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3.mai.20163.5.2016 // Les Crises

Interview exclusive de l’ancien président du Brésil Lula da Silva, par Glenn Greenwald

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Source : The Intercept_, le 11/04/2016

Photo: Erick Dau for The Intercept

Photo: Erick Dau for The Intercept

Glenn Greenwald

Le 11 avril 2016

La vie de l’ancien président du Brésil, Luiz Inacio Lula da Silva (« Lula ») a suivi une trajectoire peu commune. Né dans une extrême pauvreté, Lula a quitté la présidence en 2010 après deux mandats, avec une cote de popularité jamais atteinte de 86%. Il était semble-t-il destiné à profiter du respect de tous dans le monde et à rester l’un des plus grands hommes d’État de l’histoire contemporaine. Tout comme Tony Blair et Bill et Hillary Clinton après l’exercice de leur fonction, Lula a engrangé une fortune personnelle depuis la fin de son mandat en donnant des conférences et en fournissant des services de conseil à des centres de pouvoir global. Le parti de la gauche modérée qu’il a cofondé, le Parti des Travailleurs (PT) assure la présidence depuis maintenant quatorze ans sans interruption.

Des manifestants montrent une énorme poupée gonflable à l'effigie de l'ancien président du Brésil Luiz Inacio Lula da Silva en tenue de prisonnier et l'actuelle présidente Dilma Rousseff habillée en voleuse, avec une écharpe où on peut lire

Des manifestants montrent une énorme poupée gonflable à l’effigie de l’ancien président du Brésil Luiz Inacio Lula da Silva en tenue de prisonnier et l’actuelle présidente Dilma Rousseff habillée en voleuse, avec une écharpe où on peut lire « Impeachment » [« destitution »] à Sao Paulo, Brésil, dimanche 13 mars 2016. Photo Andre Penner/AP

Mais tout cela, la totalité de l’héritage de Lula, est désormais sérieusement menacé. Un grave scandale de corruption très étendu et qui concerne la compagnie pétrolière nationale Petrobras engloutit l’élite économique et politique, avec le PT en son centre. Sa protégée et successeur choisie, ancienne militante marxiste anti-dictature et actuelle présidente, Dilma Rousseff, fait face à une menace crédible d' »Impeachment » (soutenue à présent par une majorité de brésiliens) et à une très large impopularité en raison d’une sévère et insurmontable récession. D’importants membres du PT ont été arrêtés et mis en prison. D’importantes manifestations de rue aussi bien en faveur que contre « l’impeachment » ont récemment mal tourné, avec des confrontations physiques de plus en plus fréquentes.

Lula lui-même a récemment été impliqué dans l’enquête criminelle (connue sous le nom d' »Opération lavage auto »), brièvement détenu par la police fédérale pour interrogatoire, accusé par l’ancien dirigeant de son parti au Sénat (devenu informateur) d’avoir dirigé un énorme dispositif de pots de vin et de rétro commissions. Il a été mis sur écoute par la justice – des enquêteurs ont rendu publics des enregistrements de ses appels téléphoniques –, il est formellement inculpé d’avoir reçu et caché des cadeaux suspects (y compris une maison et une ferme). En conséquence, sa cote de popularité au Brésil s’est effondrée.

Néanmoins, grâce au support ancré dans une large partie de la population pauvre du Brésil, sa cote de popularité est toujours plus élevée que la plupart des autres politiciens nationaux majeurs (qui doivent eux-mêmes combattre des accusations de corruption), et il est largement admis que Lula se représentera à la présidentielle au terme du mandat de Dilma – que ce soit en 2018 comme prévu ou plutôt si elle est destituée ou si elle démissionne. Personne qui a regardé la carrière de Lula – incluant ceux qui veulent le voir emprisonné – ne peut négliger l’hypothèse qu’il sera à nouveau président du Brésil (un nouveau sondage publié aujourd’hui montre Lula remportant la course présidentielle avec l’évangéliste/environnementaliste Marina Silva).

Lula a violement démentit les accusations portées contre lui et se présente lui-même comme une « victime » de la toujours-puissante classe ploutocratique du Brésil et de ses organes de presse qui forgent l’opinion publique. Il ajoute que le ciblage du PT est dû à l’incapacité de ces élites de battre le parti lors de quatre élections directes, et la crainte que Lula, une fois de plus, se lance et gagne. Il y a deux semaines, The Intercept publia un long article sur le scandale et sur les dangers qu’il pose pour la démocratie brésilienne, que j’ai écrit avec Andrew Fishman et David Miranda ; la semaine dernière, nous avons publié une version condensée dans les pages « lettre ouverte » du plus grand journal du Brésil, Folha de Sao Paulo. La prise de conscience que la destitution est dirigée à leur profit par des politiciens et des partis qui font face à des accusations de corruption beaucoup plus sérieuses que celles qui se répandent et visent Dilma a bloqué l’élan de la campagne pro-destitution qui, il y a seulement quelques semaines, semblait inévitable.

Vendredi, à l’institut Lula de Sao Paulo, j’ai mené la première interview face à face que Lula a donné depuis l’émergence de ces récentes controverses. Nous avons discuté des différents aspects du scandale de la corruption, la campagne de destitution, les accusations contre lui, son avenir politique ainsi que celui du PT, et le rôle du plus important média brésilien de droite dans l’incitation au changement de gouvernement. Nous avons aussi discuté de sa vision sur d’autres sujets brûlant d’actualité, comme les nouvelles lois antiterrorisme et d’espionnage, la guerre contre la drogue, les atroces conditions dans les prisons du pays, les droits LGBT, l’avortement, et le rôle des dons des entreprises dans les élections brésiliennes.

 

GLENN GREENWALD : Bonjour M. le président. Merci pour l’interview.

LUIZ INACIO LULA DA SILVA : Bonjour.

GREENWALD : Commençons par l’enquête dans l’opération « Lava Jato » (Lavage Auto). En 2008, la fraude et la corruption de Wall Street créa une terrible crise financière. Cela conduisit à un terrible calvaire économique pour beaucoup de pays, dont le Brésil, qui se poursuit aujourd’hui.

Plus incroyable, pas un seul homme d’affaires n’est allé en prison ou n’a été inquiété pour ces crimes. Cela donna à penser que les riches et puissants sont au-dessus des lois. Seuls les pauvres et les démunis sont punis pour leurs crimes.

Cependant ici au Brésil, avec l’opération Lava Jato, on voit le contraire : les riches et puissants du pays vont en prison. Milliardaires, magnats, des membres de presque tous les partis politiques.

Je sais que vous avez de nombreuses objections à propos de cette méthode. J’ai moi aussi signalé que le comportement du juge Sergio Moro (chef de l’opération Lava Jato) est devenu politique.

Cependant, êtes-vous d’accord qu’il y a un aspect positif pour le moment ? Cela lance un puissant message, disant que tous – qu’importe leur pouvoir, connections ou richesse – sont concernés par cette loi ?

DA SILVA : D’abord, notre parti, le PT (Parti des Travailleurs), le gouvernement et moi-même n’avons aucune raison d’être inquiétés par les enquêtes en ce que le gouvernement est à l’origine de ce qu’il est en train de se passer. Ce fut durant le gouvernement du PT que nous avons créé les conditions pour que nos institutions fonctionnent correctement.

Notre gouvernement a renforcé l’autonomie du bureau du procureur en nommant toujours un procureur choisi par ses pairs. Nous sommes ceux qui ont fait de la Police fédérale une institution qui fonctionne. Nous avons investi dans l’embauche de nouveaux professionnels, l’échange d’informations et l’autonomie de la Police fédérale.

Nous sommes ceux qui ont créé les sites internet sur la transparence du gouvernement. Nous avons mis en place une loi qui autorise tout journaliste à obtenir toute information du gouvernement à n’importe quel moment.

Nous sommes ceux qui ont renforcé les pouvoirs du Contrôleur des biens publics, qui est en charge de surveiller n’importe quel ministre et d’envoyer ses découvertes à la Cour des comptes. Nous sommes ceux qui ont développé – avec la Cour des comptes – une méthode qui lui a donné plus de latitude dans cette surveillance.

Donc, avant toute chose, le gouvernement a des responsabilités dans tout ce qui est en train de se passer.

Deuxièmement, je crois qu’il est important que pour la première fois les riches soient arrêtés. Au Brésil, nous arrêtions les pauvres pour avoir volé du pain, mais pas les riches pour avoir volé un milliard. Nous arrêtions des pauvres pour avoir volé des médicaments, mais pas un seul riche pour évasion fiscale.

Photo: Laura Colucci/Fireworx Media

Photo: Laura Colucci/Fireworx Media

GREENWALD : Est-ce le côté positif des choses ?

DA SILVA : Oui, c’est le côté positif – qui, je crois, est très important en ce qu’il nous permet de rêver que le Brésil sera un pays sérieux un jour.

Qu’est-ce que je vois comme négatif ? C’est une question que je me pose chaque jour de cette enquête. Pour que cette enquête avance, est-il vraiment nécessaire de transformer cela en « téléréalité », de faire exploser un feu d’artifices chaque jour ? Et ne jamais tenir compte du fait que, avec un gros titre ou un passage à la télévision, vous pourriez condamné quelqu’un qui va plus tard se révéler innocent ?

Est-il possible de conduire la même enquête, d’arrêter les mêmes gens sans la pyrotechnie ? Je le crois.

Est-il possible d’analyser combien coûte cette opération, combien d’argent retournera à nos comptes publics et combien cela coûte au pays ? Combien cette opération coûte à notre PIB, notre taux de chômage, quels sont les investissements qui quittent le pays.

GREENWALD : Mais pensez-vous que cette procédure a pour objet de détruire le PT ? Parce que 60% des politiciens accusés appartiennent au PP, un parti de l’aile droite, pas au PT.

DA SILVA : Je m’attarderai sur cette question du PT parce que j’espère qu’il y aura une question spécifique à venir. Avant toute chose, lorsque vous créez une loi, établissez les conditions pour que les institutions fonctionnent bien, il n’y a pas de protection – la seule protection est celle qui suit la loi. C’est faire les choses bien, ne pas faire d’erreurs. Et si le PT fait des erreurs, le PT doit payer pour cela comme tous les autres partis politiques ou toute autre personne qui n’appartient pas à un parti, parce qu’après tout la loi s’applique à tous. C’est la façon de consolider la démocratie au Brésil et partout ailleurs sur terre.

Deuxièmement, ce que je trouve bizarre avec la transaction pénale, et je le dénonce depuis décembre 2014, ce n’est pas quelque chose de nouveau, ce que je trouve bizarre c’est comment l’information fuite de manière sélective. Et c’est généralement conte le PT. Lorsqu’il y a une accusation contre un autre parti politique, la presse en parle en petits caractères. C’est à la télévision pendant 5 secondes. Lorsqu’il s’agit du PT, vous avez 20 minutes à la télévision, la première page des journaux, ce qui rend clair comme de l’eau de roche que ces deux dernières années il y a une tentative de criminaliser le PT.

GREENWALD : Oui, nous parlerons de cela dans quelques minutes. Mais avant cela, je veux vous demander : à plusieurs occasions vous avez utilisé le terme « coup d’État » pour décrire la procédure de destitution contre la présidente Dilma. La Constitution brésilienne établit explicitement la possibilité de la destitution. Et cette procédure est menée sous l’autorité de la Cour suprême, avec onze membres : huit choisis par le PT, trois par vous-même et cinq autres par la présidente Dilma. Et cette cour a rendu plusieurs décisions en votre faveur. Comment cette procédure peut-elle être appelée coup d’état ?

Une manifestante tenant un drapeau avec écrit en portugais sur un autocollant « A bas le coup d'État, non à la destitution » lors d'une manifestation de soutien à la présidente du Brésil Dilma Rousseff et de l'ancien président Luiz Inacio Lula da Silva à Sao Paulo, au Brésil, 31 mars 2016. Photo: Andre Penner/AP

Une manifestante tenant un drapeau avec écrit en portugais sur un autocollant « A bas le coup d’État, non à la destitution » lors d’une manifestation de soutien à la présidente du Brésil Dilma Rousseff et de l’ancien président Luiz Inacio Lula da Silva à Sao Paulo, au Brésil, 31 mars 2016. Photo: Andre Penner/AP

DA SILVA : Elle a aussi rendu des décisions contre nous à plusieurs reprises. Laissez-moi vous dire…

GREENWALD : Tous les tribunaux font cela. Mais comment peut-il y avoir un coup d’État lorsque cela se produit sous l’autorité d’une cour de justice ?

DA SILVA : Je vais vous dire pourquoi c’est un coup d’État. C’est un coup d’État parce que quoique la Constitution brésilienne permette la destitution, il est nécessaire pour la personne d’avoir commis ce qui est appelé un crime ou un délit. Et la présidente Dilma n’a commis ni crime ni délit. Par conséquent, ce qui se passe actuellement est une tentative par certains de prendre le pouvoir au mépris du vote populaire.

Chacun a le droit de vouloir devenir président, tout le monde. Ils n’ont qu’à se présenter. J’ai perdu trois élections, trois ! Je n’ai pris aucun raccourci. J’ai attendu 12 ans pour devenir président. Toute personne qui veut devenir président, au lieu d’essayer de faire tomber le président, peut se présenter à une élection. J’en ai fait trois et je ne me suis pas mis en colère.

Voilà pourquoi je pense que la destitution est illégale. Il n’y a eu ni crime ni délit. En effet, je pense que ces gens veulent renverser Dilma de ses fonctions au mépris de la loi. La réalisation, la façon dont je le vois, un coup d’État. Voilà ce qu’il est : un coup d’État.

GREENWALD : Ils ne peuvent gagner les élections. Je veux vous demander : le PT a demandé la destitution de trois présidents avant vous. Croyez-vous que ces trois présidents aient été impliqués dans des crimes ou délits qui justifiaient leur destitution ?

DA SILVA : Non. Le PT a demandé la destitution de Collor et cela parce qu’il avait commis des crimes et délits. Avec Fernando Henrique Cardoso, la Chambre des députés n’a pas accepté la requête. Donc elle est morte d’elle-même. Peut-être parce qu’il n’y avait pas de crimes ou de délits. Maintenant, cette demande de destitution ne pouvait pas non plus être niée.

Pourquoi a-t-elle été demandée? Pourquoi ont-ils ouvert une procédure et l’ont-ils envoyée à la commission? Parce que le président de la chambre était en colère parce que le PT n’a pas voté avec lui au comité éthique et il a alors décidé de s’en prendre en retour au PT en essayant de fabriquer cette destitution de la présidente Dilma, ce qui est selon moi un gigantesque abus dans ce scénario politique.

Réunion pour les élections présidentielles à Sao Bernardo Do Campo en 1989. Photo: Gamma-Rapho/Getty Images

Réunion pour les élections présidentielles à Sao Bernardo Do Campo en 1989. Photo: Gamma-Rapho/Getty Images

GREENWALD : Je voudrai parler d’Edouardo Cunha, le président de la Chambre des députés. La preuve qu’il est impliqué dans des faits de corruption est incontestable. Ils ont découvert ses comptes en Suisse remplis de millions de dollars qu’il ne peut expliquer. Il a clairement menti au Congrès lorsqu’il a nié avoir des comptes bancaires à l’étranger. Comment peut-on expliquer aux étrangers – et aux Brésiliens – comment un homme si corrompu peut, pas seulement rester chef du Congrès national, mais également mener une procédure de destitution contre la présidente ?

DA SILVA : Ce qui est encore plus grave c’est la façon dont la presse le traite de manière tout à fait normale, contrairement à Dilma. En vérité, Dilma est jugée par des gens qui ont été accusés de crimes. Et elle n’a pas une seule accusation contre elle. L’accusation contre elle est celle d’irrégularités budgétaires. Et cette accusation n’est pas un crime et son budget n’a même pas été revu par le Congrès national.

GREENWALD : Expliquez-moi cela, parce que je pense qu’il y a beaucoup d’étrangers qui ne peuvent le comprendre.

DA SILVA : Il n’y a pas d’explication, à part que certaines personnes dans ce pays perdent la raison. Le Congrès national pourrait montrer un peu de dignité en tenant compte du fait qu’ils ne sont pas dans les conditions politiques pour mener un procès contre Dilma comme ils le font. Edouardo Cunha n’a pas la respectabilité nécessaire, au Congrès, ou dans la société, pour le mener. Mais cela continue, parfois même sous la protection de certains secteurs des médias, ce qui je pense est très grave.

Ce qui m’inquiète le plus dans tout cela c’est que le Brésil ne connaît la démocratie que depuis 31 ans. Cela a été notre plus longue période de démocratie ininterrompue. Et ce que nous sommes en train de faire actuellement, c’est tenter de jouer avec la démocratie. Et nous ne devrions pas jouer avec la démocratie, parce que chaque fois que nous le faisons, chaque fois que nous nions la politique, ce qui vient après est pire.

GREENWALD : Il existe de solides preuves de corruption au sein des partis d’opposition au gouvernement du PT – c’est clair – mais êtes-vous d’accord qu’il existe également un sérieux problème de corruption au sein du PT ?

DA SILVA : Laissez-moi vous dire quelque chose : jusqu’à présent, il y a une négociation de peine dans une affaire contre le trésorier du PT. Il était impliqué pendant une négociation de peine et le cas est toujours en attente de procès. Il dit qu’il ne l’a pas fait. Dans cette procédure vous avez une négociation. Un homme d’affaires peut sans sortir en essayant de rejeter la faute sur quelqu’un d’autre. N’importe quand, quelqu’un peut vous accuser d’avoir reçu de l’argent d’une société.

Ce que je trouve fantastique et ironique c’est que c’est comme si les sociétés avaient deux types de comptes : un avec de l’argent propre et un avec de l’argent de sale. Celui contenant l’argent propre est pour le PWDB, le PMDB et les autres partis. Alors que celui avec l’argent sale est pour le PT. Croire cela c’est de la démence, c’est le moins que l’on puisse dire. C’est, au mieux, un échec quant à la compréhension de ce moment historique… et je ne dis pas que le PT est exempt de tout reproche, et si le PT est coupable il devra payer comme n’importe quel autre parti. Le PT n’est pas à l’abri – ce que je dis c’est qu’en cette période…

GREENWALD : Mais il y a un sérieux problème.

DA SILVA : En cette période historique, ce qui est réel, c’est une tentative de criminaliser le PT, de renverser Dilma et d’empêcher toute possibilité à Lula de revenir un jour comme candidat aux présidentielles dans ce pays.

GREENWALD : Je comprends votre raisonnement et tout ce que vous venez de dire, mais je veux être très clair concernant ma question. Croyez-vous… qu’il y ait de sérieux problèmes, je pense à des cas de corruption encore pire dans d’autres partis, y compris au sein de ceux qui mènent actuellement la procédure de destitution contre Dilma. Mais vous, en tant que l’un des membres fondateurs du PT, la personne la plus importante du PT avec la présidente Dilma, admettez-vous qu’il y a un sérieux problème de corruption dans votre parti ?

DA SILVA : Je pense qu’il y a un problème dans mon parti. Je ne crois pas… laissez-moi vous dire une chose, lorsque le scandale « mensalão » a commencé, certains secteurs des médias ont dit que c’était la plus grande affaire de corruption dans l’histoire de la planète. Puis la procédure a débuté et c’est devenu de plus en plus difficile d’apporter des preuves.

Puis, pour consolider leur affaire, ils ont sorti la notion de « prévalence des faits », la théorie de la « prévalence des faits ». Ce qui signifie qu’ils n’avaient pas à apporter une quelconque preuve. Vous dirigez l’organisation? Alors vous êtes responsable. C’est ainsi que ça s’est passé durant le scandale « mensalão ». Maintenant ils construisent une nouvelle théorie. Nous menons notre campagne en octobre 2014 et un magazine publie en couverture : « Lula et Dilma étaient au courant de tout. » Vous vous souvenez de cela ?

GREENWALD : Oui, bien sûr.

DA SILVA : Laissez-moi vous dire une chose. Ça fait deux ans. Chaque jour il y a un article, chaque jour il y a un tweet, chaque jour je reçois l’information : « Regardez, ils ont arrêté untel et untel qui sont sur le point de tout révéler sur l’implication de Lula. »

GREENWALD : Juste pour clarifier un point : l’ancien dirigeant du PT au Sénat a dit que vous saviez à propos du système de pots de vin et que vous les commandiez.

DA SILVA : Laissez-moi vous dire, Delcidio voulait sortir de prison. Delcidio avait de forts liens avec Petrobras, même avant le PT. Il était fortement lié à Petrobras pendant la présidence de Fernando Henrique Cardoso. Il avait une forte connexion avec Petrobras parce qu’il était sur le terrain depuis longtemps. Pour résumer : Delcidio a menti sans vergogne.

GREENWALD : Pourquoi?

DA SILVA : Pour sortir de prison. Selon toute évidence, pour sortir de prison.

Photo: Laura Colucci/Fireworx Media

Photo: Laura Colucci/Fireworx Media

GREENWALD : De nombreuses recherches ont révélé un fort sentiment généralisé d’indignation vis-à-vis du gouvernement et du PT, y compris venant de personnes qui les soutenaient depuis longtemps. Croyez-vous que toute cette colère envers le PT est illégitime ou acceptez-vous que dans certains cas elle soit justifiée ?

DA SILVA : Je ne crois pas que la haine qui a été encouragée contre le PT l’emportera. Aujourd’hui nous vivons une période où la haine contre le PT est alimentée 24 heures sur 24 C’est le parti qui a le plus fait progresser les politiques sociales dans le pays. Le parti qui, en seulement douze ans, a changé l’histoire de ce pays. Nous avons donné aux travailleurs un visage ; nous avons donné un visage et une citoyenneté aux démunis. Tout ce qu’ils n’ont jamais eu. C’est pourquoi la haine est encouragée par des gens qui ne savent pas comment partager l’espace public avec des gens qui viennent d’en bas.

Je me sens en paix et c’est pourquoi je peux débattre de cela en toute tranquillité. Parce que je peux dire : je doute qu’il y ait un homme d’affaires, ami ou adversaire, qui puisse dire qu’il a un jour négocié un quelconque deal malhonnête avec moi. Je vois les choses arriver, j’assiste aux mensonges, je vois les inventions contre Lula. Ils ont fabriqué un appartement qui était censé m’appartenir. Quelqu’un va devoir me donner cet appartement.

GREENWALD : Mais êtes-vous conscient qu’il y a beaucoup de gens, y compris des partisans du PT, qui souffrent dans cette économie ? Bien sûr, vous en avez conscience.

DA SILVA : Oui.

GREENWALD : Et le gouvernement du PT – et je sais qu’il y a beaucoup de causes qui n’ont rien à voir avec le gouvernement et concernent l’économie globale et la Chine– mais y a-t-il une certaine responsabilité qui peut être attribuée à la présidente Dilma quant à cette souffrance ?

DA SILVA : Commençons par la partie économique, d’accord ? Parlons d’économie. Le Brésil souffre des conséquences les plus perverses d’une crise économique mondiale causée par le système mondial lui-même. La première qui a commencé aux États-Unis, qui est devenue encore pire après la banqueroute de Lehman Brothers et qui n’a toujours pas été résolue malgré les 13 trillions de dollars dépensés.

Durant le premier sommet du G20 en 2009, je proposais que si nous souhaitions résoudre la crise, au lieu de couper dans les dépenses, nous avions besoin d’investir davantage dans les pays les plus pauvres afin de les aider à obtenir de l’argent bon marché, pour qu’ils puissent se développer. Nous sommes tous d’accord sur le fait que le protectionnisme devait être évité et que le commerce international était nécessaire, spécialement en Amérique latine et en Afrique.

Ils étaient tous d’accord sur ce point et cela apparaît dans la première déclaration des dirigeants du G20 du sommet de Londres. En attendant, chaque pays est allé de l’avant avec ses propres mesures protectionnistes. En 2009, je critiquais cela, disant que le problème des crises économiques était le manque de leadership politique. Les politiques mondiales ont été sous-traitées et d’importantes décisions sont maintenant prises par des bureaucrates pendant que les dirigeants se cachent.

GREENWALD : Mais le gouvernement brésilien est-il totalement exempt de tout reproche sur cette question ?

DA SILVA : Je vais maintenant parler du Brésil ; je voulais juste replacer la crise dans son contexte en premier lieu. Il est impossible d’imaginer que la crise est toujours en cours en Europe ou que les États-Unis ne l’ont pas encore réduite. Mais tout cela est dû au fait qu’ils ont choisi de réduire les dépenses alors que c’est précisément la force qui est capable d’augmenter la production et l’industrie dans un pays.

De 2011 à 2014, le gouvernement brésilien a poursuivi une politique d’allègements et d’abattements fiscaux et a donné jusqu’à 500 milliards de réaux dans le but de booster la croissance. Cela a conduit à un très faible taux de chômage en décembre 2014 de seulement 4,3%. Vous pouvez comparer le Brésil à la Finlande ou même à la Suède avec un tel taux de chômage.

Toutefois, le gouvernement n’a pas vu à quel point ces allègements fiscaux ont diminué ses revenus issus des impôts et ont vidé les caisses de l’État. Dilma, selon toute évidence, ne voulait pas changer cela durant les élections. Après qu’elle a été réélue et officiellement engagée auprès du peuple, elle a offert un réajustement et a commencé à changer quelques petites choses concernant les droits des travailleurs. Et cela a retourné contre nous une grande partie de notre électorat, ce que nous n’avons toujours pas réussi à arranger pour l’instant.

C’est exactement ce dont j’ai discuté avec la présidente Dilma, lui disant que la seule façon de faire face à cela est de promouvoir de nouvelles politiques qui amènent de nouveaux espoirs et opportunités dans la société brésilienne. Ceux qui ont aujourd’hui grimpé un échelon social supplémentaire ne peuvent retomber. Ils doivent se maintenir à leur niveau. Voilà pourquoi nous avons besoin d’une politique économique qui encourage les financements, les prêts, les dépenses, la micro-industrie, les petites et moyennes entreprises, quelque chose qui va nous remettre en piste.

GREENWALD : Est-il possible de justifier les programmes d’austérité proposés par le gouvernement ? Pensez-vous que cela serait pire avec un autre parti politique ?

DA SILVA : Laissez-moi vous dire une chose, il n’y a pas d’austérité.

GREENWALD : Rien de ce genre au Brésil ?

DA SILVA : Ce que nous avons c’est un manque de revenus provenant des impôts et, sans revenus, vous ne pouvez dépenser – la même chose se produit pour ma maison et la vôtre et pour le gouvernement et une société. En d’autres termes, le gouvernement a baissé les impôts croyant que l’économie mondiale se remettrait rapidement, mais elle ne le fit pas, ni le Brésil.

Donc qu’est-ce qui doit être fait aujourd’hui ? Le gouvernement ne peut continuer une année de plus avec des coupes budgétaires, ce dont nous devons discuter c’est de la croissance. Parlons de l’investissement. Si aucun budget public n’est disponible, nous devons créer du financement.

Nous devons rechercher des partenaires. Nous devons développer des projets stratégiques avec d’autres pays. Au milieu d’une crise, nous devons faire ce que nous n’étions pas capables de faire en période normale. Nous devons être plus courageux et plus innovants.

GREENWALD : Il y a une croyance commune en Occident que le PT a beaucoup en commun avec les partis de gauche en Bolivie, au Venezuela, à Cuba ou en Équateur et que vous et Dilma aimeriez mettre le Brésil sur la même voie. J’ai aussi entendu ça souvent parmi des brésiliens. Est-ce vrai ? Quelles sont les principales différences entre le PT et ces partis politiques ?

DA SILVA : Ne soyez pas injuste avec le PT, pour l’amour de dieu, parce que le PT a davantage en commun avec le SPD allemand et le Parti travailliste britannique. Aussi avec le Parti socialiste français et le Parti socialiste espagnol. Le PT a beaucoup en commun avec eux.

Laissez-moi vous dire une chose, le PT est le plus grand parti de gauche d’Amérique latine, il n’a même pas défini quel genre de socialisme il suit puisque le PT dit qu’il sera défini et construit par le peuple lui-même et non par le PT avec sa douzaine d’intellectuels lui disant quel genre de socialisme nous voulons. Le PT est plus ouvert que les autres partis de gauche d’Amérique latine. Nous sommes meilleurs, plus diversifiés. Aucun autre parti politique au monde n’est plus démocratique ou ouvert que le PT. A l’intérieur du PT il y a tout ce que vous pouvez imaginer – c’est comme l’Arche de Noé, ce qui signifie que n’importe qui ou n’importe quelle croyance politique est bienvenu au PT. Toutefois, il faut comprendre que lorsqu’une chose est décidée par le PT, cela devient une obligation pour tous ses membres.

Les supporters du Parti des travailleurs (PT) manifestent en soutien à la présidente Dilma Roussef et à l'ancien président Luiz Inacio Lula da Silva à Rio de Janeiro, Brésil, le 18 mars 2016. Photo: Yasuyoshi Chiba/AFP/Getty Images

Les supporters du Parti des travailleurs (PT) manifestent en soutien à la présidente Dilma Roussef et à l’ancien président Luiz Inacio Lula da Silva à Rio de Janeiro, Brésil, le 18 mars 2016. Photo: Yasuyoshi Chiba/AFP/Getty Images

GREENWALD : Vous avez tenu une conférence de presse avec des correspondants étrangers il y a deux semaines et avez dit quelque chose de très intéressant au sujet du juge Sérgio Moro. Vous avez dit qu’il est un individu intelligent et compétent, mais, pour reprendre vos mots, « c’est humain », les gens avec un grand pouvoir et objets de beaucoup d’adoration sont susceptibles d’être tentés d’abuser de ce pouvoir. Cela s’applique-t-il à vous aussi ?

DA SILVA : Le truc, c’est que je n’ai aucun pouvoir.

GREENWALD : Aucun pouvoir ?

DA SILVA : Je n’ai pas de pouvoir. Lorsque j’ai eu du pouvoir, lorsque j’étais président, la chose dont j’étais le plus fier c’était que la société était plus impliquée dans la prise de décision sous mon gouvernement qu’à aucun autre moment.

GREENWALD : Lorsque vous avez eu du pouvoir et si vous en avez à nouveau un jour, est-ce que cela s’appliquera également à vous ? L’idée que les gens qui ont beaucoup de pouvoir peuvent être tentés d’en abuser ?

Un travailleur colle une affiche de campagne pour le candidat brésilien à la présidence Luiz Inacio Lula da Silva, du Parti des Travailleurs(PT), le 24 octobre 2002, à Sao Paulo, au Brésil. Photo: Marucio Lima/AFP/Getty Images

Un travailleur colle une affiche de campagne pour le candidat brésilien à la présidence Luiz Inacio Lula da Silva, du Parti des Travailleurs(PT), le 24 octobre 2002, à Sao Paulo, au Brésil. Photo: Marucio Lima/AFP/Getty Images

DA SILVA : Je pense que toute personne qui a trop de pouvoir est vulnérable. Toutefois, tout être humain n’est pas forcément capable de gérer sa popularité. Les médias, les photographes, peuvent causer beaucoup de dommages. J’ai vu beaucoup de gens, des joueurs de baseball, de football, de billard aux juges, aux sénateurs, aux représentants de l’État et même aux présidents y succomber.

GREENWALD : Devez-vous aussi combattre ce danger ?

DA SILVA : Bien sûr ! Depuis que j’ai été un dirigeant de syndicat, j’ai été conscient que je devais être très prudent pour ne pas me laisser influencer par l’adoration des médias. Je sais combien cela peut être agréable d’être en couverture d’un journal, d’être à la télévision tous les jours. Mais si vous n’êtes pas attentif et responsable, vous pouvez emprunter un mauvais chemin. De plus, celui qui pense qu’il est indispensable, qui commence à penser qu’il est irremplaçable, commence à devenir un dictateur, ce qui est très mauvais.

GREENWALD : Je voudrais parler des médias brésiliens et de leur rôle dans l’incitation aux manifestations contre la présidente Dilma et les pressions pour son départ. En tant que journaliste qui n’est pas brésilien mais qui a vécu ici longtemps, je suis choqué par les médias locaux. Globo, Veja, Estadao sont impliqués dans un mouvement contre le gouvernement et pour l’opposition. Ils prétendent être impartiaux lorsqu’ils servent en réalité de principal outil de propagande. La plupart d’entre eux sont détenus par de très riches et puissantes familles, est-ce un danger pour la démocratie ?

DA SILVA : Oui, ça l’est.

GREENWALD : Pourquoi cela ?

Après la nomination de l'ex-président Luiz Inacio Lula da Silva comme chef de cabinet de ministre, des centaines de gens sont descendus avenue Paulista, dans le centre de Sao Paulo, au Brésil, pour protester contre lui et le gouvernement de la présidente Dilma Roussef, le 17 mars 2016. Photo: Gustavo Basso/NurPhoto/Sipa USA/AP

Après la nomination de l’ex-président Luiz Inacio Lula da Silva comme chef de cabinet de ministre, des centaines de gens sont descendus avenue Paulista, dans le centre de Sao Paulo, au Brésil, pour protester contre lui et le gouvernement de la présidente Dilma Roussef, le 17 mars 2016. Photo: Gustavo Basso/NurPhoto/Sipa USA/AP

DA SILVA : Laissez-moi vous dire ce qui, je pense, serait la meilleure situation pour le monde : ce serait des médias extrêmement démocratiques qui ont une opinion politique et l’expriment dans leurs éditoriaux, mais restent très fidèles aux faits. Pas de versions ou de points de vue – des faits. De nos jours au Brésil, nous n’avons pas de partis d’opposition, en réalité, l’opposition ce sont les médias eux-mêmes.

GREENWALD : Globo, Veja…

DA SILVA : Nous avons trois journaux, magazines et chaînes de télévisions qui s’opposent ouvertement au gouvernement. Ils appellent à des marches et manifestations. Ils incitent à la haine. Vous voyez, j’ai perdu trois élections. J’ai perdu une fois, deux fois et une troisième fois, et chaque fois, je rentrais à la maison, râler et chercher le soutien de ma femme et de mes compagnons du PT. Puis un jour j’ai gagné, et contrairement à moi, ils ne savent pas perdre et ils ont perdu encore contre Dilma. Ils en sont encore au même point aujourd’hui. Depuis que le parti est fragile, les médias ont assuré le rôle du parti. C’est sérieux. C’est un risque pour la démocratie.

Lorsque j’ai fini mon mandat en 2010, nous avons tenu une conférence de communication nationale. Nous avons construit un modèle réglementaire qui pourrait être le modèle américain, britannique ou français – pas le modèle chinois ou cubain. Malheureusement, il n’a jamais atteint le Congrès étant donné que notre réglementation remontait à 1962, lorsque nous n’avions pas de satellites, d’internet, de télévision digitale ou même de fax. Nous n’avions rien de tout cela. Nos réglementations dataient de 1962 ! Et ils ne veulent pas les changer ! Je pense que nous reparlerons de ça bientôt.

GREENWALD : Mais les médias ont au moins accepté ou même soutenu votre candidature en 2002 et 2006, n’est-ce pas ?

DA SILVA : Non, ils ne l’ont pas fait. En 2002, il était certain que j’allais gagner. En 2002, je n’étais pas inquiet parce que quelque chose me disait qu’avec cette élection ce serait mon tour de devenir président.

Donc les médias n’étaient bien sûr pas hostiles. Toutefois en 2006, j’étais déjà président mais ils ont soutenu le candidat en quatrième position plus qu’ils ne m’ont soutenu moi, le candidat en première position et président. Ils ont fait tout ce qu’ils ont pu pour que je perde. Lorsqu’Alckmin est passé au second tour, ils ont célébré ma défaite imminente. Qu’est-ce qui s’est passé ensuite? Alckmin a eu moins de votes au second tour qu’au premier, alors que j’ai eu 62 pour cent des votes.

Puis ils ont tous pensé que je n’aurais aucun successeur, ils ont tous pensé que Serre deviendrait président en 2010 et nous avons présenté une femme de gauche, avec peu d’expérience politique, qui a passé trois ans et demi en prison, qui a été torturée et sans expérience politique.

OB : tiens, nos médias ont oublié de le dire… Source : Wikipedia

Pendant la dictature militaire, Dilma Rousseff intègre le commando de libération nationale, mouvement de résistance, devenu plus tard leVAR Palmares. Arrêtée en 1970 (à 23 ans), elle est torturée pendant vingt-deux jours, puis condamnée par un tribunal militaire et détenue trois ans jusqu’en 19733.

À l’époque de sa détention, elle est surnommée la « Jeanne d’Arc de la guérilla », en raison de son implication dans le mouvement3.


Sinon, au moment du vote de destitution : « Le vote se fait dans un climat de haine politique, l’un des députés saluant la mémoire du colonel Ustra, qui avait torturé en personne Dilma Roussef sous la junte militaire ». (pas entendu non plus…)

Donc cette femme a été élue président et, n’oublions pas, elle a eu un bon premier mandat. Les gens se plaignaient qu’elle n’aimait pas discuter des problèmes ; qu’elle n’aimait pas faire de la politique. Détails. Le fait est que, lorsque les nouvelles élections sont arrivées, ils ont tous parié sur sa défaite, « Dilma va perdre ! Dilma va perdre ! » Mais elle n’a pas perdu. Ils sont tous devenus fous.

GREENWALD : Ils n’acceptent toujours pas les résultats aujourd’hui ?

DA SILVA : Non, toujours pas.

GREENWALD : J’aimerais maintenant changer un peu de sujet. Lorsque le rapport montrant que la NSA effectuait une surveillance électronique du Brésil a émergé, vous, ainsi que la présidente Dilma, l’avez fortement dénoncée, la qualifiant d’atteinte grave à la vie privée. Vous avez dit la même chose lorsque vos propres conversations privées avec Dilma ont été révélées par le juge Moro.

Récemment, le gouvernement a adopté une nouvelle loi antiterroriste, fermement soutenue par Dilma elle-même, qui donne à son gouvernement des pouvoirs d’espionnage très étendus. N’est-ce pas contradictoire ? Que pensez-vous de cette nouvelle loi ?

DA SILVA : J’étais contre cette loi parce que je ne pense pas que ce modèle puisse s’appliquer au Brésil autant qu’aux autres pays qui sont directement affectés par le terrorisme. Le Brésil, Dieu merci, n’a pas ce genre de problèmes, même si certaines personnes pensent que nous devrions nous en inquiéter.

GREENWALD : Le gouvernement a-t-il exploité les peurs ?

DA SILVA : Non, je ne le pense pas. Ils étaient juste inquiets à propos des jeux Olympiques et ont sur-réagi. Ce n’est pas un pays où les gens commettent traditionnellement des actes terroristes.

GREENWALD : Mais ces pouvoirs d’espionnage que le gouvernement brésilien a désormais sont très dangereux.

DA SILVA : Je ne les aime pas non plus. Laissez-moi vous dire quelque chose. Je suis très inquiet de la transformation de l’appareil d’État, et par-dessus tout de l’appareil policier, qui est très puissant. Parce que cela va à l’encontre de la démocratie, à l’encontre des institutions démocratiques. Je pense que nous avons besoin de trouver un équilibre. Nous n’avons pas besoin de créer un monstre pour nous défendre nous-mêmes contre un monstre.

GREENWALD : Plusieurs organisations de défense des droits de l’homme se plaignent que le Brésil viole les droits de ses prisonniers étant donné les conditions inacceptables qui existent dans les prisons. Beaucoup de gens sont retenus prisonniers sans même un procès.

Une grande partie de ce problème vient de la lutte contre la drogue, que le PT a toujours soutenue, mais qui conduit trop de brésiliens – la plupart pauvres, noirs et jeunes – a être mis en prison. Par le passé, vous avez soutenu cette lutte. Maintenant, l’ancien président Henrique Cardoso, aux côtés de beaucoup d’autres dirigeants, dit que cette lutte a échoué et est inhumaine.

Etes-vous d’accord avec eux, ou voulez-vous continuer cette lutte ?

DA SILVA : Cette lutte a échoué car le système judiciaire est trop lent. Il y a des gens qui ont été en prison durant deux ou trois ans sans procès. C’est la même chose avec l’enquête de l’opération « Lava Jato ». Le problème vient du système judiciaire.

GREENWALD : Personne ne se soucie d’une personne jeune, pauvre et noire qui reste deux ou trois ans en prison sans procès.

DA SILVA : Mais c’est un choix délibéré ici, vous savez. Et nous l’avons dénoncé. J’ai eu beaucoup de réunions avec des groupes de jeunes venant de communautés pauvres, il y a un choix délibéré, en fait, à arrêter les gens noirs et pauvres, à tuer les gens noirs et pauvres. Cela signifie qu’il y a un problème que nous essayons de résoudre – pas seulement en tant que parti, mais aussi au niveau judiciaire, des organisations de juges – sur la façon dont nous allons accélérer, vous savez, la libération et le procès de ces gens.

GREENWALD : Mais avec les conditions de détention dans les prisons brésiliennes, est-il juste de mettre quelqu’un en prison pour une année, deux années, trois années, six mois, ou une quelconque durée pour possession de drogue avec ce niveau de pauvreté ?

DA SILVA : Je suis pour la dépénalisation (des drogues) ; par conséquent je ne pense pas qu’un citoyen qui commet un ancien délit devrait être en prison. Je ne pense pas qu’un citoyen qui est pris, un consommateur de drogue, devrait être arrêté. Dans beaucoup de cas cette personne a besoin de consultations psychologiques plus que d’aller en prison. C’est une chose d’arrêter un trafiquant de drogue et c’en est une autre d’arrêter un consommateur. Je suis contre cela. Vous savez, nous nous sommes battus contre cela. Maintenant, nous avons un problème au Brésil : nous avons toujours un système judiciaire très conservateur.

GREENWALD : Ma dernière question : durant longtemps, le Brésil était un des leaders en Amérique latine, sur la thématique de l’égalité des gays. En fait, le Brésil a été plus progressiste que les États-Unis et beaucoup de pays d’Europe sur cette question. Mais maintenant il y a ce mouvement évangélique très fort au Brésil qui veut retourner en arrière, et je sais que vous avez soutenu la défense des droits LGBT dans le passé, mais je veux vous demander : soutenez-vous une égalité absolue pour les LGBT en droit ?

DA SILVA : J’approuve !

GREENWALD : Y compris le droit de se marier ?

DA SILVA : Laissez-moi vous dire quelque chose, mon ami, au Brésil beaucoup de choses importantes se sont produites. J’ai été le seul président qui a pris part à une conférence nationale avec la communauté LGBT. Lorsque beaucoup de gens pensaient que c’était dangereux pour moi d’aller à la conférence, j’y suis allé, avec deux mille personnes. Ce fut une extraordinaire leçon pour le gouvernement. Deuxièmement, nous nous sommes débrouillés pour faire approuver les unions civiles par la Cour suprême, ce qui fut un progrès extraordinaire, vous savez ?

GREENWALD : Mais ce n’est pas l’égalité.

DA SILVA : Avec le Plan pour l’éducation nationale nous…

GREENWALD : Mais ils n’ont pas les mêmes droits que pour les mariages hétérosexuels. C’est moins…

DA SILVA : Mais quoi qu’il en soit, faire en sorte que la Cour suprême prenne une telle décision fut un progrès extraordinaire. Je soutiens le droit des gens à décider de ce qui est le mieux pour eux.

Le président Luiz Inacio Lula da Silva tient un drapeau du mouvement gay lors de la cérémonie d'ouverture de la première conférence nationale pour les gays, les lesbiennes et les transsexuels, le 5 juin 2008, au Brésil. Photo: Joedson Alves/AFP/Getty Images

Le président Luiz Inacio Lula da Silva tient un drapeau du mouvement gay lors de la cérémonie d’ouverture de la première conférence nationale pour les gays, les lesbiennes et les transsexuels, le 5 juin 2008, au Brésil. Photo: Joedson Alves/AFP/Getty Images

GREENWALD : Y compris le droit de se marier ?

DA SILVA : Y compris le droit de se marier. Lorsque je parle des unions civiles je veux aussi dire le mariage, ok ? Je crois sincèrement que les gens devraient vivre comme ils le choisissent. Dès lors que chacun d’entre nous respecte les droits des autres, vous voyez ?

Ici au Brésil, lorsqu’il était question de l’avortement, et il a été dit que c’était un crime de le faire, j’avais l’habitude de dire « Regardez, moi, en tant que citoyen, père de cinq enfants, je suis contre l’avortement. Mais moi, en tant que président du Brésil, j’ai affaire avec la question de l’avortement en tant que problème de santé publique. »

GREENWALD : Parce qu’une femme a le droit de choisir et vous non ?

DA SILVA : Bien sûr ! Bien sûr ! Vous savez, je pense que le Brésil a beaucoup progressé, mais dans certains domaines nous sommes toujours très en retard.

[Diaphonie]

DA SILVA : Je voulais juste vous dire quelques choses de plus concernant l’opération « Lava Jato », vous qui êtes étranger. Laissez-moi vous dire ce qui m’inquiète avec cette histoire de « Lava Jato », à savoir qu’il y a une autre thèse en jeu, une thèse de contrôle sur les faits. Il y a l’idée que premièrement vous détectez un criminel, vous l’étiquetez en tant que criminel, et ensuite vous cherchez un crime à lui coller. Je dis cela car chaque jour quelqu’un le dit, « Ils veulent attraper Lula ! Ils veulent attraper Lula ! C’est Lula qu’ils veulent attraper ! » Et on me dit cela tous les jours.

GREENWALD : Parce qu’ils pensent que vous vous présentez à nouveau comme président. Est-ce vrai ?

DA SILVA : Je ne sais pas. Si c’est la raison, c’est stupide. Écoutez, je doute qu’il y ait un seul homme d’affaires dans ce pays qui pourrait dire qu’ils ont négocié un quelconque deal malhonnête avec moi.

GREENWALD : Dans le temps, ils vous ont donné un important montant d’argent pour soutenir votre campagne ; vous avez reçu beaucoup de soutien d’hommes d’affaires, de grandes entreprises…

DA SILVA : Au Brésil, seuls les gens riches ont de l’argent à donner pour les campagnes. Soyons honnêtes ! Il n’existe pas de pays dans lequel un candidat vend sa maison pour financer sa candidature.

GREENWALD : Ils doivent avoir le soutien des gens riches.

DA SILVA : Bien sûr ! Aux États-Unis c’est même charmant, il y a des récompenses pour celui qui a collecté le plus.

GREENWALD : Obama et Clinton, ils ont tous deux eu le soutien de Wall Street et d’hommes d’affaires.

DA SILVA : C’était la règle du jeu : vous demandiez de l’argent, l’homme d’affaires vous donnait de l’argent, vous comptabilisez l’argent et les représentants de la Justice approuvaient vos comptes et c’était tout.

GREENWALD : Et c’est ainsi que les riches obtiennent des faveurs.

DA SILVA : Maintenant il y a cette idée qui y est associée, et le PT avait l’habitude de défendre cette idée de « Arrêtons les donations privées et rendons le financement entièrement public, ce qui est le moyen le plus digne de faire campagne. »

GREENWALD : Le PT ne va plus recevoir d’argent de sociétés pour ses campagnes ?

DA SILVA : Le PT a décidé de ne plus accepter les contributions des sociétés pour les campagnes électorales, et je pense que c’est une chose extraordinaire, une chose courageuse et qui pourrait faire renaître le PT encore plus fort.

GREENWALD : Et si vous vous présentez comme président une nouvelle fois, maintiendrez-vous cette promesse ?

DA SILVA : Bien sûr ! Je suis déjà bien connu.

GREENWALD : Il y a beaucoup de critiques de la gauche brésilienne affirmant que le PT perpétue le modèle néo-libéral, qu’il protège l’intérêt des riches et non des pauvres. Est-ce exact ?

DA SILVA : Non, nous allons utiliser les travailleurs et les plus humbles du pays pour faire repartir l’économie du Brésil. Pour cela, nous avons besoin de fonds, de crédits et de partenariats. Et ça, avec l’aide de Dieu, je veux aider Dilma à l’accomplir.

GREENWALD : Eh bien, merci beaucoup pour cette interview, Monsieur le Président.

DA SILVA : Merci.

Source : The Intercept_, le 11/04/2016

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

Commentaire recommandé

Charles // 03.05.2016 à 04h24

Ce qu’exprime la crise brésilienne, c’est en fait la fin d’un cycle, marqué par l’incapacité des politiciens réformistes, passé le boom des matières premières, à offrir la moindre alternative à un capitalisme décadent. Reste à faire le saut anticapitaliste, ou à retomber dans les mains des dictatures.
A lire: Fin d’un cycle ou épuisement du post-néolibéralisme
http://wp.me/p5oNrG-msP

15 réactions et commentaires

  • Sam // 03.05.2016 à 00h48

    Vraiment étrange. On sentirait presque la réserve d’un homme politique en campagne qui voudrait ménager d’éventuels soutiens. Presque de la peur. Il renie avec force ses origines syndicales, met une distance énorme avec les autres présidents de la gauche latine et pense nous rassurer (?) en nous disant qu’il est comme le PS chez nous ? Ou les travaillistes ?

    Et puis son parti est en place depuis 2002, alors qu’il parle comme s’il était dans l’opposition, proposant ce qu’il pourrait changer s’il était élu ?

    Et enfin, pas un mot des BRICS…

    Vraiment très étrange entretien…

      +14

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  • Pierre // 03.05.2016 à 01h05

    Bonsoir. Pour ceux qui désirent creuser le sujet des tentatives de déstabilisation de plusieurs pays d’Amérique latine depuis plusieurs mois, voire plusieurs années depuis qu’un certain nombre tentent de reprendre le destin de leur peuples en main, et la façon de cela est traité par nos médias (une fois de plus, a-t-on envie de dire), permettez-moi de vous indiquer ce lien vers investig’action http://www.investigaction.net/le-journal-de-notre-amerique-13-dilma-au-coeur-de-la-tempete-mediatique/ lien assez complet mais non exhaustif.

      +17

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  • Charles // 03.05.2016 à 04h24

    Ce qu’exprime la crise brésilienne, c’est en fait la fin d’un cycle, marqué par l’incapacité des politiciens réformistes, passé le boom des matières premières, à offrir la moindre alternative à un capitalisme décadent. Reste à faire le saut anticapitaliste, ou à retomber dans les mains des dictatures.
    A lire: Fin d’un cycle ou épuisement du post-néolibéralisme
    http://wp.me/p5oNrG-msP

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  • Jules Vallés // 03.05.2016 à 11h03

    il n’y a pas de mot pour dire « destitution » en Brésilien???
    Ou alors c’est signé par les organisateurs des manifs !
    A quand « l’impeachment » d’élus Français qui s’opposeraient (on peut rêver) disons au TAFTA?

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    • Pierre // 03.05.2016 à 12h35

      Demissão en portugais veut dire congédiement, destitution
      Démission se traduit par renúncia

        +4

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      • silk // 03.05.2016 à 23h33

        alors d’où vient le terme impeachment ? de l’anglais mais pourquoi utiliser un terme anglais alors que c’est pas la langue du Brésil ?
        il y a sûrement une raison ?

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        • Wilemo // 04.05.2016 à 19h02

          Je me suis posé la même question. Une réponse possible, quand une manif. est un mouvement revendicatif et pas la symbolisation d’une barricade, est destinée à donner de l’echo à une parole via les médias.
          Dans cette hypothèse, la réponse aurait à voir avec la couverture médiatique des manifs. Si le public médiatique est anglophone, la manif leur sera plus vendeuse en anglais. Ce public « conscientisé » (oui, parce que ce terme ne fonctionne pas que pour la « dissidence » 😀 ) sera plus enclin à accepter des mouvements de la part de leur propre gouvernement si celui-ci y trouvait un intérêt.

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        • Adriana // 07.05.2016 à 12h37

          Votre raisonnement démontre l’ignorance en historie de la colonisation de l’amerique latine. le colonisateur du Bresil etait le royaume du Portugal, tandis que les autres pays a été l’Espagne. Le Brésil a fait partie du royaume d’Espagne pour des brèves périodes, mais pas au point d’avoir la langue espagnole officielle.
          [Modéré]
          J’ajoute que pour une bonne période le tupi-guarani langue indienne a été la langue parlée dans les rues tandis que le portugais faisait partie de l’élite dans le Brésil colonie portugaise.

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  • Alae // 03.05.2016 à 13h50

    Le cas parallèle de Macri en Argentine (incroyable réélection d’un néolibéral dans un pays pourtant ruiné par le néolibéralisme dans les années 2000) signale des lacunes graves en matière de communication gouvernementale. Cristina Kirchner en Argentine, Lula et Roussef au Brésil ont commis l’erreur phénoménale, pour l’une, de diviser l’opinion (Argentine, où même des péronistes a priori pro-Kirchner ont fini par voter Macri) et pour les autres, de laisser les médias aux mains de néolibéraux pro-USA (Brésil). En conséquence, en Argentine comme au Brésil, les médias n’ont eu de cesse d’attiser les clivages sociaux. Il a suffi ensuite d’une récession pour qu’en Argentine, les électeurs aillent se tirer une balle dans le pied en votant Macri ou au Brésil, qu’ils retirent leur confiance à Roussef, aujourd’hui à 8% d’opinions positives alors qu’elle n’est accusée d’aucun délit.
    http://www.slate.com/articles/news_and_politics/interrogation/2016/04/dilma_rousseff_impeachment_and_the_democracy_crisis_in_brazil.html
    En Argentine, un ex-leader péroniste explique pourquoi il a voté Macri. Lien en espagnol.
    http://www.clarin.com/opinion/Kirchnerismo-Disenso-Consenso-Democracia_0_1465653973.html

    Comment faire comprendre à un président de gauche modérée à quel point diviser l’opinion (Argentine) ou laisser les antagonismes sociaux historiques d’une société s’aggraver (Brésil) est autodestructeur, surtout dans un contexte de crise mondiale ?

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    • Adriana // 07.05.2016 à 12h43

      Une inflation à plus de 25% laissée en héritage entre autres bonnes choses par Kirchner est c’est qu’on appelle Une « bonne » gestion du pays. Il n’y a aucune propagande qui tienne la narrative devant les faits de la réalité, par exemple aller au marcher s’acheter à manger et découvrir que vous n’en avez suffisant pour payer.

        +0

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  • Mons // 03.05.2016 à 14h45

    Il ne dit pas un mot sur la baisse du prix des matieres premieres (dont le prix du baril) lorsqu’il parle economie, alors que l impact sur le bresil est enorme.

      +5

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    • silk // 03.05.2016 à 23h45

      les commentaires au dessus l’ont bien souligné : un bien etrange entretien.
      Il prend ses distance avec la gauche se comparant au PS français en disant bien que le PT accepte toutes les idées.
      Il déclare [Dilma]’ a offert un réajustement et a commencé à changer quelques petites choses concernant les droits des travailleurs. »
      Quelques petites choses ?
      il considère que c’est juste un problème dans la gestion des rentrées de l’État et que la crise mondiale serait l’unique problème de l’économie brésilienne (pour laquelle le pétrole joue un rôle très, trop important). La seule faute de Dilma serait d’avoir mal anticipé la baisse des recettes de l’État et de n’avoir pas augmenté les impots pour des raisons electoralistes.
      Pour lui, il n’y a pas de rapport avec le fait d’avoir privilégié les entreprises et le « réajustement » n’est pas à remettre en cause.
      Lula n’a jamais été réellement à gauche, il a surtout contribué à améliorer la vie d’une grande majorité de brésiliens (qui sont pauvres) à une période charnière de son histoire, contribuant à sa « légende » au moment où il y a eu nombres de mouvements de gauche ou d’émancipation sur ce continent.

        +3

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      • Pierre // 04.05.2016 à 00h14

         » il a surtout contribué à améliorer la vie d’une grande majorité de brésiliens (qui sont pauvres) ». C’est déjà pas mal sur le principe, non ? Je connais un autre gouvernement qui se prétend de gauche et qui, jusqu’à preuve du contraire, n’a amélioré la vie de personne, à part peut-être celle des 0,1%, et il est français. La baisse du prix des matières premières est la conséquence du ralentissement de l’économie mondiale, je ne vois pas comment on peut l’imputer au gouvernement brésilien, quel qu’il soit.

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  • hellebora // 04.05.2016 à 01h08

    Pour poursuivre, le point de vue de Bernardo Kucinski de passage à Paris, pour la parution en français de son dernier bouquin, et invité sur France Inter mardi soir (replay à partir de mercredi).http://www.franceinter.fr/emission-lhumeur-vagabonde-bernardo-kucinski-scientifique-journaliste-et-auteur-bresilien Quand Lula a été élu, ce scientifique est devenu un de ses conseillers – http://www.ventsdailleurs.fr/index.php/les-auteurs/item/bernardo-kucinski – Pour lui, il ne fait aucun doute que Dilma Roussef va effectivement être destituée…

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  • Valérian // 10.05.2016 à 18h07

    Un article du monde illustrant le parti pris de nos medias

    L’article s’étend en long et en large sur Dilma Roussef, la présidente, Lula, l’ancien président, des membres de leur parti, des membres du parti allié au gouvernement…. et pour le pluralisme balance 2 noms de personnes de droites (même si c’est les plus en vue), sans fournir aucun détail.

    En somme c’est un bon article pour illustrer le parti pris des media français dans la politique intérieure brésilienne, comme le signale Glenn Greenwald dans le billet.

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