les produits pharmaceutiques, l’économie mondiale est devenue très dépendante de l’Est et du Sud-Est asiatiques. Dans ces régions, des clusters industriels ont été créés pour exploiter des économies d’échelle. Cependant, dans le cadre de cette recherche de sites industriels appropriés, les entreprises n’ont pas accordé une attention suffisante à la sécurité de la chaîne d’approvisionnement et à d’autres sujets de préoccupation comme les aspects environnementaux et géostratégiques. Cela s’est traduit par une fragilisation des chaînes d’approvisionnement, du fait de l’absence de fournisseurs de substitution en dehors de ces clusters »[85].

Naturellement, les nouvelles sanctions prises à l’égard de la Russie à partir de la fin février 2022 ont provoqué de nouveaux chocs. Ces sanctions sont venues s’ajouter à celles qui étaient pratiquées depuis 2014/2015[86]. Les nouvelles sanctions ont eu un volet monétaire et financier (interdiction de fournir des devises occidentales à la Banque Centrale de Russie, exclusion de certaines banques russes du système SWIFT[87]), et un volet commercial s’apparentant à un embargo[88].

Outre la forte réduction du commerce entre les pays de l’Union européenne et la Russie, ces sanctions ont abouti à segmenter le commerce mondial entre pays appliquant les sanctions, comme les États-Unis, le Canada, les pays de l’Union européenne, Le Japon, la Corée du Sud, Singapour, l’Australie et la Nouvelle-Zélande et les pays se refusant à les appliquer tels la Chine, l’Inde, l’Indonésie, la Malaisie, les pays du Moyen-Orient (dont la Turquie, pourtant membre de l’OTAN), les pays d’Afrique et la majeur partie des pays d’Amérique latine. Si le discours sur « l’isolement » de la Russie semble bien être un fantasme de l’Occident[89], la segmentation du commerce mondial est, elle, une réalité. Par ailleurs, et ceci dès avant les sanctions, la Russie avait, semble-t-il, pris ses précautions devant la menace de nouvelles sanctions[90].

Les sanctions, et la segmentation rampante du commerce international que ces dernières ont induite, ont provoqué des conséquences non négligeables sur la croissance mondiale. Outre l’accélération de l’inflation, engendrée au départ par la crise de la COVID-19, elles ont accru le décalage entre les pays émergents et en développement, et en particulier ceux d’Asie et les pays développés. Les pays de l’Union européenne apparaissent ainsi notoirement à la traine[91]. Non seulement ont-ils subi un choc à la suite de la pandémie de la COVID-19 plus important, et ceci en dépit d’aides publiques qui ont pu être considérables[92], mais leur rétablissement économique a été moins rapide. Les bouleversements géopolitiques qui affectent le monde depuis février 2022 ont entraîné une croissance plus réduite, et ceci se voit en particulier sur les prévisions faites pour 2023 et 2024.

De ce point de vue, l’application des sanctions a eu des effets délétères aux moins aussi grands sur les économies ayant décidé de ces sanctions (et en particulier celles de l’Union européenne) que sur le pays visé, la Russie[93].

Table 2

Taux de croissance du PIB des principaux groupes de pays depuis la pandémie de la Covid-19

2019 2020 2021 2022 2023 2024
Monde 2,80% -2,80% 6,30% 3,40% 2,80% 3,00%
Économies développées 1,70% -4,20% 5,40% 2,70% 1,30% 1,40%
dont : Union européenne 2,00% -5,60% 5,60% 3,70% 0,70% 1,60%
Dont : Zone EURO 1,60% -6,10% 5,40% 3,50% 0,80% 1,40%
Etats-Unis 2,30% -2,80% 5,90% 2,10% 1,60% 1,10%
Japon -0,40% -4,30% 2,10% 1,10% 1,30% 1,00%
Économies émergentes et en développement 3,60% -1,80% 6,90% 4,00% 3,90% 4,20%
dont :
Asie émergente 5,20% -0,50% 7,50% 4,40% 5,30% 5,10%
Europe émergente 2,50% -1,60% 7,30% 0,80% 1,20% 2,50%

2023 and 2024 are forecasts. 2022 are estimates.

Source: IMF, World Economic Outlook, Appendix A,

https://www.imf.org/en/Publications/WEO/Issues/2023/04/11/world-economic-outlook-april-2023#statistical

Figure 4

Source: Currency Composition of Official Foreign Exchange Reserves (COFER), International Financial Statistics (IFS). Data extracted from http://data.imf.org/

Ceci se traduit aussi par une accélération des évolutions concernant les monnaies. Le US dollar semble accélérer son déclin dans la part des réserves des Banques centrales. De fait, les tendances à la dédollarisation du commerce international[94], et en particulier le projet d’une monnaie commune des BRICS[95], semblent avoir été induites par l’instrumentalisation politique du US dollar[96] ainsi que par le gel des avoirs de la Banque centrale de Russie, même si – sur ce dernier point – des incertitudes importantes existent dans l’Union européenne.

Il convient de noter que ce processus n’a pas fondamentalement profité à l’EURO mais bien plus à l’ensemble des « autres monnaies », dont le Yuan convertible, le Franc Suisse ou la Livre Sterling. De fait, nous sommes bien en présence d’un mouvement de remise en cause du système monétaire international, autrement dit de l’ordre mondial monétaire.

Figure 5

Source: Currency Composition of Official Foreign Exchange Reserves (COFER), International Financial Statistics (IFS). Data extracted from http://data.imf.org/

La crise de l’ordre mondial datant de 1992 est devenue une évidence avec la crise provoquée par la COVID-19 et les bouleversements géostratégiques qui se sont produits à partir de 2022. L’économiste en chef de la Banque Mondiale, Mme Carmen Reinhart, l’a elle-même reconnue : « La Covid-19 est de dernier clou dans le cercueil de la mondialisation »[97]. Elle n’est pas la seule. M. Kemal Dervis, dans une tribune publiée en juin 2020 par la Brookings Institution, l’un des plus célèbres « think tank » du Parti démocrate ajoutait : « La catastrophe de la COVID-19 ayant mis à nu les vulnérabilités inhérentes à une économie mondiale hyperconnectée et du juste à temps, un retrait de la mondialisation semble de plus en plus inévitable. Dans une certaine mesure, cela peut être souhaitable »[98]. Cette déclaration est significative, car la Brookings a été un des centres d’influence qui ont le plus œuvré pour la mondialisation ou la « globalisation ».

Certains attiraient l’attention sur ce phénomène dés avant la crise sanitaire comme celui d’Harold James, écrit pour l’anniversaire de la crise de 2008[99]. Ce même Harold James, professeur d’histoire et de relations internationales à l’Université de Princeton, avait parlé aussi du « défi global» que représente cette démondialisation[100]. En 2022, Joseph Stiglitz pointait du doigt les phénomènes de « re-shoring » et de « friendly-shoring », des phénomènes qui témoignent d’un processus de fragmentation et de déglobalisation, en montrant comment ils peuvent apparaître comme une réponse aux erreurs de la globalisation[101]. Dans son discours d’octobre 2022 à l’Université de Georgetown (Washington DC) Mme Kristalina Georgieva, la Présidente du FMI, prenait acte de ces transformations[102]. Le paradigme du Libre-Échange a volé en éclats[103]. Le retour du protectionnisme, qui avait commencé à se manifester ouvertement avec la crise de 2008-2010[104], tend – du fait des sanctions et des contre-sanctions – à s’accélérer.

Nous sommes dorénavant en présence d’un risque clair d’une segmentation du monde entre ce que l’on pourrait appeler un « Occident collectif » et un « Sud collectif »[105]. Ce dernier tend à se structurer autour des BRICS, ce que l’on mesure en termes de demandes d’adhésion, mais aussi – et ceci est moins remarqué – autour de l’OCS[106]. Même si cette opposition est inévitable du fait du comportement de pays comme les États-Unis ou la Grande-Bretagne, dont l’ancienne Première-ministre Mme Truss a en effet appelé à constituer le G-7 en une OTAN économique[107], ce qui ne peut qu’apparaître comme une tentative désespérée des anciens dominants de faire survivre leur domination. Mais, on ne peut se satisfaire de cette situation qui est clairement sous-optimal en ce qui concerne le traitement des questions de sauvegarde de la planète et d’égal développement. Si un nouvel ordre mondial finira bien par émerger, il est possible qu’il soit, parce que multipolaire, bien moins inégalitaire que celui auquel il succèdera.

3. Quelle évolution pour le contrat social interne des pays ?

Les changements dans l’ordre mondial auxquels on a assisté depuis la fin de 2019 ont signifié la fin du contrat social implicite qui dominait dans les pays développés. Cela s’est traduit par une forte montée des prix[108], largement due à la rupture des chaînes mondiales d’approvisionnement[109] et, secondairement, aux conséquences des sanctions économiques et des perturbations qu’elles ont entraînées dans le commerce mondial. Mais, on a aussi assisté à une prise de conscience, plus ou moins rapide et plus ou moins importante selon les pays considérés, que la poursuite du modèle de croissance lié à la désindustrialisation n’était plus possible[110]. Cette prise de conscience est naturellement plus rapide en Europe, qui se trouve directement menacée par la rupture des relations économiques avec la Russie[111], et qui court le risque d’une marginalisation croissante (et d’une vassalisation sous la tutelle des États-Unis) dans l’ordre mondial futur[112].

Par ailleurs, la prise de conscience des limites écologiques de l’ancien modèle de croissance, limites qui sont trop souvent réduites à la question du dérèglement climatique mais qui incluent en réalité la question des déchets et de la pollution des sols et de l’eau, s’est aussi affirmée au travers du choc social induit par la pandémie de la COVID-19.

Pour d’autres pays, dont la Russie, c’est la stratégie de développement adoptée depuis les années 2000 et fondée sur les liens de dépendance réciproque avec les économies européennes[113], liens constitués par la vente d’une énergie à bon marché contre des investissements industriels et des importations de biens manufacturés et de technologie, qui a été invalidée. Dans un contexte de forte croissance économique, la Russie avait activement attiré les investissements directs étrangers et localisé des productions en utilisant des technologies étrangères[114]. Ce modèle a naturellement été mis à mal par les nouvelles sanctions. Le cas de l’industrie automobile est le mieux connu mais il est loin d’être le seul. Mais, le développement d’une stratégie de substitution aux importations, a permis de redresser la barre[115]. Ceci a permis un début de diversification des exportations, correspondant d’ailleurs au modèle canonique du commerce international[116]. Ainsi, avec la nouvelle situation géostratégique qui se développe depuis février 2022, un nouveau modèle de développement semble devoir s’imposer[117], même si aujourd’hui ce sont les contraintes (et les opportunités) de moyen-terme qui restent importantes [118].

La Russie n’est d’ailleurs pas la seule dans ce cas. L’Inde pourrait bien, d’ici quelques mois, être confrontée à une remise en cause similaire. Enfin, la Chine a commencé à se recentrer sur son marché intérieur[119] et pourrait être conduite à accélérer ce processus[120]. Globalement, le degré d’ouverture des BRICS a tendu à se réduire en dix ans depuis la crise de 2008-2010. Les pays des BRICS, ont cherché à réduire leur dépendance au commerce international et ce processus devrait naturellement s’accélérer dans les circonstances actuelles marquées par une politisation de plus en plus grande des échanges internationaux.

Pour les pays développés, l’ancienne stratégie, ou l’ancien modèle de croissance, pouvait se mesurer à la part des services dans le PIB, une part qui n’a cessé de grandir depuis les années 1970 et qui est devenue aujourd’hui très importante. Cette part oscille entre 69% et 79%.

Table 3

Décomposition du PIB par secteurs d’origine, Moyenne 2011-2018

 

Sectors

France

Germany Italy United States Japan* China India**
Agriculture, Forestry, Fishing 1,8 0,9 2,2 1,1 1,0 8,6 16,4
Industrie 14 25,6 19 15,7 23,4 35,7 18,9
Construction 5,7 4,6 4,7 3,9 5,5 6,9 7,0
Services 78,5 68,9 74,1 79,3 70,1 48,8 57,7

** Average 2016-2019, https://stats.oecd.org/Index.aspx?DatasetCode=SNA_TABLE1

* Average 2016-2021, https://stats.oecd.org/Index.aspx?DatasetCode=SNA_TABLE1

Source: IMF, OECD

On a présenté les chiffres de la Chine et de l’Inde pour permettre une comparaison. La moyenne s’y établit entre 49% et 58%. Comme on peut le constater sur le tableau 3, les pays occidentaux ont vu leurs économies se tertiariser massivement[121]. Ce phénomène n’est pas nouveau[122], et dans un certain nombre de cas il peut être justifié. Mais il a été probablement porté à son paroxysme par l’extension du libre-échange et par le contrat social implicite que ce dernier a permis. En effet, le niveau de développement de la Chine se rapproche des pays occidentaux, mais la part des services y est bien plus faible. Or, les services – sauf certains secteurs comme les services financiers – offrent des salaires plus faibles que dans l’industrie et dans la construction.

De ce point de vue, il est intéressant de regarder l’évolution, constatée et probable, de la Russie (table 4). Elle était, en 2016, proche de l’Allemagne, et globalement dans une situation intermédiaire entre les pays développés et la Chine. Elle semble, depuis le début des affrontements armés en Ukraine avoir pris une autre voie et tend à se rapprocher de l’Inde et de la Chine.

Table 4

Décomposition du PIB par secteurs d’origine : Russie

2016 2022** 2023***
Agriculture, Forestry, Fishing 4,8 4,3 4,3
Industry* 25,7 31,1 31,6
Construction 6,2 5,2 5,3
Services 63,3 59,4 58,8

Sources: OECD, ROSSTAT and https://rosstat.gov.ru/storage/mediabank/22_20-02-2023.html

*Incorporating transport of electricity, heat, gas and water

** Estimates

*** Forecasts

La politique du gouvernement semble prendre la direction de ce qu’un sociologue ukrainien a qualifié de « keynésianisme militaire »[123], par une aide importante aux fractions de la population engagées dans l’effort de guerre mais aussi par le volume des commandes publiques au secteur de l’armement[124]. Le taux d’utilisation des capacités de production[125], qui est un bon indicateur de l’activité industrielle, aurait atteint – suivant les informations communiquées par UNICREDIT[126] – les 86% au début de l’année 2023. Or, en régime « normal » on est actuellement plus généralement autour de 78% à 82% suivant les pays[127]. Cela implique que l’activité industrielle est très élevée actuellement en Russie. Si l’on ajoute à cela les efforts consentis pour aboutir à une substitution des produits nationaux à une partie des importations, un modèle de développement basé sur l’industrie, sur la transformation des matières premières et non sur l’exportation, pourrait se mettre en place. Un tel modèle serait logiquement plus égalitaire que le modèle de dépendance réciproque développé précédemment. Mais, il exigera probablement une forme de planification[128].

Pour les pays occidentaux, un tel changement soulève quant à lui de nombreux problèmes. Si l’objectif d’une ré-industrialisation, doublé de celui de rendre l’industrie bien plus compatible avec les exigences écologiques, a bien été adopté en France comme aux États-Unis, et dans ce pays l’IRA en témoigne[129], cet objectif implique des investissements colossaux, en particulier pour décarbonner la production d’énergie. Il implique aussi de mettre le secteur financier au service d’une économie centrée sur la production de biens et sur les services publics et une coordination des efforts qui, elle aussi, ne semble pas possible sans une forme de planification[130]. Or, on peut voir un écart important se former entre les discours politiques et la réalité de l’action. Le cas de la réforme des retraites en France au premier trimestre 2023 montre bien que la dimension financière reste très présente au sein de la politique économique du gouvernement. Par ailleurs, la montée des comportements autoritaires au sein de l’appareil gouvernemental, la radicalisation des discours, laisse craindre une autre issue que celle de la reconstruction du pacte social sur la base d’une ré-industrialisation.

Conclusion

Depuis le début de 2022, nous assistons à une accélération des transformations qui étaient déjà à l’œuvre depuis au moins une dizaine d’années dans l’économie mondiale. Ces transformations signent l’arrêt de mort de l’ordre mondial issu du début des années 1990, un arrêt de mort qui prend la forme de la montée des organisations non-occidentales (BRICS, OCS) dans la vie internationale, de la remise en cause brutale du libre-échange généralisé et du système monétaire international. Ce changement dans l’ordre mondial prend la forme d’un dé-occidentalisation du monde et entend, à tort ou à raison, plonger ses racines dans le mouvement de décolonisation des années 1950-1960.

Mais, ces transformations affectent aussi le pacte social, qu’il soit implicite ou explicite, qui fonctionnait dans la plupart des pays développés ou en développement. Il confronte les pays développés à l’impossibilité de poursuivre dans la voie qui était la leur depuis le début des années 1990. Il impose aux pays émergents ou en développements de se dégager de la financiarisation des activités et de ne pas tenter à imiter la trajectoire passée des pays développés. Dans les deux cas, il est établi que l’État sera amené à jouer un rôle plus important – directement et indirectement – dans l’activité économique et la structuration de la société. Il n’est cependant pas acquis que ce rôle s’accompagne d’un progrès social significatif et il pourrait, au-contraire, se traduire par un ordre interne plus coercitif et plus inégalitaire.

Notes

[1] This description of the USA as a “Hyper-Power” comes from the former French Foreign Minister (1997-2002) Mr. Hubert Védrine. Védrine H., Les Cartes de la France à l’heure de la mondialisation, Paris, Fayard, 2000

[2] Gnesotto N., « Un nouvel ordre mondial », Blogpost, Paris, Institut Jacques Delors, March 13, 2023, https://institutdelors.eu/publications/un-nouvel-ordre-mondial/ ; Saint-Etienne C., « Le nouvel ordre stratégique mondial », in Les Echos, March 3, 2023, https://www.lesechos.fr/idees-debats/editos-analyses/le-nouvel-ordre-strategique-mondial-1911771; Husson J., « Vers une probable bascule de l’ordre mondial » in La Tribune, August 31, 2022, https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/vers-une-probable-bascule-de-l-ordre-mondial-928895.html

[3] Keynes J.M., Collected Writings of John Maynard Keynes (1941), D. Moggridge, éd. Mac Millan, 1980, t. XXV section II, p. 42-66.

[4] Bush G.W., Discours, 6 mars 1991, Congrès des États-Unis – Washington, in Le Monde Diplomatique,

[5] Arendt H., La crise de la culture, Paris, eds. Gallimard, 1989, p. 227.

[6] Gurvitch, G. « La philosophie du droit de Hugo Grotius et la théorie moderne du droit international (À L’occasion Du Tricentenaire Du De Jure Ac Pacis, 1625-1925) », in Revue de Métaphysique et de Morale, vol. 34, no 3, 1927, p. 365–391

[7] Grotius H., Le droit de la guerre et de la paix, vol. 1 & 2, Amsterdam, Pierre de Coup, 1724. Modern publishing : Grotius H, Le droit de la guerre et de la paix, Paris, PUF, 2005

[8] Forde S, « Hugo Grotius on Ethics and War », The American Political Science Review, vol. 92, no 3, 1998, p. 639–648

[9] Bull H., A. Roberts and B. Kingsbury, Hugo Grotius and International Relations, Oxford, Oxford UP, 2003

[10] Vico G., Opere Giuridiche, a cura di Paolo Cristofolini, Firenze, Sansoni, 1974

[11] Besson S., « L’autorité légitime du droit international comparé. Quelques réflexions autour du monde et du droit des gens de Vico », in Besson S. and Jubé S. (eds.), Concerter les civilisations. Mélanges en l’honneur d’Alain Supiot, Paris, Seuil, 2020, p. 49-60

[12] Blin A., 1648. La Paix de Westphalie ou la naissance de l’Europe politique moderne, coll. « Questions à l’histoire », Bruxelles, 2006, 214 p. ; Bely L., (dir.) (avec le concours d’Isabelle Richefort et alii, introduction de Marc Fumaroli, présentation de Louis Amigues), L’Europe des traités de Westphalie : esprit de la diplomatie et diplomatie de l’esprit, actes du colloque tenu à Paris, du 24 au 26 septembre 1998, organisé par la Direction des archives et de la documentation du ministère des Affaires étrangères, Paris, PUF, 2000, VI-615 p.

[13] Lentz T., Le Congrès de Vienne : une refondation de l’Europe (1814-1815), Paris, Perrin, 2013, 385 p. ; Jarrett M., The Congress of Vienna and its legacy : war and great power diplomacy after Napoleon, London, I. B. Tauris & Company, Ltd., 2013, 522 p.

[14] Boidin P., Les lois de la guerre et les deux conférences de La Haye (1899-1907), Paris, A. Pedone éditeur, 1908 ; Pillet A., Les Conventions de La Haye du 29 juillet 1899 et du 18 octobre 1907, étude juridique et critique, Paris, A. Pedone éditeur, 1918

[15] Versailles Treaty : https://mjp.univ-perp.fr/traites/sdn1919.htm

[16] Haakonssen, K. « Hugo Grotius and the History of Political Thought », in Political Theory, vol.13, pp. 239-265, 1985

[17] https://www.un.org/en/about-us/un-charter/chapter-7

[18] Steill B., The Battle of Bretton Woods: John Maynard Keynes, Harry Dexter White, and the Making of a New World Order, Princeton University Press, Princeton, N-J, 2013.

[19] Graz J.C., Aux sources de l’OMC : la Charte de La Havane, 1941-1950, Droz, Genève, 1999, 367 p..

[20] Besson S., « The Political Legitimacy of International Law: Sovereign States and their International Institutional Order. Carrying Dworkin’s Later Work on International Law Forward », Jus cogens, vol. 2, 2, 2020, p. 111-138.

[21] http://en.kremlin.ru/events/president/transcripts/24034 ; Levesque J., “En marge d’un fameux discours de Poutine », in Diplomatie, n°27 (May-June), 2007, pp. 38-41.

[22] Rao N., “The Upside of Rivalry” in Foreign Affairs, May-June 2023, https://www.foreignaffairs.com/india/modi-new-delhi-upside-rivalry?utm_medium=newsletters&utm_source=twofa&utm_campaign=The%20World%20Beyond%20Ukraine&utm_content=20230421&utm_term=FA%20This%20Week%20-%20112017

[23] Galbraith J. & J. Choi, “Inequality Under Globalization: State of Knowledge

and Implications for Economics,” in Edward Webster, Imraan Valodia and David Francis, edits., Inequality Studies from the Global South, Londres-New York, Routledge, 2020

[24] Subramanian A. & S-J. Wei, « The WTO promotes trade, strongly but unevenly », Journal of International Economics, vol. 72, no 1,‎ May 2007, p. 151–175

[25] Gowa J. & S. Y. Kim, « An Exclusive Country Club: The Effects of the GATT on Trade, 1950–94 », World Politics, vol. 57, no 4,‎ July 2005, p. 453–478

[26] William Glenn G., « Floating the System: Germany, the United States, and the Breakdown of Bretton Woods, 1969–1973 », in Diplomatic History, Vol.31 (n°2), 2007, pp. 295–323

[27] Eichengreen, B., . Exorbitant Privilege: The Rise and Fall of the Dollar and the Future of the International Monetary System. Oxford: Oxford University Press, 2011.

[28] Sapir J., Le Nouveau XXIè Siècle, le Seuil, Paris, 2008.

[29] Mearsheimer J., The Tragedy of Great Power Politics, New York, W. W. Norton, 2001

[30] Goldstein A., Rising to the Challenge. China’s Grand Strategy and International Security, Stanford University Press, 2005 ; Rosecrance R., « Power and international relations: The rise of China and its effects », International Studies Perspectives, vol. 7, 2006 Struye de Swielande T., « Les États-Unis et le nouvel ordre mondial émergent », Les Cahiers du RMES, vol. 5, no 1, 2008 ;

[31] Swaine M.D. & Ashley J. Tellis, Interpreting China’s Grand Strategy: Past, Present, and Future, Santa Monica, RAND, 2000; Friedberg A.L., « The future of U. S.-China relations: Is conflict inevitable? », International Security, vol. 30, no 2, 2005. Wang Y-K, « China’s grand strategy and U. S. primacy: Is China balancing American power? », Washington, CNAPS, Brookings, 2006

[32] Shambaugh D., « The new strategic triangle: US and European reactions to China’s rise », The Washington Quarterly, summer 2005, vol. 28, no 3, p. 7-25

[33] Poirier L., « La guerre du Golfe dans la généalogie de la stratégie », Stratégique, n° 51/52, 3e et 4e trimestres 1991.

[34] Dahl R.A., « The concept of power », in Behavioral Science, vol. 2, n° 3, 1957, p. 201-215.

[35] https://www.wto.org/french/docs_f/legal_f/marrakesh_decl_f.htm

[36] Primakov E., Mir posle 11 Sentjabrja, Moscow, Mysl’, 2002

[37] Sapir J., « The social roots of the financial crisis : implications for Europe » in C. Degryze, (ed), Social Developments in the European Union : 2008, Bruxelles, ETUI, 2009.

[38] Naughton B., “ China and the two crises: From 1997 to 2009”, Working Paper, JICA Ogata Sadako Research Institute for Peace and Development, 2013, https://www.jica.go.jp/jica-ri/publication/workingpaper/china_and_the_two_crises_from_1997_to_2009.html ; Fang Z, and Xiao G., “China in the context of the Asian crisis” in Honk-Kong, The China Review, Hong Kong University Press, 1999, pp. 165-178; “Pro-active policies by China in response to Asian Financial Crisis”, Ministry of Foreign Affairs of the Republic of China, https://www.fmprc.gov.cn/eng/ziliao_665539/3602_665543/3604_665547/200011/t20001117_697864.html#:~:text=In%20the%20wake%20of%20the,and%20emergency%20medicine%20given%20gratis.

[39] Sapir J., « Disastrous past, bright present, uncertain future », in Post-Soviet Affairs, vol. 18, n°1/2002, January-March, pp. 1-30.

[40] Sapir J., Le Nouveau XXIè Siècle, le Seuil, Paris, 2008.

[41] Golub, P. S. « La fin de la Pax Americana ? », Revue internationale et stratégique, vol. 72, no. 4, 2008, pp. 141-150 ; Alasuutari, P., « The Principles of Pax Americana » in Cultural Studies – Critical Methodologies, vol. 4(2), 2004, pp. 246–249.

[42] Bello W., Deglobalization, ideas for a New World Economy, London & New-York, Zed Book, 2002

[43] Sapir J., La Démondialisation, Paris, Le Seuil, 2011 ; Reprinted in an augmented version, Paris, Le Seuil, 2021.

[44] https://www.agenceecofin.com/actualites/2504-107709-13-pays-ont-officiellement-depose-des-demandes-d-adhesion-au-groupe-des-brics-selon-l-afrique-du-sud

[45] de Ruyt J., L’acte unique européen, Université de Bruxelles, dirigée par l’Institut d’études européennes, 1989, 389 p.

[46] Duval G., « Travail : du plein-emploi au chômage de masse », in Alternatives Économiques, 2018/4 (N° 378), p. 72-72 ; Armstrong H. & Taylor J., « The Measurement of Different Types of Unemployment » in Creedy J. (ed.) The Economics of Unemployment in Britain (London: Butterworth) pp. 99–127, 1981.

[47] Bourguignon F., La mondialisation de l’inégalité, Paris, Seuil, 2012.

[48] Atkinson A.B., Piketty T (eds.), Top Incomes over the Twentieth Century : A contrast between Continental European and English-speaking Countries, Oxford, Oxford University Press, 2007. See also Piketty T. and Saez E., « The Evolution of top incomes : A historical and international Perspective », Working Paper, n° 11 955, NBER (National Bureau of Economic Research), Cambridge, 2006 (www.nber.org/papers/w11955)

[49] Herrera, R., « La domination de la finance : origines, mécanismes, alternatives », in Marché et organisations, vol. 19, no. 3, 2013, pp. 127-146 ; Serfati, C., « La mondialisation sous la domination de la finance : une trajectoire insoutenable », in Mondes en développement, vol. 152, no. 4, 2010, pp. 129-144.

[50] See Ryan R.M., O’Toole C.M., & McCann F, « Does Bank Market Power affect SME Financing Constraints? », in Journal of Banking & Finance, vol. 49, 2014, pp. 495-505; Ratti R.A., Lee S. & Seol Y., in « Bank Concentration and Financial Constraints on Firm-Level Investment in Europe », Journal of Banking & Finance, vol. 32, n° 12, pp. 2684-2694; Ammable B & Chatelain J.B., « La concurrence imparfaite entre les intermédiaires financiers est-elle toujours néfaste à la croissance économique ? », in Revue économique, vol. 47, n° 3, 1996, pp. 765-775.

[51] Freeland C., Plutocrats : The Rise of the New Global Super Rich and the Fall of Everyone Else, Toronto, Doubleday, 2012.

[52] Guilluy C., La France Périphérique, Paris, Flammarion, 2015. Idem, Les Dépossédés, Paris, Flammarion, 2022.

[53] Fourquet J., L’Archipel français, Paris, Le Seuil, 2019.

[54] Bendali, Zakaria, et al. « Le mouvement des Gilets jaunes : un apprentissage en pratique(s) de la politique ? », in Politix, vol. 128, no. 4, 2019, pp. 143-177, https://www.cairn.info/revue-politix-2019-4-page-143.htm ; Tartakowsky, D., « Les Gilets jaunes, les mouvements sociaux et l’État », in L’ENA hors les murs, vol. 494, no. 2, 2019, pp. 9-10.https://www.cairn.info/revue-l-ena-hors-les-murs-2019-2-page-9.htm

[55] Espinoza M., Donald Trump’s Impact on the Republican Party, University of Texas, Rio Grande Valley, Policy Studies, n° 7-6-2021, 2021, https://scholarworks.utrgv.edu/cgi/viewcontent.cgi?article=1037&context=pol_fac

[56] https://www.theguardian.com/politics/2019/apr/23/former-communist-claire-fox-standing-as-mep-for-farages-brexit-party

[57] https://www.letemps.ch/monde/victoire-ecrasante-boris-johnson

[58] Poupin P., « L’expérience de la violence policière dans le mouvement des Gilets jaunes », in Sociologie et Sociétés, Volume 51, numéro 1-2, spring-fall 2019, p. 177–200. https://www.erudit.org/fr/revues/socsoc/2019-v51-n1-2-socsoc05787/1074734ar/

[59] Barma N., Chiozza G., Ratner E. et Weber S. (2009), “A World Without the West? Empirical Patterns and Theoretical Implications”, in Chinese Journal of International Politics, n° 2, Vol.4, 2009, pp. 525-544

[60] Bown C, « The 2018 Trade War and the End of Dispute Settlement as we Knew it », in VOXeu.org column n°13, June 2019

[61] Basedow R., « Strengthening the World Trade Organization – Critical Demands for Imperative Success Identifying Politically Viable Options for Incremental Reform », 27 April 2017, www.bertelsmann-stiftung.de/,

[62] Fabry E. & E. Tate, « Sauver l’organe d’appel de l’OMC ou revenir au Far West commercial ? », in Institut Jacques Delors, Policy Paper n° 225, 29 mai 2018, pp. 1-21 ; see also, Dunoff J.L. & Pollack M.A., « The Judicial Trilemma », in American Journal of International Law, Vol. 111, pp. 226/276.

[63] https://www.justice.gov/criminal-fraud/foreign-corrupt-practices-act

[64] Gauvain R., Rétablir la souveraineté de la France et de l’Europe et protéger nos entreprises des lois et mesures à portée extraterritoriale, Paris, Assemblée Nationale, 26 juin 2019, 101 p.

[65] http://www.assemblee-nationale.fr/14/rap-info/i4082.asp . Un rapport plus récent de 2019 fait le tour de cette question : GAUVAIN, Rétablir la souveraineté de la France et de l’Europe et protéger nos entreprises des lois et mesures à portée extraterritoriale, Paris, Assemblée Nationale, 26 juin 2019, 101 p., https://www.vie-publique.fr/sites/default/files/rapport/pdf/194000532.pdf

[66] Voir, Alstom Pleads Guilty and Agrees to Pay $772 Million Criminal Penalty to Resolve Foreign Bribery Charges, US Department of Justice, Office of Public Affairs, 22 décembre 2014, http://archive.wikiwix.com/cache/index2.php?url=https%3A%2F%2Fwww.justice.gov%2Fopa%2Fpr%2Falstom-pleads-guilty-and-agrees-pay-772-million-criminal-penalty-resolve-foreign-bribery

[67] Maitre E., « Observatoire de la Dissuasion », FRS, bulletin n°55, June 2018, https://www.frstrategie.org/sites/default/files/documents/programmes/observatoire-de-la-dissuasion/bulletins/2018/55.pdf

[68] This country was one of the main losers of the 2014 round of sanctions : Fast 700 Millionen US-Dollar pro Monat: Deutschland leidet unter Russland-Sanktionen, in Handelsblatt, 11 octobre 2019, https://www.handelsblatt.com/politik/international/krim-streit-fast-700-millionen-us-dollar-pro-monat-deutschland-leidet-unter-russland-sanktionen/25107884.html?ticket=ST-44354031-vztL3Mvyz2G7mcsrF6Tv-ap4

[69] https://www.consilium.europa.eu/fr/policies/sanctions/iran/jcpoa-restrictive-measures/

[70] https://www.capital.fr/entreprises-marches/total-abandonne-south-pars-11-en-iran-a-moins-dune-derogation-1288307

[71] Kirshner, J., “Dollar Primacy and American Power: What’s at Stake?” in Review of International Political Economy, vol.15, no. 3, 2008, pp. 418–438

[72] The French intelligence agency focusing on internal security.

[73] Egrelle O., Airbus espionné par les Etats-Unis, in Portail de l’IE, 23 novembre 2018, https://portail-ie.fr/analysis/1987/airbus-espionne-par-les-etats-unis

[74] Goldberg, L., “The International Role of the Dollar: Does It Matter if This Changes?”, Staff Report, No. 522, New York: Federal Reserve Bank of New York, 2011.

[75] Ghymers C., « Réagir à l’emprise du dollar », in Aglietta M. (ed.), L’ECU et la vieille dame, Paris, Economica, 1986, pp. 23-47.

[76] Aglietta M., La Fin des Devises Clés, Paris, La Découverte, coll. Agalma, 1986.

[77] Carney, M. “The Growing Challenges for Monetary Policy in the Current International Monetary and Financial System” Speech at the Jackson Hole Symposium 2019, August 23 2019. www.bis.org/review/r190827b.pdf

[78] To the difference of what have expressed Portes, R., and Rey, H., “The Emergence of the Euro as an International Currency”, in Begg, D., von Hagen, J., Wyplosz, C., and Zimmermann, K. F. (eds.), EMU: Prospects and Challenges for the Euro, Oxford: Blackwell, 1998, pp. 307–304.

[79] McDowell, D., “Financial Sanctions and Political Risk in the International Currency System” in Review of International Political Economy, vol. 28, no. 3, 2020, pp. 635–661.

[80] Gopinath, G., and Stein, J. C., “Banking, Trade, and the Making of a Dominant Currency” in The Quarterly Journal of Economics, vol. 136, no. 2, 2021, pp. 783–830.

[81] Helleiner, E., and Kirshner, J. The Future of the Dollar, Ithaca: Cornell University Press, 2009.

[82] Kilic K. & Marin D., How COVID-19 is transforming the world economy, CEPR, May 2020.

[83] Fulconis F. & Paché G., “Pandémie de COCID-19 et Chaines Logistiques” in Revue Française de Gestion, 2020/8, n°293, 2020, pp. 171-181.

[84] Dauvin M., “Évaluation du choc d’approvisionnement » in Revue de l’OFCE, 2022/2, n°177, 2022, pp. 101-115

[85] Derrien G & Van Der Putten R., « Des chaînes d’approvisionnement plus résilientes après la pandémie de la Covid-19 » in BNP-Paribas Conjoncture, December 20, 2021, https://economic-research.bnpparibas.com/html/fr-FR/chaines-approvisionnement-resilientes-pandemie-Covid-19-20/12/2021,44859

[86] For the EU Bēlin M. and Hanousek J., “Making sanctions bite: the EU-Russian sanctions of 2014”, April 29th 2019, VoxEU – CEPR, https://www.consilium.europa.eu/fr/infographics/eu-sanctions-against-russia-over-ukraine/; for the USA, https://www.congress.gov/bill/115th-congress/house-bill/3364/text

[87] https://finance.ec.europa.eu/eu-and-world/sanctions-restrictive-measures/sanctions-adopted-following-russias-military-aggression-against-ukraine_en

[88] For the EU countries https://www.consilium.europa.eu/fr/policies/sanctions/restrictive-measures-against-russia-over-ukraine/#economic; for the USA https://home.treasury.gov/system/files/126/14065.pdf & https://home.treasury.gov/system/files/126/fr87_41589.pdf and https://www.whitehouse.gov/briefing-room/statements-releases/2022/04/06/fact-sheet-united-states-g7-and-eu-impose-severe-and-immediate-costs-on-russia/

[89] MondAfrique, “L’isolement de la Russie, un fantasme de l’Occident », August 27, 2022, https://mondafrique.com/lisolement-de-la-russie-est-un-fantasme-de-loccident/

[90] Kantchev, G., “Russia’s Wealth Fund to Ditch Dollar Amid US Sanctions Threat”, in Wall Street Journal June 3, 2021. www.wsj.com/articles/russias-wealth-fund-to-ditch-dollar-amid-u-s-sanctions-threat-11622730123

[91] Sapir J., “Is eurozone accumulating an historic lag toward Asia in the Covid-19 context?” in Economic Revival of RussiaNo.1 (67)/2021, pp. 89-102.

[92] Sapir J., « The Economic Shock of the Health Crisis in 2020: Comparing the Scale of Governments Support » in Studies on Russian Economic Development, Vol. 32, No. 6, 2021, pp. 579–592.

[93] Sapir J., “Wendet sich der Wirtschaftskrieg gegen Russland gegen seine Initiatoren?” in Stefan Luft, Sandra Kostner (Editors): Ukrainekrieg. Warum Europa eine neue Entspannungspolitik braucht, Frankfurt am Main, 2023, Westend-Verlag

[94] See, Luft, G., “The Anti-dollar Awakening could be Ruder and Sooner than most Economists Predict”, August 27, 2018, https://www.cnbc.com/2018/08/27/the-anti-dollar-awakening-could-be-ruder-and-sooner-than-most-economists-predict.html ;
Ladasic, I. K. “De-dollarization Of Oil And Gas Trade” in 17th International Multidisciplinary Scientific GeoConference SGEM 2017, no.15, pp. 99–106:

[95] GT Staff reporters, ”BRICS currency ‘plausible alternative’ to dollar hegemony” in Global Times, May 14, 2023, https://www.globaltimes.cn/page/202305/1290700.shtml ; Liu Z.. & Papa M., “Can BRICS De-dollarize the Global Financial System” in Elements in the Economics of Emerging Markets, Cambridge University Press, January 2022, https://www.cambridge.org/core/elements/can-brics-dedollarize-the-global-financial-system/0AEF98D2F232072409E9556620AE09B0

[96] Ping L., “The trend toward de-dollarization become clearer as dollar weaponization damages its credibility” in Global Times, April 28, 2023, https://www.globaltimes.cn/page/202304/1289944.shtml

[97] May 21, 2020, https://www.bloomberg.com/news/videos/2020-05-21/reinhart-says-covid-19-is-the-last-nail-in-the-coffin-of-globalization-video

[98] https://www.brookings.edu/opinions/less-globalization-more-multilateralism/

[99] James H., « Deglobalization: The Rise of Disembedded Unilateralism » in Annual Review of Financial Economics, Vol. 10:219-237 (Volume publication date November 2018), (https://doi.org/10.1146/annurev-financial-110217-022625 )

[100] James H., Deglobalization as a Global Challenge, Princeton U., Center for International Governance Innovation, CIGI Papers No. 135, Princeton, NJ, Juin 2017.

[101] Stiglitz J.E., « Getting deglobalisation right” in Social Europe, June 7, 2022, https://www.socialeurope.eu/getting-deglobalisation-right

[102] https://www.imf.org/en/News/Articles/2022/10/06/sp-2022-annual-meetings-curtain-raiser

[103] Sapir J., Le Protectionnisme, Paris, PUF, coll. Que-Sais-Je, 2022.

[104] Booth P., “Is Protectionisme making a comeback”, November 18, 2019, https://iea.org.uk/is-protectionism-making-a-comeback-part-1/ & https://iea.org.uk/is-protectionism-making-a-comeback-part-2/ ; Khandelwal A., Goldberg P., Kennedy P., Fajgelbaum P., “The return to protectionism”, in CEPR – VoxEU, November 7, 2019, https://cepr.org/voxeu/columns/return-protectionism

[105] Something already described in Sapir J., La Démondialisation, new edition, op.cit..

[106] Deng H., « 20 Years of SCO, Development, Experience and Future Directions”, in Contemporary International Relations Volume 31, Number 4; July/August 2021. See also, https://news.cgtn.com/news/2022-09-12/SCO-secretary-general-More-countries-interested-in-joining-the-group-1dgSBJHBx9C/index.html and Nadin R., Nijhar I. & Mami E., “Shanghai Cooperation Organization Summit 2022: key takeaways”, September 23, 2022, https://odi.org/en/insights/shanghai-cooperation-organisation-summit-2022-key-takeaways/

[107] Stokes B., « The World needs an Economic NATO” in Foreign Policy, May 17, 2022, https://foreignpolicy.com/2022/05/17/ukraine-war-russia-sanctions-economic-nato-g7/

[108] Harding M, Lindé J., Trabandt M., “Understanding Post-Covid Inflation”, IMF, Working Paper, n° WP 23-10, January 20, 2023, https://www.elibrary.imf.org/view/journals/001/2023/010/article-A001-en.xml

[109] Forbes, K. J., Gagnon, J. and Collins, Ch. G., “Pandemic inflation and nonlinear, global Phillips curves”, in Peterson Institute for International Economics, Working Paper, No. 21-15, 2021, VoxEU.org. Gopinath, G., “How will the Pandemic and War Shape Future Monetary Policy?,” Speech delivered at the Jackson Hole Symposium, op.cit..

[110] Leseul G. (et alii), « Commission d’enquête chargée d’identifier les facteurs qui ont conduit à la chute de la part de l’industrie dans le PIB de la France et de définir les moyens à mettre en oeuvre pour relocaliser l’industrie et notamment celle du médicament », Sénat de la République Française, rapport N° 4923, January 19, 2022, https://www2.assemblee-nationale.fr/15/autres-commissions/commissions-d-enquete-de-la-xv-eme-legislature/commission-d-enquete-sur-la-desindustrialisation/(block)/RapEnquete

[111] http://gasprocessingnews.com/news/2023/03/europe-facing-costly-winter-without-enough-long-term-lng-deals/

[112] See the contribution of Joshka Fisher, the former minister of Foreign affairs of Germany in Project Syndicate,https://www.project-syndicate.org/commentary/europe-biggest-loser-in-multipolar-world-by-joschka-fischer-2023-05?utm_source=Project%20Syndicate%20Newsletter&utm_campaign=649968e73b-sunday_newsletter_05_21_2023&utm_medium=email&utm_term=0_73bad5b7d8-649968e73b-104930809&mc_cid=649968e73b&mc_eid=ce43353b62&barrier=accesspaylog

[113] Sapir J., « Russia’s economic growth and European integration » in J. Wilhelmsen (ed.) Putin’s Russia: Strategic Westernization ?, Norwegian Institute of International Affairs, Oslo, 2004, pp. 85-96.

[114] Adewale A.R., « Import-substitution industrialisation and economic growth – Evidence from the group of BRICS countries” in Future Business Journal, n°3, 2017, pp. 138-158, p. 142-143.

[115] https://expert.ru/2022/12/18/atlant-pozhal-plechami-kak-vosstanavlivayetsya-i-razvivayetsya-rossiyskiy-avtoprom/

[116] Krugman, P., “Import protection as export promotion: International competition in the presence of oligopoly and economies of scale” (pp. 180–193). In H. Kierzkowski (Ed.), Monopolistic Competition and International Trade, Londres, Oxford University Press, 1984.

[117] Gusev M.S, “Strategija Yekonomičeskogo Razvitija 1035: puti preodolenija dolgosročnoj stagnatsii » in Problemy Prognozirovanija, 2/2023 (n°197), pp. 18-29. See also Frolov I. Ye., Belousov D.R., Artemenko V.G., Ganičev N.A., Koshovets O.B., Klepač A.N., O Dolgosročnom Naučno-Tekhnologičeskom Razvitii Rossii, Moscow, IEF-RAS, Scientific Report, 2022, https://ecfor.ru/publication/o-dolgosrochnom-nauchno-tehnologicheskom-razvitii-rossii/

[118] Shirov A.A., « Development of the Russian Economy in the Medium Term: Risks and Opportunities» in Studies in Russian Economic Development, vol. 34, n°2, 2023, pp. 159-166.

[119] UNCTAD, China’s Structural Transformation: What Can Developing Countries Learn, Geneva, UNCTAD, GDS/2022/1, https://unctad.org/system/files/official-document/gds2022d1_en.pdf

[120] https://www.globaltimes.cn/page/202303/1286727.shtml

[121] Barreiro de Souza K., Quinet de Andrade Bastos S., Salgueiro Perobelli F., « Multiple trends of tertiarization: A comparative input–output analysis of the service sector expansion between Brazil and United States”, in Economia, Volume 17, Issue 2, 2016, PP. 141-158; Greenhalgh C. & Gregory M., “Structural change and the New Service Economy”, in Oxford Bulletin of Economic Statistics, 63 (Special Issue), 2001, pp. 629-646 Daniels P.W., Services Industries in the World Economic, Cambridge, Blackwell, 1993.

[122] See : Lichtenstein, C., « Les relations industrie-services dans la tertiarisation des économies. » In Revue internationale P.M.E., volume 6, number 2, 1993, p. 9–33.

[123] Ishshenko V. « Russia’s military keynesianism », Al Jazeera 14/02/2023, https://www.aljazeera.com/opinions/2022/10/26/russias-military-keynesianism

[124] Cooper J., Implementation of the Russian Federal Budget During January-July 2022 and the Spending on the Military, SIPRI Background Paper, SIPRI, Stockholm, October 2022, https://www.sipri.org/sites/default/files/2022-10/bp_2210_russianmilex.pdf

[125] The INSEE definition could be seen at https://www.insee.fr/fr/metadonnees/definition/c1275

[126] Data obtained during the European Business Association Webinar, Februray 27, 2023.

[127] Historical average was 83,2% in France for 1963-1989 (source : Bourlange D., Chaney E., « Taux d’utilisation des capacités de production : un reflet des fluctuations conjoncturelles », In Économie et statistique, n°231, April 1990. pp. 49-70) and 83,9% for 2009-2019. It had fallen to 81,8% in 2022 (https://www.insee.fr/fr/statistiques/serie/001586738#Telechargement). In the USA the production capacity utilization ratio is 79,8% for 2022 (https://fr.tradingeconomics.com/united-states/capacity-utilization )

[128] Sapir J., “Экономическое планирование: ренессанс забытой практики и возможности для России » in Ekspert n°4/2023, January 23, 2023, https://expert.ru/expert/2023/04/ekonomicheskoye-planirovaniye-renessans-zabytoy-praktiki-i-vozmozhnosti-dlya-rossii/

[129] https://www.democrats.senate.gov/imo/media/doc/inflation_reduction_act_one_page_summary.pdf See also Stiglitz J.E. “Why the Inflation Reduction Act is a Big Deal” in Project Syndicate, August 8, 2022, https://www.project-syndicate.org/commentary/us-inflation-reduction-act-is-a-big-deal-by-joseph-e-stiglitz-2022-08?barrier=accesspaylog&utm_term=&utm_campaign=&utm_source=adwords&utm_medium=ppc&hsa_acc=1220154768&hsa_cam=12374283753&hsa_grp=117511853986&hsa_ad=499567080222&hsa_src=g&hsa_tgt=aud-1249316000597:dsa-19959388920&hsa_kw=&hsa_mt=&hsa_net=adwords&hsa_ver=3&gad=1&gclid=CjwKCAjwgqejBhBAEiwAuWHioOck-GaQCMtd-PKCLXS_QroDjeSzqT63WRnk3Gje9p6-hb6tcx1zOxoCh3sQAvD_BwE

[130] Sapir J., “Cтанет ли плановая экономика нашим будущим?” in Проблемы прогнозирования, n°6 (195), 2022, pp. 6-26.

Commentaire recommandé

Guadet // 30.05.2023 à 10h45

Comment parler de fin de la domination américaine alors que la guerre en Ukraine livre aux américains toute l’europe et peut-être demain la Russie ? Alors qu’ils ont gagné la guerre culturelle en asservissant le monde par leur langue et leur industrie du divertissement ? Alors que le dollar maintient sa domination dont on annonce pourtant depuis trente ans la fin ?
Si l’hégémonie américaine doit s’écrouler, j’ai peur que ça ne se fasse pas aussi pacifiquement que la fin de l’URSS, et que les USA soient tentés d’utiliser leur énorme potentiel de destruction. Les exemples de l’Irak et de l’Ukraine ont montré qu’ils n’étaient pas avares du sang des autres peuples.

15 réactions et commentaires

  • RémyB // 30.05.2023 à 09h52

    lu quelque part que les usa viennent de « voter » pour un budget sans limite, serait-ce pour un objectif caché de guerres perpétuelles?

      +1

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    • Patrick // 30.05.2023 à 10h08

      oui, le « plafond de la dette » a été suspendu … donc des dépenses sans compter, ça peut ressembler à un budget de guerre. C’est approuvé par les Républicains , au moins une partie d’entre eux .

        +3

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  • anagogie // 30.05.2023 à 10h20

    Pour le plaisir de la discussion, je délimiterai « l’ordre mondial » selon d’autres pivots : 1956 (Suez) où les Etats-Unis vassalisent définitivement la « Communauté Internationale », c’est à dire la France et la Grande-Bretagne, l’Allemagne étant sous occupation (leur servilité politique, militaire, économique ne se démentira plus jusqu’à aujourd’hui) ; et 2001 avec l’entrée de la Chine dans l’OMS, plutôt que 1991 qui n’est qu’un accident idéologique (« fin de l’histoire », triomphe du capitalisme et autres fadaises) utile à la propagande intérieure sur LCI (on peut « lisser » cette date parce que trente ans plus tard, la Russie reste le pays à abattre). En 2001, le capitalisme financier achète la corde avec laquelle il va se pendre.

    Pour faire chorus avec Patrick (qui m’a ouvert la porte en grand et donc je l’enfonce) : la guerre a déjà lieu. Elle a même commencé bien avant février 2022, avant 2014 — disons 2007 (une date moins évidente) et une conférence à Munich où un certain Vladimir fustige ce qu’il nomme l’ordre unipolaire. La question ouverte est celle des victimes : à mon avis, ce qui est en jeu est la destruction de l’Europe en tant qu’entité économique (au bénéfice des Etats-Unis) et (absurde) construction politique, l’OTAN s’étant déjà occupée depuis longtemps du « désarmement ».

      +9

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  • Guadet // 30.05.2023 à 10h45

    Comment parler de fin de la domination américaine alors que la guerre en Ukraine livre aux américains toute l’europe et peut-être demain la Russie ? Alors qu’ils ont gagné la guerre culturelle en asservissant le monde par leur langue et leur industrie du divertissement ? Alors que le dollar maintient sa domination dont on annonce pourtant depuis trente ans la fin ?
    Si l’hégémonie américaine doit s’écrouler, j’ai peur que ça ne se fasse pas aussi pacifiquement que la fin de l’URSS, et que les USA soient tentés d’utiliser leur énorme potentiel de destruction. Les exemples de l’Irak et de l’Ukraine ont montré qu’ils n’étaient pas avares du sang des autres peuples.

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  • step // 30.05.2023 à 11h07

    « Par ailleurs, la montée des comportements autoritaires au sein de l’appareil gouvernemental, la radicalisation des discours, laisse craindre une autre issue que celle de la reconstruction du pacte social sur la base d’une ré-industrialisation. »
    Que c’est bien dit ces choses là. En gros tendance vers un rétablissement de formes d’esclavage (par la dette, par la menace d’exclusion ou de rapatriement forcé) afin de conserver la profitabilité du fonctionnement économique actuel. La période de la traite négrière a été particulièrement profitable au capitalisme « européen » qui pouvait « recruter » à l’étranger la main d’oeuvre forcée car à l’époque les états avaient les moyens de « tenir » des pays colonisés. Dans la situation actuelle, à système inchangé, la main d’œuvre corvéable ne pouvant plus être prélevée à l’étranger, ce sera forcément sur sa population domestique que le profit devra être réalisé. C’est consubstantiel à la notion de vassal. Nous somme la prochaine afrique du prochain commerce triangulaire (ou de la « nouvelle » forme qu’il prendra).

      +4

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    • ouvrierpcf // 01.06.2023 à 20h16

      On peut utiliser des esclaves pour cueillir du coton des pommes des oranges mais pour fournir des watt heure des kilo Watt des giga watt il faut des ingénieurs cadres techniciens des ordinateurs des centres de calculs des mathématiciens des informaticiens des électriciens des électroniciens et même des micro informaticiens des micro processeurs Qui les conçoit ? Qui les fabrique quelle sont les matières premières ou sont elles exploitables En Europe ? En Russie ? En Chine ? En Afrique ? En Ukraine ? En Arabie Saoudite ? En Irak ? En Iran ? Non c’est terminé ter mi né pour l’UE les USA [modéré] enfin pour les anglo-saxons Cela se fera oui dans la douleur en guerre en famines en pendémies en misère en exploitation en luttes de classes mais c’est ineductable la capitalisme se meurt est malade atteint ce n’est que question de jours de mois d’années de siècles selon l’organisation des hommes ou des IA peut être ??

        +1

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  • Lt Briggs // 30.05.2023 à 12h50

    Très intéressante mise en perspective du devenir de l’ordre mondial et de sa recomposition.
    Le retour du politique est annoncé dans l’ultime paragraphe : « Dans les deux cas, il est établi que l’État sera amené à jouer un rôle plus important – directement et indirectement – dans l’activité économique et la structuration de la société. Il n’est cependant pas acquis que ce rôle s’accompagne d’un progrès social significatif et il pourrait, au-contraire, se traduire par un ordre interne plus coercitif et plus inégalitaire ».
    Effectivement, on ne sait pas où va pencher la balance. La culture politique et la personnalité de ses dirigeants seront capitales pour l’avenir de chaque pays. J’espère qu’il y aura des démocrates en poste, mais des réalistes et pragmatiques, pas des vendeurs de croisade du Bien contre le Mal.

      +3

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  • Grd-mère Michelle // 30.05.2023 à 13h56

    Excellent historique de « l’ordre mondial » (principalement économique et financier, comme décrit dans l’article). Énorme boulot très bien documenté.
    Mais, ne conviendrait-il pas plutôt de situer le début de sa stratégie de domination par les États-Unis (et la « grande » industrie) au début de la « guerre froide » plutôt qu’à la fin… Ou, plus précisément, à la fin de la seconde guerre mondiale et à leur terrifiante démonstration de force nucléaire…(si pas dès la fin de la première guerre mondiale…et la profonde division politique entre le monde communiste et le monde libéral?).
    À analyser aussi, la rivalité entre les USA et le RU (plus grand empire « moderne », démantelé par la volonté des peuples plus que par les conjonctures politico-économiques)… et leur connivence actuelle favorisant le maintien d’un « ordre » profondément injuste et rétrograde par rapport aux exigences vitales révélées par les nouveaux « savoirs » désormais largement partagés.

      +2

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  • egdltp // 01.06.2023 à 08h40

    Bravo pour cette mise en perspective de la transformation des relations inter organisations actuelles.
    Ce que je regrette c’est le silence sur le choix de la guerre pour traiter le sujet du proche des régimes « autoritaires ». La structure actuelle du monde ne tient que dans la confiance dans le dollar. Et les US auraient le mauvais rôle s’ils répondaient par la violence physique à l’abandon de leur monnaie dans les échanges dont ils ne sont pas partie prenante. Il se dit que c’est la volonté de Saddam d’utiliser une autre monnaie que le dollar pour son pétrole vendu à d’autres que les US, qui a conduit à la seconde guerre du Golfe.
    Par contre ce qui c’est passé à Hong Kong et en Ukraine montre la confiance qu’ont les régimes « autoritaires » dans la qualité de leur modèle face à celui proposé par l' »Occident ».
    Merci de cette analyse indépendamment de cet oubli politique qui peut être considéré comme hors sujet dans un papier économique…

      +1

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  • Louis // 01.06.2023 à 09h56

    Nous sommes en train de nous enfermer dans une espèce de prison politique dont le vrai pouvoir nous échappe, nos politiques sont-ils des décideurs ou des porte-paroles. D’un coté nous subissons les assauts d’une bourgeoisie industrielle et financière et de l’autre des pays émergents sont en pleine ascension avec parfois des demandes légitimes. Quand à l’indispensable diplomatie elle est aujourd’hui remplacée par des armements et peut être de la corruption. Certes nous allons vers un changement et l’histoire nous enseigne qu’il passe par des guerres et des destructions. L’UE c’était une belle histoire, hélas Adieu vielle Europe et que le diable t’emporte..

      +3

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  • Kanuni66 // 02.06.2023 à 08h15

    On n est pas dans le secret des Anges pour savoir avec exactitude ce qui attend la Société mondiale…Seulement l Empire américain peut céder le pas à l une ou l autre puissance émergeante comme il avait supplanté son allié britannique…La fin des Empires peut se faire d une manière non fracassante au style de l évanouissement de l Empire romain: les gens continuaient à s habiller comme les Romains, à parler latin…Les grandes révolutions se passent sur les pas des Colombes, à bas bruit! Débat fascinant déclenché les années 80 par le Professeur de Colombia (Kennedy)…

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